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BLACKkKANSMAN

J'ai infiltré le Ku Klux Klan

de Spike Lee ****

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Avec John David Washington, Adam Driver, Topher Grace, Laura Harrier, Robert John Burke, Harry Belafonte

Au début des années 70, alors que la lutte pour les droits civiques fait rage et que des émeutes raciales éclatent dans les grandes villes des États-Unis, Ron Stallworth devient le premier officier Noir américain du Colorado Springs Police Department. Son arrivée est accueillie avec scepticisme, voire avec une franche hostilité, par les agents les moins gradés du commissariat. Le jeune homme entend bien ne pas rester aux archives où ses collègues le prennent un peu de haut. C'est alors qu'il va proposer à son chef d'infiltrer le Ku Klux Klan pour en dénoncer les exactions. Stupéfaction générale. Comment un noir peut-il infiltrer le KuKluxKlan ?

C'est simple. Ron n'aura que des contacts téléphoniques tandis que son collègue blanc et juif (c'est important parce que les crevures du KKK ne se contentent pas de détester les noirs) Flip Zimmerman, se fera passer pour Ron. Rapidement Flip séduit le chef du Klan, David Duke (toujours en activité aujourd'hui et toujours aussi haineux) par ses propos racistes. Il devient même rapidement un proche de Duke. La mission de l'infiltré ? Déjouer un attentat programmé par le Klan.

De cette histoire vraie absolument incroyable Spike Lee tire un film sans doute inégal mais quand même bien au-dessus de la moyenne ambiante. Et pour une fois, je suis d'accord avec les Inrocks : "...le comique est quand même ce qu’on a encore trouvé de mieux pour ridiculiser les imbéciles et les ordures". Des imbéciles et des ordures dans ce film il y en a un paquet que le réalisateur se charge d'atomiser en les rendant encore plus laids physiquement et répugnants intellectuellement que leur pensée et idéal suprémacistes ne leur permet déjà.

Cela dit, le film est loin d'être une grosse farce grotesque. Certains le trouvent lourdingue, sans nuances. Peut-être. Cela dit il paraît que le livre de Ron  Stallworth dont le film s'inspire est lui aussi bourré d'humour. Et pourquoi faudrait-il faire dans la dentelle pour condamner la connerie humaine. Spike Lee a toujours été en pétard au risque de ne pas s'attirer que des sympathies mais peu importe, quand on tient un aussi bon film qui a la rage et qui s'attaque à un fléau de l'humanité : le racisme, on ne peut qu'applaudir et accepter de se laisser embarquer. Surtout que Spike Lee ne se contente pas de balancer son pamphlet, il réalise un film de grande tenue, je dirai même de grande classe, mixant buddy movie, film policier et militantisme. Il relie avec panache le passé et le présent.

Le film commence par la vision d'un extrait d'Autant en emporte le vent dont le choix m'a paru étrange. Scarlett, à la recherche du Docteur Meade, traverse Atlanta où sont allongés des centaines de blessés et de morts. C'est loin d'être le passage le plus raciste du film. Peut-être pourra-t-on m'éclairer sur ce choix. S'ensuit la prestation absolument géniale et hilarante d'Alec Baldwin en Dr Kennevrew Beauregard qui éructe, vomit sa haine des noirs et vante les qualités de la race supérieure lors d'un discours exceptionnel de férocité. Il se racle la gorge comme un acteur prêt à jouer sa grande scène. L'acteur est génial. Et le ton est donné. Le film anti-Trump dont l'action se situe dans les années 70 est toujours brûlant d'actualité. Si ça paraît simple et lourdingue à certains de montrer qu'en 2017 lors d'une manifestation à Charlottesville un abruti raciste fonce dans la foule avec sa voiture signifiant que les choses n'ont pas changé, je trouve plutôt utile de le rappeler. La haine et le racisme, emmenés par un Trump qui les porte en étendard sont toujours d'actualité.

Le seul chipotage que je m'autorise vient de la répétition des scènes au téléphone. Il y en a trop et on a du mal à croire que de l'autre côté du fil, l'interlocuteur n'entend pas les collègues de Ron s'esclaffer parce que Duke capable de devenir hystérique quand un noir le frôle, ne s'aperçoit pas que c'est un noir qui lui parle.

Mais là où Spike Lee atteint le sommet c'est lors d'une scène très longue et magistrale où il met en parallèle deux évènements qui ont lieu simultanément. D'un côté lors d'une grand messe de la secte KKK, les membres, abominables, applaudissent à tout rompre la projection de Naissance d'une Nation de D.W. Griffith dès qu'un noir humilié ou ridiculisé apparaît à l'écran. De l'autre, de jeunes afro-américains réunis écoutent avec horreur le récit détaillé d'un vieux monsieur (idée géniale qu'il soit interprété par Harry Belafonte (que je n'avais pas reconnu) qui a milité pour les droits civiques) qui relate le lynchage par la foule d'une cruauté sans nom, un acharnement dans la barbarie, de Jesse Washington, jeune homme de 17 ans en 1916. La scène est géniale.

Pour le reste, je trouve que Spike Lee a tout soigné. L'histoire, le casting (Washington junior est parfait), l'interprétation, la reconstitution des seventies, les coiffures afros et la musique originale comme les chansons sont une tuerie !

P.S. : je crois que parmi tous mes articles mal fagotés et décousus, celui-ci peut faire office de maître étalon. Pardon à Spike s'il me lit (et je pense qu'il me lit) et à vous qui me lisez.

Commentaires

  • Pour moi, même si le film n'est pas sans défaut, c'est de que j'ai vu de meilleur (notamment en terme de mise en scène) depuis un paquet de semaines.

  • Je suis d'accord. C'est sans doute ce que jai vu de mieux depuis Hostiles... Spike Lee en a toujours sous la semelle et c'est bon de le redécouvrir.

  • Bonjour Pascale, je souscris à ce que tu écris même si j'ai trouvé que le film était un peu long à démarrer. Il aurait pu durer un quart de moins mais c'est un défaut mineur. Washington Junior est bien mais les autres aussi. Mention spéciale à l'acteur qui interprète Felix, c'est un Finlandais, il est plus raciste que nature. Les images d'archives à Charlotteville sont terribles. Bonne journée.

  • Bonjour dasola. Oui le debut piétine un peu et se concentre sur l'arrivée de Ron dans la police.
    J'ai oublié de parler de la grosse femme de Félix aussi au racisme hystérique. On dirait qu'elle jouit quand elle voit un noir se faire massacrer. Jai oublie de parler des costumes ridicules du klan. Mais qu'ils ont l'air con avec leur robe et leur cagoule... bref je suis allée trop vite.

  • Je vais y aller, parce que même imparfait, je suis sûre qu'il est meilleur que bien d'autres et c'est quand même normal d'être en colère en 2018 quand on voit ce qu'on voit .. Lourdingues et sans nuances de toute façon, ces gens-là le sont, alors pourquoi prendre des gants pour les décrire ?

  • C'est un gand film et Spike Lee traite ces gens comme il le mérite même si on ne peut pas rire de tout... Je me demande si le vrai Duke a fait une syncope en voyant le film. Il paraît que même Trump est embarrassé par le soutien de cette pourriture. BIEN FAIT.

  • J'ai trouvé ce film génial.
    Merci. Sans toi je serais passée à côté.
    Tout est si drôle malgré le sujet... jusqu'aux images d'archives qui m'ont glacée le sang. Réussi.

    Et bravo pour tes jeux de mot sur spike

  • Heureuse de t'avoir incitée à voir ce grand film qui sera sans doute dans mon top.

    Oups! Des jeux de mots sur Spike ???

  • spike qui te lit.... t'as même pas fait exprés, trop forte!

  • Ah oui :-) c'est exceptionnellement beau !

  • Mal fagoté peut-être, mais on saisit bien l'idée et le point de vue. En cela, ton article est parfaitement ajusté au film.

  • Aussi mal fagoté qu'un film de Spike Lee ???
    Merci.
    You make my day :-)

  • La scène que tu mentionnes, au cœur du film, est aussi celle qui m'a le plus marqué et qui pour moi relève du génie de ce film. La farce est sinon un peu grotesque, caricaturale mais je crois que c'est fait exprès, histoire d'enfoncer profondément le clou. La farce est grotesque, mais les personnages représentés le sont tout autant !
    Ps : j'ai fait mon retour au cinéma, j'ai craqué !

  • Je comprends que tu aies craqué et tu reprends avec un excellent film (après Au poste !).
    Il parait que le livre est plein d'humour aussi.
    Cette scène est exceptionnelle, j'avais le cœur battant.

  • Cette scène justifie à elle seule mon déplacement, je l'ai trouvée si forte. Trop d'émotions m'ont traversée, les larmes ont coulé toute seule. OMG !

  • Normal... on a envie que ça s'arrête et que ça ne s'arrête jamais.
    Je me suis renseignée sur le calvaire du jeune homme lynché par la foule. C'est au delà de ce qu'on peut imaginer.

  • Au vu de tous ces commentaires et critiques, je vais m'empresser d'aller le voir au cinéma.

  • Ce n'est pas encore l'heure du bilan, mais, pour moi, c'est sans aucun doute l'un des films de l'année. Quelques petites faiblesses sur la forme, mais l'importance du propos les compense largement. Et il y a tout de même beaucoup de bonnes choses du point de vue cinéma, à commencer par un casting de choix et de très bonnes interprétations, dans les deux "camps".

    Je trouve vraiment fort d'arriver à faire (sou)rire sur un sujet aussi grave. Au fond, cela ne fera que prêcher des convaincus, mais bon... ça fait du bien !

  • On fait souvent des bilans intermédiaires. Et nous sommes en septembre... où est passé l'été ?
    Ce film sera dans la dizaine marquante et gagnante.
    Côté réalisation ça envoie...

  • Une agréable bonne surprise. C'est hyper bien écrit et réalisé, très bon montage, souvent drôle, bien interprété, des références au cinéma qui prennent sens par rapport à la propre oeuvre de Spike Lee, une fin choc (pour mieux nous unir contre le racisme) alors que les images sont passées des tas de fois à la télé. A voir absolument !

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