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INCENDIES de Denis Villeneuve *****

19590230_jpg-r_760_x-f_jpg-q_x-20101115_025044.jpg19590232_jpg-r_760_x-f_jpg-q_x-20101115_025044.jpg19590234_jpg-r_760_x-f_jpg-q_x-20101115_025105.jpgLorsqu'ils se retrouvent chez le notaire qui leur révèle le testament de leur mère, Jeanne et Simon sont stupéfaits de ce qu'ils entendent. Elle leur demande d'être enterrée nue, sans cercueil, face contre terre, sans plaque ni aucune inscription car elle considère que sa vie n'a été qu'une honte. Deux lettres sont remises aux jumeaux. Une à Jeanne que sa mère charge de retrouver leur père qu'ils n'ont pas connu, une à Simon qui doit chercher un frère dont ils n'avaient jamais entendu parler. Ce n'est que lorsque ces deux lettres auront été remises à leurs destinataires que Nawal autorisera les siens à l'inhumer dignement.

Denis Villeneuve alterne les flash-back qui déroulent toutes les étapes de la vie de Nawal dans un pays du Moyen-Orient qui n'est jamais cité et les recherches menées de nos jours par sa fille Jeanne (Simon ayant refusé de céder à ce qu'il considère comme un nouveau caprice d'une mère fantasque et absente) qui "débarque" dans ce pays inconnu pour elle puisqu'elle vit depuis toujours avec son frère au Canada. Nous suivons avec le même effarement que Jeanne puis de Simon (qui finira par rejoindre sa soeur) les découvertes qu'ils font de la vie de leur mère. Et c'est avec le même effroi que nous recevrons dans les dernières minutes l'étendue de l'horreur de ce que Nawal a vécu et surmonté, tout ce que cette femme humiliée depuis sa plus folle jeunesse a subi, remettant en cause certaines évidences mathématiques... Le réalisateur ne nous laisse aucun repos, nous asphyxie littéralement en osant aller jusqu'au bout de l'indicible. Et j'avoue que c'est en larmes comme ça ne m'était pas arrivé depuis une éternité que j'ai laissé se dérouler le générique de fin, me demandant si ce que j'avais vu était plausible. Hélas, la réponse est oui. Ce que l'absurdité des guerres, le "pouvoir" que les hommes exercent sur les femmes, l'intégrisme, la religion (TOUTES les religions), le racisme, la bêtise peuvent générer comme horreurs est insondable.

Ici la tragédie familiale rejoint le drame d'une nation qui sert de "terrain de jeux" à d'autres peuples belliqueux. Tel le Liban sans aucun doute. Denis Villeneuve creuse le fond du fond de l'horreur et nous fait parcourir en apnée les événements que génèrent les guerres sur les citoyens "ordinaires". Dès les premières minutes on est happé par l'intensité des images et le regard du petit garçon dont on comprendra plus tard qu'il fera partie de ces "enfants soldats" qu'on utilise quand la chair à canon se met à manquer est de la même force que celui de cette afghane hagarde et terrifiée, souvenez-vous. On ne saura que bien plus tard ce que cette scène signifie. Car en plus de nous mettre totalement KO avec un film coup de poing, bouleversant comme rarement, le réalisateur n'en oublie pas de proposer un scenario à la fois complexe et limpide où tout finit par trouver un sens et une explication.

Que de thèmes abordés sur la souffrance, la honte, le chagrin, le pardon ! Que de force et de dignité dans la volonté de trouver et de comprendre ses racines, d'où l'on vient et comment on en vient ! Que de coeur, de sentiments et de violence ! Que de chemin parcouru par cette femme déchirée, constamment malmenée, bafouée, avilie mais debout jusqu'à l'épuisement à la recherche de son enfant perdu ! Quel film, mais quel film que cet "Incendies" porté en tension constante par des acteurs (tous) inspirés, habités ! Mais que serait-il aussi sans la puissance et l'abnégation totales d'une actrice qui disparaît et s'abandonne comme jamais à son personnage ? Lubna Azabal digne, intense, "femme qui chante" souvent silencieuse et d'une sobriété admirable rend inoubliable ce film saisissant, cette histoire et ce personnage qui nous percutent en plein coeur.

Commentaires

  • Ah tiens, celui là, ma chérie l'avait noté "à voir"... Je vais donc l'accompagner (si elle attend que je revienne de mes vacances...), m'enfin, si tu as pleuré comme une madeleine à la fin, je risque moi d'inonder toute la salle de ciné...

  • C'est le risque mais ça vaut le voyage !!!
    Ben dis donc, ta chérie, elle sait choisir les films. Quand je pense que j'ai FAILLI passer à côté parce que Lubna m'avait pas mal agacée ces derniers temps et notamment dans un film stupide...

  • Clair et net ! 5 étoiles et pas de question !!! ;-)
    Rien qu'à lire ton billet, on est bouleversé ...

  • Le film de ce début d'année...Époustouflant et incendiaire !

  • Je sors du cinéma et j'ai besoin de me remettre là ! Je m'attendais à du costaud et j'ai été servie, quel film, d'autant plus dur à regarder que l'on sait très bien que la réalité a dû dépasser ce que l'on entraperçoit. Il est formidablement bien construit, j'avoue que la révélation de la fin m'a fait l'effet d'un uppercut. Remarquable.

  • Un petit chef d'oeuvre : une histoire pleine d'émotions, de douleurs, d'horreurs mais aussi d'amour, de promesses, des personnages et surtout une femme qui chante pleine de retenue, de force et de courage. Une merveille, il faut le dire et en parler mais on en ressort tout chaviré

  • Une révélation ce film. Et une surprise de taille à l'intérieur !!!

  • Oui, toutes les étoiles sont de rigueur pour ce film. Je redoutais un peu la façon dont le cinéaste avait traité la pièce qui m'a tant bouleversée l'an dernier. Je n'avais jamais pleuré au théâtre mais ce soir-là les larmes ont coulé . Wajdi Mouawad a su , dans un texte très fort, rendre perceptible tout le malheur entrainé par la guerre et les comédiens étaient emportés par leurs personnages . Le film est lui aussi d'une force extrême et on n'en sort pas indemne.

  • Un très grand moment de cinéma effectivement. C'est dingue, j'ai lu que la pièce était réputée inadaptable et moi j'ai du mal à imaginer ce film en pièce.

  • La. Grosse. Claque.
    Pourtant les films précédents de Villeneuve ne m'avaient emballé qu'à moitié...

  • On oublie les précédents. L'essentiel est que tu reçoives des claques. Tu as la tête faite pour :-))))

  • La rencontre avec un film d’exception
    INCENDIES

    de Denis Villeneuve- Canada - 2010- d’après la pièce de Wadji Mouawad.

    L’action réveille l’absurde de la guerre du Liban. Nous la saisissons à travers la quête admirable de la fille d’une combattante héroïque, chrétienne, dont elle découvre qu’elle a été une mère suppliciée, qui s’est sacrifiée en assassinant de sang froid le chef des milices chrétiennes d’extrême droite, qui a perpétré le massacre de femmes et d’enfants musulmans.
    Un film exceptionnel, d’intelligence et d’équilibre, dans l’écriture complexe comme dans le jeu simple, la restitution historique précise et la finesse solide de l'art cinématographique . Le premier film, je crois, où je vois un notaire, héroïque à sa façon, lui aussi.
    Génial parcours oedipien, l'orient qui est en nous et le tragique est vaincu par les femmes et l'amour véritable.

  • La rencontre avec un film d’exception
    INCENDIES

    de Denis Villeneuve- Canada - 2010- d’après la pièce de Wadji Mouawad.

    L’action réveille l’absurde de la guerre du Liban. Nous la saisissons à travers la quête admirable de la fille d’une combattante héroïque, chrétienne, dont elle découvre qu’elle a été une mère suppliciée, qui s’est sacrifiée en assassinant de sang froid le chef des milices chrétiennes d’extrême droite, qui a perpétré le massacre de femmes et d’enfants musulmans.
    Un film exceptionnel, d’intelligence et d’équilibre, dans l’écriture complexe comme dans le jeu simple, la restitution historique précise et la finesse solide de l'art cinématographique . Le premier film, je crois, où je vois un notaire, héroïque à sa façon, lui aussi.
    Génial parcours oedipien, l'orient qui est en nous et le tragique est vaincu par les femmes et l'amour véritable.

  • J'ai été assez sensible à cette tragédie familiale mais pour moi le film est totalement gâché par les incohérences au niveau des dates. Le premier fils serait né en 1970 et les jumeaux en 1972 ?! A moins que ce soit 1992... Il aurait alors mieux fallu prendre des acteurs ayant l'âge du rôle. A essayer de déméler tout ça, j'en ai perdu le fil. Dommage.

  • Je ne crois pas que les jumeaux soient nés en 72... car le père/frère aurait deux ans !!! Je n'ai pas ressenti cet embrouillamini !

  • je suis un peu obsessionnelle, alors je me suis refait le film ;) Il est bien indiqué que le premier fils est né en 1970. 1972 est en fait l'année de l'arrestation de la mère et elle est restée emprisonnée 15 ans. On peut imaginer qu'elle ait eu les jumeaux à la fin de sa captivité, soit 1987. Ce qui amène l'âge du premier fils à 16-17 ans cette année là. Même si c'est plus plausible que ce que je croyais au début, ça reste difficile à croire vu le choix de l'acteur !

  • Soit. Je comprends. Mais dans ce cas tu dois avoir du mal avec beaucoup de films ! Les acteurs ont rarement l'âge de leurs rôles.

  • @ Patsy-Stone
    Je suis soulagé de constater que je ne suis pas le seul à avoir été gêné par les dates et le problème de cohérence qui en découle...interrogé par Jeanne, l'ancien gardien de prison prononce effectivement cette phrase-piège :"Je m'en souviens très bien...Abou Tarek...72...Nawal engrossée..."
    Du coup je me suis moi aussi fixé sur l'idée que le frère recherché avait deux ans de plus puisqu'on sait qu'il est né en 1970. Et à partir de là, difficile de ne pas regarder la suite du film en fronçant les sourcils tant de choses semblent illogiques : les jumeaux auraient donc 37 ans (le fim se passe en 2009)? Et pourquoi Jeanne ne tique-t-elle pas en entendant cette date (72)qui serait-donc celle de sa propre naissance : elle devrait comprendre à ce moment là que ce n'est pas le frère inconnu qui est né en prison mais bien les jumeaux...ce qu'elle découvre plus tard...Avec toutes ces interrogations, la révélation finale semble fatalement très difficile à accepter.
    Et puis à force de repenser au film je me suis souvenu de l'avant-dernière scène où l'une des lettres est lue à voix haute. On entend ce terrible "je suis ta pute 72..." et tout s'éclaire : 72 est le numéro de cellule ou peut-être le matricule de la prisonnière! Nous avons donc été dupés par les scénaristes mais je leur dis "Chapeau!" car grâce à ce subterfuge la conclusion tragique du film n'en est que plus inattendue!

  • Je viens de le voir, et suis encore sous le choc.
    Du coup, je me suis précipitée ici car je me doutais que tu avais du écrire quelque chose sur le sujet.
    Ca me rassure de savoir que je ne suis pas la seule à avoir fini le film en larmes (ce qui ne m'étais pas arrivé depuis "Les Petits Mouchoirs").
    Bouleversant...

  • Ah je suis contente !
    Et je suis encore plus contente que tu viennes donner ton avis ici !
    Un grand film ! L'un des meilleurs de 2011.

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