Liéna veille son défunt mari en compagnie de toute sa famille.

La jeune femme se trouve donc brutalement à la tête d'une exploitation industrielle de pins dans les années 20. Son autoritaire tante par alliance pense qu'elle va reprendre la gestion du domaine. Mais Liéna n'entend pas se laisser guider sa conduite et souhaite même poursuivre le rêve insensé de son époux : électrifier toutes les terres qui lui appartiennent désormais. Elle est loin de se douter quelle hostilité elle va rencontrer venant de sa famille, des syndicats qui entretiennent une grève et des ouvriers eux-mêmes habitués à vivre dans l'obscurité. En avance sur son époque, trop libre, trop moderne Liéna engage un combat peut-être trop grand pour elle. Elle s''attaque aux valeurs, aux traditions, aux habitudes d'un monde archaïque où la bourgeoisie n'entend pas lâcher une miette de ses privilèges et avantages. Et où les syndicats, milieu essentiellement masculin, même s'ils se laissent un temps troubler par la ténacité de la jeune femme, ne pourront rien contre la cruauté des événements.

Liéna fait partie de ces héroïnes romantiques, énergiques et audacieuses qui se retrouvent accidentellement aux commandes d'une entreprise et dont l'inexpérience n'a d'égale que la détermination. Sincèrement éprouvée par la mort de son mari, elle souhaite plus que tout poursuivre la concrétisation de son ambition mais elle  ne sait pas dans quel monde impitoyable elle pénètre. Corsetée au propre comme au figuré, devant renoncer pour honorer le deuil aux couleurs vives que sa jeunesse réclame, la délicate Marie Gillain apporte beaucoup d'éclat et d'ardeur à Liéna. Et on comprend qu'elle en arrive, déçue, à poser sa tête fatiguée sur l'épaule large, rassurante de son dévoué Iban, Jalil Lespert plus doux que jamais en régisseur fidèle et zélé.

Avec ses idées progressistes, Liéna doit s'imposer comme patronne mais aussi tenter de concrétiser son désir d'enfant sans homme, en adoptant, et de vivre au grand jour une histoire d'amour qui ne peut que choquer.

Ce film, le premier du réalisateur, possède plus d'un atout. Une histoire authentique quoique romancée, le beau portrait d'une femme libre ou plutôt qui tente de se libérer dans un milieu rural où l'on découvre les métairies du sud-ouest et ce contrat étrange qui consistait à payer en nature le bail signé avec le propriétaire des terrains. Les paysans et ouvriers devaient donc remettre une grande partie de leur travail et ainsi la plupart du temps vivre dans la misère. On découvre également le métier de gemmeur qui consiste à "blesser" le pin pour en récolter la résine.

L'image est particulièrement soignée avec une véritable esthétique de photographe. La démesure des pins, la forêt qui isole, enferme et au-delà, pour respirer et rêver d'horizons plus propices, l'océan, la dune du Pilat, magique anomalie géologique.

Un casting solide et impliqué avec en tête Marie Gillain et Jalil Lespert, beaux héros romantiques les pieds bien sur terre. Mais aussi Miou-Miou, grande soeur dépassée par la modernité de la petite. Et Bernard Blancan, en colère, militant, toujours idéal dès lors qu'il s'agit de défendre sans céder une cause sociale !

Et enfin, une musique originale sublime, réellement sublime, et quelques arrangements audacieux de Schubert façon Scott Joplin !