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UNE VIE DÉMENTE

de Raphaël Balboni et Ann Sirot ****

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Séance Quintessence - Film en compétition - Belgique - Sortie 10 novembre 2021

PRIX DU JURY - FESTIVAL EFFERVESCENCE MÂCON 2021

Avec Jo Deseure, Jean Le Peltier, Lucie Debay, Gilles Remiche

Alex et Noémie, la trentaine, veulent un enfant. Leurs plans sont chamboulés quand Suzanne, la mère d’Alex, se met à faire n'importe quoi.

Au début cela ne ressemble pas à des symptômes et voir cette femme active, drôle, au goût artistique prononcé (elle tient une galerie d'art contemporain) dépenser sans compter, écouter l'été de Vivaldi à fond dans sa voiture, se garer sur les places handicapés... peut paraître amusant. Rapidement la réalité est plus amère, Suzanne est atteinte de démence sémantique, une forme d'Alzheimer, une maladie neurodégénérative qui se manifeste par une perte des concepts, les patients ne reconnaissant plus les objets qu'ils voient, qu'ils touchent, les mots qu'ils lisent ou qu'ils entendent.

Il y a parfois dans le parcours d'une vie le moment terrible où les rôles semblent s'inverser, où les enfants même adultes, même parfois âgés deviennent le parent de leur propre parent, par la force des choses et l'intervention brutale de la maladie dans le quotidien. S'occuper, prendre soin de sa mère au moment même où il a décidé de devenir père avec sa compagne est pour Alex source de conflits intérieurs et une période très troublante qu'il vit avec beaucoup de difficultés.

Alors, est-il possible de réaliser et de regarder une comédie traitant d'un sujet aussi grave et angoissant ? Oui quand il est traité avec autant de justesse et de délicatesse que le font les réalisateurs qui sont confrontés à cette maladie au travers de la mère du réalisateur. Certaines situations sont loufoques et tendrement drôles lorsque Suzanne suit sa tondeuse à gazon dans le jardin par exemple ou quand elle se met à développer une obsession quasi fusionnelle envers sa voiture que son fils lui supprime car elle est devenue un danger public. Mais jamais l'être humain, la personne malade n'est atteinte dans sa dignité.

Imagine Film Distribution - Films - Une vie démente

On s'attache beaucoup à cette femme tellement intelligente, pleine de vie et à son fils et sa compagne, d'abord complètement déroutés, très inquiets qui finissent par s'adapter au rythme imposé par la malade. Ingérable et hyper active, Suzanne ne peut rester seule dans sa grande maison. Un travailleur social, Kevin, s'installe donc chez elle et lui prodigue soins et attentions en continu. Seul petit faux pas de ce très beau film triste et gai, Kevin appelle Suzanne "mamie" et je ne comprends pas pourquoi. Bien qu'elle soit âgée, elle a  la vitalité d'une gamine et la beauté sous les rides est encore bien perceptible. Le garçon est surprenant, d'une patience et d'un calme redoutables. Il a aussi la particularité d'écouter Vivaldi en version métal ce qui ravit Suzanne.

Contrairement à ce qui est peut-être attendu, le final nous prend par la main avec douceur vers une conclusion douce et apaisée mais en aucun cas simpliste et idéalisée.

Tous les personnages sont croqués avec précision, les dialogues sont savoureux. Les séances devant certaines institutions en face caméra : l'assurance maladie, les médecins, le banquier (que l'on ne voit jamais) sont particulièrement soignées et TRES drôles même lorsque la situation ne l'est pas. Un soin particulier est apporté aux compositions graphiques. Les personnages sont parfois habillés de la même façon devant un mur en fond d'écran assorti à leurs tenues, c'est drôle et beau.

Bande-annonce: "Une vie démente" de Raphaël Balboni et Ann Sirot - YouTube

Il fallait sans doute une bonne dose de belgitude pour traiter aussi bien de l'inquiétude et du chagrin face à la maladie, à la vie qui va, qui continue, sans miner le moral des spectateurs qui ne s'y sont pas trompés en faisant un triomphe à ce film délicat.

A noter la prestation hallucinante de l'actrice Jo Deseure dans le rôle de Suzanne. Elle est une comédienne de théâtre reconnue dans son pays. Son naturel, sa fraîcheur, sa malice crèvent l'écran.

Commentaires

  • Absolument. A ne pas oublier :-)

  • Très beau texte pour évoquer ce film étrange qui, sous des dehors comiques, travaille une question douloureuse. Je ne connaissais pas cette maladie dégénérative, c’est assez déconcertant.

  • Merci.
    Tu as tout compris et ce film est beau.
    Je ne connaissais pas non plus cette horrible maladie.

  • Nous avons eu la chance de voir ce film au festival de La Ciotat-Berceau du Cinéma en juin. Nous l’avons apprécié et il a récolté plusieurs prix dont le Lumière d’Or. La formidable actrice Jo Deseure a eu le prix d’interprétation féminine ainsi que le prix du public. Les réalisateurs, très sympathiques, étaient présents. Ils ont su faire une comédie sur un sujet grave et même effrayant, loin de films déprimants comme Amour ou The Father. Nous avons également aimé les effets de style qui rendent ce film encore plus original. Du beau travail de cinéma !

  • Ah je suis entièrement d'accord. Réussir une comédie sans jamais humilier la malade c'est exceptionnel. Bien vu de comparer à Amour que j'avais détesté ou The father dont j'ai surtout aimé Anthony.
    Jo Deseure mérite ce prix.
    Il n'y avait que le réalisateur très sympathique et humble malgré ses prix.
    Les effets sont en effet formidables.

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