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"Frères humains,

laissez-moi vous raconter comment ça s'est passé"...

En cette période d'abstinence forcée et involontaire (les programmes reprendront incessamment...), laissez-moi vous parler d'autre chose. Ce sera l'exception qui confirme la règle.

Laissez-moi vous parler d'un livre ! Un livre dont chaque phrase est un coup de poing, chaque paragraphe un questionnement, chaque page une remise en question de soi ! En connaissez-vous beaucoup de tels ? C'est comme pour les films ou la musique, on n'en rencontre peu dans l'existence de cette force, de cette intensité, peu d'aussi fulgurants et foudroyants. Une prouesse littéraire (selon moi) d'autant plus qu'il s'agit du premier livre de son auteur.

 

 

Ce livre c'est "Les bienveillantes" de Jonathan Littell et il nous raconte la seconde guerre mondiale vue (comme jamais à ma connaissance) du côté des bourreaux et surtout d'un en particulier... pas un taré, pas un détraqué, juste un fonctionnaire sadique et zélé. Ce n'est pas un ouvrage historique lénifiant, c'est un roman qui parle à la première personne et dont le héros plaide coupable pour les atrocités commises mais qui associe l'Allemagne entière à ses crimes. Pourquoi l'aiguilleur de trains serait-il plus ou moins coupable que l'Haupsturmführer ? Jonathan Littell raconte, explique ce qui ne signifie pas qu'il justifie, à aucun moment. Au contraire, il donne à chacun la possibilité de se poser les bonnes questions. C'est admirable.

Mais attention, la lecture de ce livre est insoutenable parce que ce monstre de luxe sans haine ni colère, contrairement à Hitler "outre gonflée de haine et de terreurs impuissantes » est froid et donc il nous glace le sang. Il n’est pas un bras armé, il a un cerveau dont il se sert. Il extermine sans jamais parler de solution finale. Il dit « traitement spécial », « transport approprié », « mesures exécutives »… Il fait ce qu’on lui demande, calmement persuadé qu’il est un homme comme les autres.

Outre le sujet, le style et le talent hors norme de l’écrivain sont un exploit.

« Si vous êtes né dans un pays ou à une époque où non seulement personne ne vient tuer votre femme, vos enfants, mais où personne ne vient vous demander de tuer les femmes et les enfants des autres, bénissez Dieu et allez en paix. Mais gardez toujours cette pensée à l’esprit : vous avez peut-être eu plus de chance que moi, mais vous n’êtes pas meilleur ».

 

L’auteur quant à lui a 39 ans et en paraît 25, il est américain et a passé une partie de sa jeunesse en France. Son livre a été écrit directement en français. Il parle aussi l’anglais, l’allemand, le russe et le serbo-croate. Travailleur humanitaire, il a agi en Bosnie, au Rwanda et en Tchétchénie où il a passé 15 mois dont il est revenu épuisé après avoir survécu à un massacre lors d’une embuscade. Des bourreaux il en a côtoyés et son roman se nourrit donc de son expérience « du terrain ».

Le succès fulgurant de son livre paru en septembre (plus de 100 000 exemplaires vendus) le laisse parfaitement surpris : « ça me stresse. Ce que je demande, c’est qu’on me laisse tranquille ». S’il y a polémique autour de son sujet, il s’en désintéresse car c’est un homme de terrain avant tout : « Une fois que j’ai fini le livre, le trait est tiré. Les gens font ce qu’ils veulent ».

Le livre est un chef d’œuvre, l’auteur est un type bien. On ne sort pas indemne de cette lecture. Moi, je suis comblée.

 

Commentaires

  • en tant que fan de ciné, je lis régulièrement ton blog mais c'est la première fois que j'y laisse un commentaire

    Ce livre me fait pensé à "La mort est mon métier", tu connais ?

  • je vais pas faire super original et je vais acheter le dernier livre de la belge Nothomb, "journal d'une hirondelle", écrit en caractêre "Oui-Oui mange des frites" avec 3 phrases par page, mais au moins ça ne parlera pas de la guerre, mais plutôt d'amour, et c'est pas si mal en ce moment car les films et les bouquins sur la guerre, ça commence à me chauffer un peu, tu vois ?... Jonatane liteule, j'en entend parler ça et là, mais ça ne me dit rien, peut-etre plus tard, en livre de poche...
    Ayai, j'avais jamais fait aussi long.

  • Pascale : bravo... tu t'émancipes (je te rapelle que tu es attendue sur SONGE en guest star pour parler de MOITIE)

    Le bouquin :

    En ce moment, je suis dans la psychanalyse de Marilyn... passionnante.

    En fait, les Bienveillantes : on nous en parle depuis fin août. J'ai presque l'impression de l'avoir lu. C'est assez difficile de me décider. Un peu comme si je devais lire un livre sur un pedophile ou un serial killer d'enfants.
    Le thème est vraiment très hard pour moi. Mais bon... je vais surement le lire ... et je te dirais ;)

  • Je ne sais pas si je le lirais...surement, mais exactement comme disaient les autres, pas en ce moment, trop de pression pour que j'y rajoute une autre...trop besoin de me détendre pour me lancer dans une lecture aussi dure! je ne me suis pas encore relevée du dernier Houlebeq.

  • "elle lit, elle lit !… et là-bas, y'a le pastrami !" *



    * la Bible, Livre de Matthieu chapitre 27- verset 46 :
    - Et vers la neuvième heure Jésus clama en un grand cri: “Éli, Éli, lema sabachtani?” c’est-à-dire: "Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abondonné ?" en araméen, langue du Christ… bande d'incultes.

    c'était la minute culturelle.
    bouzounes a tutti frutti.

  • Une chose est certaine, ce livre ne laisse personne indifférent! Je ne me suis pas encore décidée à l'acheter. Nothomb encore moins, "Antechrista" m'a définitivement découragée d'acheter ses livres. Donc voilà, je recherche un bon livre à lire, si tu en as un (autre) à me conseiller...je t'en serai éternellement reconnaissante...jusqu'à demain!
    Toujours pas de nouvelles du Toucan...

  • Ce n'est pas le genre de livre que j'aime lire... Moi je veux rêver...entre emporté ailleurs...

  • Christel : je ne connais "La mort est mon métier". Je "consomme" (hélas) moins de livres que de films.

    JojoChou : j'ai lu "Le journal d'Hirondelle". Si tu t'attends à un livre d'amour tu vas être déçu... quoique finalement cette hirondelle est sans doute la seule personne qu'il aime.

    Doc. : je vais tâcher de me faire offrir ce "Marilyn" pour Noël ou mon anniv.

    Moon : en dehors du thème (un peu lourd j'admets) le style est admirable.

    Agla : bien qu'Athée, j'ai une culture biblique... et j'avais traduit grâce à mon déconeur.. décodeur en ligne direct avec ton pingouin !

    Sandra M. : "Antechrista" est le seul Nothomb que je n'ai pas lu.. Mais bon elle n'a plus jamais atteint le niveau de "Métaphysique" mon préféré et "Stupeur"...
    Mes grandes émotions littéraires (de véritables chocs comme celui-ci) sont "Le dernier des Justes" d'Albert Schwartz Bart (plus secouée que cela je n'ai jamais été...) et aussi "Eureka Street" de Robert McLiam Wilson (un chapitre d'anthologie en plein milieu du roman qui te laisse en stupeur et en tremblements... mais tout le reste du livre est génial aussi).

    Osmany : "Le Seigneur des Anneaux"... 1500 pages d'ailleurs certifiées conformes !

  • Je ne l'ai pas encore lu, mais ai "croisé" l'auteur en voiture dans l'émission de Frédéric Taddéï sur Europe 1, et c'est vrai que c'est un personnage hors-norme qui donne envie de mieux le connaître, mais, non, je vais le laisser en paix, et de le lire.
    Sinon, un petit livre pas très récent, mais qui m'a beaucoup émue : La Petite Fille de Monsieur Linh, de Philippe Claudel. Je l'ai lu cet été, et depuis, tout ce que j'ai lu, ne m'a pas fait oublier ce livre.

  • Ben v'la qu'elle se met à lire maintenant. On aura tout vu...

  • Je partage. Cet écrivain a du style. Vous êtes bonne... conseillère ; )

  • Plus précisement Jonathan Littell est le fils de Robert Littell écrivain américain qui a écrit de nombreux livres on va dire d'espionnage et notamment "la compagnie" qui retrace 40 ans d'histoire de la CIA

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