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Comme un juif en France d’Yves Jeuland ****

 

Lorsque la télévision offre un tel programme, un documentaire de cette force et de cette intensité, passionnant, je ne peux qu’applaudir ! Ce deuxième volet, diffusé hier soir évoquait, de la libération en 1945, à nos jours, l’évolution et les rapports des juifs de France avec la République.

De retour des camps, les juifs sont écrasés par le silence qu’on leur impose. Alors que les survivants attendent le retour des leurs, ils finissent par douter et finalement ne plus y croire en découvrant aux actualités l’horreur des camps. Seuls les résistants font office de martyrs alors que le génocide des juifs et des tziganes est passé sous silence. Apparaissent aussi les négationnistes. Il suffit d’un seul plan au réalisateur pour les évoquer, un plan unique, sidérant d’un intervenant (j'ai préféré oublier son nom) qui affirme « le zyclon est un pesticide encore utilisé de nos jours. Alors oui, les allemands ont gazé… les poux !!! ».

Malgré la création de l’Etat d’Israël, les français restent en France mais les juifs réalisent à quel point il est dangereux d’être juifs, ils enfouissent cette appartenance au fond d’eux. Le retour des rapatriés juifs pieds noirs d’Algérie en 1962 est un tournant. Ceux là n’ont pas connu l’indicible de la barbarie et, d’Afrique du Nord ils rapportent les couleurs, la gaieté, les traditions. Être juif devient presque « fashion ». En 67, alors que Nasser veut jeter tous les juifs à la mer, la peur ressurgit. Mais David écrase Goliath en 6 jours et tout le monde descend dans la rue pour soutenir ce peuple. Le cliché du juif victime, peureux, lâche, incapable de se défendre est balayé. C’est la première (et la seule ?) fois que sont réunis juifs, arabes, musulmans, chrétiens… Voir des milliers et des milliers de gens dans les rues de Paris qui chantent à l’unisson « Hava Naguila » me fait plus d’effet que d’entendre « I will survive » (survivre à quoi ?) sur les Champs Elysées autour d’un ballon rond. Encore une fois le silence de l’État français est assourdissant si ce n’est l’intervention indigne de De Gaulle en novembre 67 qui affirme que les juifs font partie d’« Un peuple sûr de lui et dominateur »… Un dessin de Tim paraîtra dès le lendemain de cette déclaration dans l’Express et fera le tour du monde :

 

S’ensuivent dans les années 80, l’attentat de la rue Copernic, celui de la rue des Rosiers, la profanation du Cimetière de Carpentras et les paroles malheureuses de Raymond Barre qui affirme que parmi les victimes se trouve « un français innocent qui passait par là par hasard »… les autres victimes (juives) ne sont donc pas innocentes ! Le juif est à nouveau désigné comme coupable et la résurgence de l’antisémitisme est inquiétante.

Ce n’est que Chirac en 2003 qui reconnaîtra la responsabilité de la France et de la police française qui a prêté son concours aux rafles allemandes dès 1941. Mais ça n’est pas suffisant, il semblerait qu’actuellement les mêmes clichés, les mêmes amalgames qui font de tous les musulmans des terroristes, assimilent tout juif à un militaire israëlien. La France antisémite ? C’est inconcevable n’est-ce pas ?

Le film se termine, non sans ironie sur la phrase d’un réalisateur juif qui affirme avoir la solution pour régler le problème. « La solution, dit-il, elle est simple : une conversion obligatoire et généralisée au judaïsme ! Ainsi tout le monde aurait de l’humour, tout le monde serait riche… ».

Mais c’est la voix vibrante d’émotion, de colère, d’indignation et surtout hélas d’inquiétude de Robert Badinter qui résonne encore !

Quelles justifications ont l’antisémitisme et TOUS les racismes ? AUCUNE !

P.S. : pardonnez la maladresse de cette note !

Commentaires

  • Je n'ai pas la télé, pourtant j'aurais vraiment aimé voir ce documentaire. La France demeure antisémite, à n'en pas douter, un vieux fond, latent, et qui ne dit pas son nom, qui se révèle à demi-mot quand on gratte un peu. Je pense à un couple d'amis. Lui musulman pratiquant, elle élevée dans la foi chrétienne, tous les deux du genre "ouverts" et moralement libéraux, qui votent à gauche, voire à l'extrême gauche, et qui me sortent, tout naturellement autour du thé à la menthe:
    "- tout de même, on se disait l'autre jour, ils sont vraiment partout! dès qu'il y a de l'argent, du pouvoir c'est forcé, ils en sont!".
    - Mais qui? lui demandais-je.
    - Les Juifs! me répond-elle! Ils tous des noms de Juifs, des tête de Juifs dans ce genre de milieu (média, finances)..."
    Ce sont des gens instruits, éduqués, informés, pourtant...

  • Bravo ! De ne pas avoir la télé.
    Tu auras peut-être l'occasion de voir quand même ce document passionnant.
    Oui, je vois bien le genre de discours. Le pire étant quand même "des têtes de juifs"... Instruction, éducation et information ne sont pas synonymes d'intelligence... ça se saurait !

  • Je l'ai regardé aussi. Je ne pense pas que ce soit à cause de ça que je sois malade. Mais c'est vrai que l'antisémitisme ordinaire et "propre" existe dans tous les milieux, et même les plus intellectuels.
    Une des personnes interrogées a très bien évoqué ces accusations larvées mais multi et omni-présentes contre les juifs.
    Et aussi l'amalgame et la confusion entre les juifs/israéliens/israélites/sionistes... ces termes sont utilisés n'importe comment.
    Mon grand-père n'est pas revenu de Buchenwald et cela a laissé des séquelles sur déjà deux générations. Je me suis toujours demandé ce que cela devait être d'avoir un voile noir (pour reprendre l'expression d'Annie Duperey) sur la quasi-totalité d'une famille. Car chez moi non plus on ne parlait pas des camps. J'ai eu toutes les peines du monde à "avouer" à mon père que j'allais visiter Buchenwald parce que c'était au programme d'un voyage où il m'avait inscrite. J'avais 15 ans. Je ne comprenais pas pourquoi, mais je sentais que c'était tabou, et je me sentais coupable. Néanmoins, cela m'a peut-être aidée à survivre d'y aller.

  • Mon grand père en est revenu de Buchenwald.. mais il n'en parlait jamais non plus. C'est curieux, c'est fou, ce sont toujours les victimes qui ont honte on dirait, soit d'être ce qu'elles sont, soit d'avoir survécu.
    Est-ce que ce monde est sérieux ?

  • Zut, je l'ai raté ce truc, tu pourrais prévenir quand même !
    En lisant l'anecdote de Polysémie, l'expression "on est toujours l'arabe de quelqu'un" prend tout son sens.

    Moi, c'est les cons que j'aime pas. D'un côté, c'est moins pire que le racisme ordinaire, d'un autre côté, je dois admettre que c'est foutrement subjectif :-D.

  • Oh tiens, je fréquente les mêmes personnes que Polysémie !

    La dernière fois, ils ont fait la liste de tous les animateurs télé qui sont juifs.

    Et puis, dernièrement : « Sarko a augmenté son salaire de 172%, ce n'est pas étonnant :c'est un juif ! ».

  • Loréal : je suis tombée dessus par hasard à cause d'une journée fièvre et gavage télé... pour bien me rappeler pourquoi je ne la regarde pas... sauf pour ce documentaire RARE !
    Je crois qu'il y a plus de cons que de juifs et d'arabes mais il doit aussi y avoir des arabes et des juifs cons...

    Max : je ne peux plus "voir" une "amie" qui tient un propos raciste par phrase ou presque... tout en se marrant tout le temps... 'je suis pas raciste mais...' dit-elle tout le temps. Au bout d'un temps, j'ai cessé de lutter et d'essayer de comprendre.

  • ta note est très belle, elle me touche

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