SORRY, BABY
d'Eva Victor ***(*)
ETATS UNIS
Avec Eva Victor, Naomie Hackie, Lucas Hedges
Agnès accueille sa meilleure amie Lydie dans sa petite maison isolée.
Les deux jeunes femmes partagent sans condition la même joie d'être ensemble et une grande connivence. Entre elles tout est simple et évident. Elles ont fait les mêmes études de littérature mais Agnès a connu la fâcheuse mésaventure de croiser un directeur de thèse prédateur. Ce traumatisme indécelable à l'oeil nu va la grignoter pendant plusieurs années sans pour autant nuire à sa réussite professionnelle. Qu'elle soit également équipée d'un solide sens de l'humour (arme absolue pour résister aux évènements/accidents de la vie) va l'aider à surmonter cette blessure imperceptible.
Eva Victor est une actrice/réalisatrice (très grande, très jolie) jusque là inconnue mais cela ne peut durer car elle fait merveille des deux côtés de la caméra pour sa première réalisation. Elle évoque avec justesse et gravité un traumatisme long à "encaisser", d'autant plus long et difficile à surmonter qu'il est invisible. "Tout te réussit, tout le monde te trouve intelligente et sexy" lui lance une camarade de promo envieuse qui ne sait rien. Et sur le plan de l'interprétation, Eva Victor est tellement expressive que d'un plan à l'autre on a parfois l'impression de ne pas avoir affaire à la même personne.
Malgré son sujet grave, Eva Victor le traite sans jamais verser dans le drame. Elle découpe son film en chapitres évocateurs d'un évènement parfois anodin de sa vie. Elle en parle "comme d'une histoire d'amour où les protagonistes ne sont pas des amants mais deux amies". C'est évident, cette amitié est de celle dont on rêve, celle où l'on retrouve l'intimité, la complicité, l'écoute, le partage. Celle où l'on se réjouit des bonheurs de l'autre, où simplement poser la main sur la cuisse de l'autre suffit à faire comprendre que "j'ai compris, je suis là". Le titre s'adresse à un véritable bébé lorsque le corps de Lydie devient un miracle... et la confession/révélation est drôle et touchante.
Evidemment c'est l'amitié qui est ici la boussole consolatrice qui aide surmonter une épreuve dévastatrice et pourtant, malgré tout, ce sont des garçons ou plus exactement leurs réactions qui m'ont bouleversée jusqu'aux larmes, preuve que la réalisatrice pousse l'intelligence jusqu'à garder confiance en l'espèce masculine. Lors d'une crise d'angoisse qui survient au volant de sa voiture, Agnès croise la route d'un gars qui va prendre le temps de comprendre et la secourir jusqu'à la faire sourire ("Tu croyais que je me doutais qu'un jour ma tête ressemblerait à une patate avec une bouche ?"... ce genre de réplique suffit à mon bonheur), lui offrir "le" sandwich de l'année.
Et puis il y a Gavin le voisin merveilleux (big up à Lucas Hedges) qui offre à Agnes ses attributs à la contemplation et à tous les commentaires (quitte à en être traumatisé pendant les trois prochains siècles) et la laisse reprendre possession de son corps et de ses sensations. Deux scènes éblouissantes qui démontrent une fois encore que la compassion et l'empathie sont les deux sentiments parmi les plus merveilleux du monde.
Un film tendre et lumineux, drôle et stimulant comme la vie parfois... entre deux accidents.
Commentaires
Quel sublime film j'ai vu... Deux belles actrices tellement éblouissantes, tellement souriantes de la vie. Un film qui fait du bien... Un sujet sérieux et grave qui est traité, pour une fois, avec beaucoup d'humour et de tendresse, et ça passe admirablement bien... Oui le grand petit film de l'été (ou de juillet), je n'hésite pas à le dire. Il m'a surpris, j'en attendais du bon avant la séance, j'en suis ressorti avec du très bon. Avec de l'émotion et avec des sourires, les deux se conjuguant à merveille... Indispensable, je te suis sans hésiter...
Elles m'ont cueillie les filles... et quand les garçons interviennent (sauf un), j'étais une flaque.
Mine et talent vont parfois de pair.
Viva Eva !
J'espère y aller la semaine prochaine.
Tu as raison, un des beau et bon film de l'été.