Un été italien de Michaël Winterbottom ***
Sur une route enneigée de la banlieue de Chicago, la maman conduit pendant que les deux filles jouent pour passer le temps à deviner la couleur des voitures qu’elles croisent. Un moment d’inattention et c’est l’accident. Les deux filles survivent, la maman meurt. Face au cataclysme provoqué par ce drame et alors qu’il devient au fil des mois de plus en plus insupportable de vivre dans l’appartement familial, le père, prof de fac, profite d’une opportunité de poste à Gênes en Italie pour aller y vivre avec ses filles. La petite, Mary, va emmener avec elle le fantôme de sa maman et sa culpabilité (elle se sent responsable d’avoir détourné la vigilance de sa mère au volant), la grande va tenter de vivre sa vie d’adolescente, découvrir une forme d’indépendance, les premiers émois amoureux, sous le regard attentif et préoccupé du père.
Le titre original du film est « Genova » et il est évident qu’elle est le 4ème voire le 1er personnage de cette histoire qui parle de deuil, de « survivance », d’amour. Ecrasée de soleil sur la plage, grouillante d’animation dans ses artères principales, moderne et chargée d’histoire, ombrageuse et parfois inquiétante par son labyrinthe de ruelles où il est si simple de se perdre, la vision de cette ville donne tour à tour l’envie de faire ses bagages pour aller y séjourner tant elle est mystérieuse et colorée et de ne jamais y mettre les pieds tant elle semble grouillante, bruyante et survoltée.
C’est dans ces méandres que les trois personnages vont tenter d’apaiser la confusion et le chagrin qui règnent dans leur cœur et dans leur âme. Et on peut dire que le réalisateur sans pourtant jouer sur l’émotion, au contraire, met le cœur du spectateur à rude épreuve en scrutant et décortiquant tous les tourments endurés après un tel anéantissement.
Les rapports entre le père et ses filles, ainsi que ceux des deux sœurs qui se rejettent tout en s’adorant, sont admirablement bien vus et décrits. Mais je crois que rarement le dévouement proche de la dévotion, la tendresse, l’inquiétude, la vigilance et l’amour paternels n’ont été si bien incarnés à l’écran. Le père Colin Firth débordant d’amour, est contraint de faire passer son propre chagrin au second plan. Sans effet appuyé, sans larme, patiemment, calmement, rongé d’angoisses par moments lorsqu’une de ses filles nage un peu trop loin, lorsqu’une autre disparaît, fait preuve d’une attention permanente, de tous les instants, de jour comme de nuit, la petite étant sujette à des cauchemars effroyables, la grande se permettant des retours de plus en plus tardifs après ses soirées… Délaissant les opportunités de rencontres, repoussant une vieille amie amoureuse de lui, il se consacre tout entier et sans partage à ses filles (les deux jeunes actrices sont formidables) avec un naturel renversant.
A force de faire le grand écart entre tous ses films et en regardant de plus près sa filmographie, je me demande si Michaël Winterbottom n’est pas en train de devenir un des mes réalisateurs préférés tant il réserve de surprises à chaque fois. Ce film, tout en délicatesse, charme et pudeur est un nouvel ovni dans sa filmo, un coup de cœur et un coup au cœur.
Quant à Colin Firth !!!
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