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INDOMPTABLES

de Thomas Ngijol ***(*)

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Avec Thomas Ngijol, Danilo Melande, Bienvenu Mvoe, Thérèse Ngono, Junior Bessala

Quelques mots avant que cet excellent film disparaisse des écrans tel un vulgaire kleenex jetable !

Un flic a été assassiné à Yaoundé, capitale du Cameroun. Le commissaire Zacharie Billong est chargé de l'enquête. Parallèlement, il doit également tenter de régler les différentes crises qui secouent sa famille.

Grosse surprise venant de la part de Thomas Ngijol revendiqué humoriste stand-uper qui jusque là ne m'avait guère convaincue avec ses pochades métissées traitant en sous-texte de thèmes "graves" tel que l'esclavagisme. Même si j'ai toujours trouvé qu'il était par ailleurs un excellent acteur ce qu'il confirme ici puisqu'il est à la fois devant et derrière la caméra. Il offre également une réalisation de haute tenue avec une image somptueuse et une vision de son pays ni idéalisée (loin s'en faut) ni misérabiliste.

Le scenario est adapté d'un documentaire datant de 1995 de Mosco Levi Boucault Un crime à Abidjan (Côte d'Ivoire). Pour se rapprocher de ses origines, le réalisateur né à Paris en 1978 et d'origine camerounaise par ses deux parents, déplace son intrigue à Yaoundé.

Il faut bien admettre que rapidement on se désintéresse de l'enquête et de la pauvre victime lâchement assassinée dans la rue et même si la recherche du coupable est au coeur du film, c'est davantage les relations intra-familiales et à l'intérieur du commissariat qui sont infiniment plus intéressantes. L'acteur/réalisateur ne nous cache rien des méthodes parfois un peu trop musclées des policiers qui n'hésitent pas à brutaliser les suspects, rien non plus de la corruption (avec notamment le détournement lamentable par un policier d'une somme devant servir à soigner un suspect grièvement blessé lors d'une tentative de fuite). C'est plus sur les failles de ce service d'ordre bien en difficultés pour faire respecter l'ordre que Thomas Ngijol s'attarde avec un réalisme convaincant.

Mais il faut bien reconnaître que ce sont davantage les faiblesses de son héros qui sont passionnantes. Son personnage intransigeant, "droit dans ses bottes", autoritaire, impeccable dans son costume cravate malgré la chaleur accablante (parce que sa position exige d'avoir "de la tenue") se comporte comme un flic à la maison avec ses enfants qui le craignent et sa femme qui fait front, et de manière paternaliste avec ses collègues, subordonnés et différents suspects. Des scènes évocatrices et d'une grande puissance émaillent le film : celle où comme seul argument pour tenter de remettre un de ses fils ado dans le droit chemin il lui raconte la façon dont Marvin Gaye (son idole) est mort (assassiné par son père)... on a fait plus pédagogue dans l'éducation et Billong ne doit pas avoir entendu parler de Montessori. La place que les femmes se forgent à coup de bélier dans ce système patriarcal est abordée régulièrement notamment lors de moments où sa femme lui tient tête, ou cet autre où sa propre fille se rebiffe devant l'éducation et les exigences du père avec des arguments imparables. Une multitude de moments, de confrontations qui font vaciller peut-être un peu les certitudes d'un type jusque là inflexible.

En une heure et dix-sept minutes (un exploit) le réalisateur embrasse une profusion de thèmes : la famille, les conditions de vie, le système de santé, la justice, la place des femmes, la paternité (j'en oublie) et dresse le portrait d'une Afrique et d'un pays encore coincé entre modernisme et traditions le tout dans un impressionnant français admirable, accent local compris.

Ou alors n'est-ce que l'histoire d'un petit garçon timide qui veut simplement (parce qu'il le lui a promis) aller manger une glace avec son papa !

C'est de toute façon passionnant.

L'image est magnifique, djembés et rythmes africains cadencent le film mais le bonheur sans nom d'entendre Marvin Gaye emplir la salle est indescriptible...

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