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THERE WILL BE BLOOD

de Paul Thomas Anderson ****

there will be blood,cinéma

Daniel Plainview cherche du pétrole en Californie. Il fait tout lui-même : il prospecte, fore, draine, commercialise… Oyez oyez donc l’histoire, l’ascension, la grandeur et la déchéance de Daniel Plainview.

Ah la la, voilà typiquement l’un des cinémas que j’aime, que je vénère, qui me fait frémir et soupirer d’aise… dans lequel j’entre de plein fouet dès la première image pour ne plus lâcher des yeux l’écran avant le dernier mot, la dernière note du générique de fin, cette fin qui arrive trop vite forcément, malgré les 2 h 38 mn d'épopée (z’êtes prévenus… et le « syndrome Jesse James… » a une nouvelle fois frappé mon entourage proche !!!). Voilà un film que je qualifierais de « western pétrolier » (même si la rubrique n’existe pas) et vous savez ou pas (peu importe) que j’ai été élevée, bercée au western, le grand ouest américain a coulé dans mon biberon avec des cow-boys, des indiens et aussi des chercheurs d’or dedans ou, comme ici, de pétrole ! Et depuis « Géant », je ne me souviens plus avoir rencontré de personnage obsédé par l’or noir ! Et c’est bon, ça fait du bien le Grand Ouest Américain.

Paul Thomas Anderson nous a prouvé et reprouvé qu’il aimait les sons, les bruits, la musique, les histoires et les acteurs. Ici il nous abreuve d’ambiances et la musique semble se précipiter sur nous pour nous submerger et faire monter la tension. Le réalisateur se renouvelle encore une fois en créant un film hors normes et nous impose d’emblée un anti-héros antipathique, misanthrope, incapable du moindre sentiment, obnubilé par sa recherche. Le premier quart d’heure est muet, on n’entend que le bruit de la pioche et la respiration haletante de Daniel Day Lewis, le dernier quart d’heure tonitrue et la promesse du titre est tenue dans un élan de folie démente… oui, la folie est démentielle ici. On la sent qui couve, qui s’accroît. On se doute qu’elle va finir par exploser. On a l’impression que le « héros » enfin parvenu à ses fins après plusieurs décennies à s’enrichir en détestant l’humanité et réciproquement, plus seul qu’un chien dans sa luxueuse demeure fait le constat que tout cela est vain. Ce n’est qu’une interprétation de ma part car rien ne laisse supposer qu’il ruminait en lui une quelconque vengeance à l’encontre d’un prédicateur aussi taré que lui qui l’avait humilié un jour… J’ai eu le sentiment que la révélation, la prise de conscience de tout ce gâchis, de toute l’inconsistance de sa vie, l’ennui et l’inutilité de son existence… il les laissait s’abattre sur l’être qui lui ressemblait le plus et qu’il humiliera à son tour.

Hypnotisant, inquiétant, cruel et drôle aussi parfois (la scène de son exorcisme est d’anthologie…) Daniel Day Lewis, démarche et silhouette lourdes, se délecte manifestement à donner vie sous nos yeux fascinés à ce personnage monstrueux sans état d'âme. On imagine ce que ce genre de rôle peut avoir de jubilatoire quand on est Daniel Day Lewis ! Le personnage ira jusqu’à utiliser un bébé puis un enfant qu’il a recueilli pour parvenir à ses fins, il l’abandonnera quand il ne pourra plus l’utiliser et lui avouera, lorsqu’il sera parvenu à l’âge adulte, par pure et simple méchanceté qu’il n’est pas son père et qu’il est pire qu’un bâtard, un orphelin.

Ce film et cet acteur sont puissants, prestigieux, essentiels aujourd’hui.

Face à l’excessif et gigantesque Daniel Day Lewis, Paul Thomas Anderson a placé le saisissant et tout jeune Paul Dano (les deux acteurs s’étaient déjà croisés sur le très beau, très troublant « The ballad of Jack and Rose »). Il ne se laisse pas impressionné par son envahissant aîné et il est tout à fait à la hauteur du rôle de ce prédicateur/exorciste, charismatique et fou aussi obsédé que l'autre par sa mission de convertir des âmes... mais prêt à avouer sans mal que la religion est une superstition dès qu'il a besoin d'argent. A noter aussi la présence du petit garçon Dillon Freasier qui joue le rôle du fils de Daniel, vraiment très très bien et dans le rôle du fils adulte le très très très sensible Russell Harvard, à suivre…

J’ajoute pour terminer que la musique époustouflante, phénoménale de Jonny Greenwood, les paysages admirables et envoûtants, la lumière flamboyante... sont des personnages à part entière.

Commentaires

  • There will be blood...
    Une réflexion qui me vient parfois pendant mes cours de seconde. Heureusement, moi, j'ai du self-control !

  • Voici un commentaire à la mesure du film..... Long!!!

  • Ed. : moi aussi souvent quand je croise un "on" ! Ben dans le film Daniel, il se self control 30 ans quand même. Donc, faut jamais dire jamais.

    hervé : mauvaise série en ce moment. On s'rattrappera au soir babache !

  • Un film saisissant du début jusque la fin - et pas long du tout ... au début j'ai aimé le personnage déjà bien "campé" de Daniel (on n'entend sa respiration, son souffle - mais j'apprècie toujours ces non-paroles chez les acteurs, ce doit être mon côté sauvage ou anti-social ! et tout au long du film seront d'ailleurs très présents sa respiration, son ronflement ...) on est déjà prévenu de la démesure de sa future réussite pour son cher pétrole (il rampe pour lui en sortant de la fosse, il rampe jusqu'à son "analyseur" (j'vous assure le genou çà fait mal) il est déjà en prosternation, on le retrouvera à genou mais ce ne sera que du "chiqué" avec le prêcheur. La musique est également une vedette à part entière, lattente et puissante comme le personnage avec ses mélanges de sirènes, de bruits métalliques de chantier, bruits de forage ... je ne trouve pas les paysages grandioses, pour moi ils sont rudes, arides et justement ils prennent une tout autre allure quand ils sont exploités par Daniel, le réalisateur fait des plans qui rendent gigantesques ces exploitations (scène quant le Derrick -çà s'écrit comme l'inspecteur ? - prend feu : la photo est bien chiadée, a de l'envergure et de l'intensité (tout comme le Daniel, tout comme la musique) mais pas le paysage : le travail du réalisateur est époustouflant. J'ai adoré le final, avec le "j'ai fini" ah bin cor heureux min Fieu, yé temps ! j'ai trouvé la fin très croustillante.

  • idem que bailleux, en tout points !!!
    la scène du milkshake, c'est un coup de maître de PT. Anderson !

  • Jojo (bailleux) : ben là... rien à ajouter. Magnifique ! Tu t'es pas laissé emballer par ton amour pour Daniel au moins ???
    Sinon, il dit "I'm finished"... j'ai fini ou je suis fini ! Quelle fin en effet biloute : "I"m finished" pis, pof plus rien !!!

    Jordane : a cause bien ma copine hein ?.. mais elle a hyper mal au genou, comme Daniel !

  • Jordane : le coup du milkshake (tu parles de l'alcool mis dans le verre de lait du Petiot ?) je ne pense pas que çà vienne du Réalisateur : à cette époque, il était habituel de mettre de l'alcool dans le biberon ou lait des Zenfants pour les calmer, les faire dormir ou encore les réchauffer ... ou tous autres excuses ou croyances.
    Pas plus tard quiya 30 ans, ma Tante donnait pour les révisions de sa fille : un porto avec un oeuf battu !!!
    Tu ne connais pas le "lait de poule" : lait chaud, oeuf, sucre et rhum avec un brun de cannelle.
    Bon je ne vais pas utiliser le blog de Pascale .......

  • effectivement film superbe, belle tranche d'Histoire aussi enfin pas vraiment "belle" mais intéressante, voir comment les bâtisseurs de derricks et d'églises sont prêts à tout par avidité... Le tout filmé avec beaucoup de brio, et porté par un D D.Lewis toujours aussi génial.

  • bailleux, je faisais surtout référence au "siphonnage" de la couche de pétrole, comparé au milshake, à la toute fin du film... ssssssrrrrrrrrr !!! :)

  • 100 % d'accord, le grand film de l'année, de ces 10 dernières années ? Je suis PTA depuis ses débuts et ses courts, il atteint ici une dimension épique qu'il avait peu exploré auparavant. Fini l'hommage à son maitre Altman qu'il a aidé sur The last show, mais un film qui lorgne vers Ford pour l'âpreté des paysages, Malick pour l'image et l'utilisation des sons et de la musique, je crois que c'est même son chef op qui a fait le film, et bien sûr Kubrick pour la scène finale qui restera dans les annales avec un Day Lewis lorgnant vers le Jack de Shining dans son Xanadu luxueux, et puis un réal américain qui se coltine un livre d'Upton Sinclair, rare socialiste US qui a écrit Oil mais surtout The Jungle, c'est plutôt rare.

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