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LES FRÈRES SISTERS

de Jacques Audiard ****

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Avec John C. Reylly, Joaquin Phoenix, Jake Gyllenhall, Riz Ahmed, Rebecca Root

Oregon, 1850. Un chercheur d'or est pourchassé par un duo d'assassins, les frères Sisters.

Audiard nous conte deux histoires parallèles, en alternance d'abord. Il nous trimballe à cheval de l'Oregon en Californie (en vraie c'est l'Espagne, le Canada et la Roumanie mais on s'en fiche). Elles finiront par n'en faire qu'une. Deux couples, deux duos de garçons, les deux frères d'un côté, les fameux Sisters du titre (apprécions le patronyme à sa juste valeur), un chercheur d'or et un détective de l'autre. Les duos se transforment en un quatuor animé par la même quête : trouver de l'or. Mais voilà déjà que je m'emballe et brûle les étapes car j'ai tant aimé ce film que tout s'embrouille. Tant de thèmes sont abordés. Comment et pourquoi les évoquer tous ? Il ne manque que les indiens. Pas l'ombre d'une flèche ou d'une plume ici. Les acteurs (mention spéciale à John C. Reilly, exceptionnel) sont extraordinaires, les paysages somptueux et la musique magnifique. Alexandre Desplat est un génie et le générique de fin m'a donné dix mille frissons !

Il y aurait bien des raisons de chipoter j'imagine. Je ne le ferai pas. Car c'est sans doute dans toutes ses failles et fêlures que le film m'a touchée le plus, en plein cœur. Je laisse soin à d'autres de s'en charger. Audiard et ses 4 lascars m'ont embarquée. S'il me fallait résumer mes sensations en un seul mot j'aurais du mal, en deux je dirais : violence et douceur ! C'est dire si mon curseur émotionnel a une fois de plus fait le yoyo ! Mais sans le barouf inhérent parfois au genre. C'est l'humanité des personnages qui m'a une fois encore bouleversée. MON Hostiles n'est ni dépassé, ni même atteint mais les personnages auraient pu faire un bout de chemin ensemble tant les uns et les autres sont à un tournant de leur existence où ils se posent davantage de questions qu'ils n'obtiennent de réponses. Et c'est beau de regarder les hommes tomber, hésiter, se tromper. Comme disait Léo pas DiCaprio, l'autre que j'ai déjà cité à d'autres occasions : "Les gens, il conviendrait de ne les connaître que disponibles, à certaines heures pâles de la nuit, avec des problèmes d'hommes, simplement, des problèmes de mélancolie". Les femmes ne sont en effet guère présentes ici mais pas totalement absentes. Et elles sont responsables de scènes importantes, étrange avec l'actrice transgenre Rebecca Root, tenancière d'un rade où s'échouent les hommes et qui a donné son nom à la ville, tendre avec la mère que les hommes retrouvent épuisés par leur course éperdue, émouvante avec une prostituée que la douceur inattendue d'Eli et inhabituelle dans sa profession bouleversera.

Simpliste ce parcours initiatique ? Oui peut-être mais je le répète, je préfère en rester sur cette impression de douceur, car comme Scott Cooper, Jacques Audiard livre un western apaisé bien que traversé par des accès de violence insensée. 

A la solde du Commodore (je m'en veux, je m'en veux, je m'en veux, je n'ai pas reconnu l'acteur que j'aime à la folie…), les frères Sisters sont deux tueurs. Sans état d'âme, ou presque. L'aîné, un nounours qui pourrait être un grand pacifiste s'il n'avait décidé de s'imposer pour mission de protéger son frère, rêve de se ranger.  C'est fou ce qu'on se met comme pression parfois dans la vie ! "This world is an abomination" répètera deux fois Eli. Son cadet Charlie (Joaquin Phoenix en grande forme), plus impulsif, plus alcoolique, plus con, n'a pas état d'âme et ne connaît qu'une façon de gagner sa vie. Résoudre les problèmes du Commodore en éliminant tous ceux qui le gênent. Peu importe les dommages collatéraux.

Les dialogues, les conversations entre les deux frères sont des moments à la fois comiques et profonds. L'aîné tente de faire prononcer à son frère le mot juste chaque fois qu'il s'exprime. Ce qui n'est pas toujours évident lorsqu'on vomit tripes et boyaux chaque jour après des nuits de beuverie sans fin. Le sang vicié du père coule dans leurs veines. "On est jamais allés aussi loin" dit le cadet. "Aussi loin ? Sur la route ou dans notre conversation ?" répond l'aîné.

Et, alors qu'on s'y attend le moins le scenario se densifie lorsque se forme le quatuor. Eli et Charlie rejoints par Morris, le détective élégant et Hermann le chercheur d'or chétif mais astucieux et utopiste vont s'unir d'abord par intérêt. Les deux derniers rêvent d'une société juste où l'homme serait libre et ne manquerait de rien. Ils entendent aller fonder ce phalanstère chimérique au Texas. Les relations fraternelles qui vont finalement unir les quatre hommes surprennent dans cet environnement viril, violent et vénal. La douceur surgit aux moments où on l'attend le moins et les sanglots feints par Charlie qui se moque de son frère prêt à venir le consoler se transforment en véritables larmes...

Pas de grandes étendues desséchées écrasées de soleil mais plutôt des plaines verdoyantes, des forêts, de la pluie, la découverte de la brosse à dents et du dentifrice (je n'avais jamais pensé que les cow-boys devaient puer et notamment gravement refouler du goulot), et des WC, un cheval en feu (scène terrible), une mygale exploratrice (scène effrayante), une miraculeuse et perfide potion qui révèle l'or invisible au fond de l'eau, quatre acteurs magiques et j'en passe... et une chevauchée de la dernière chance, du dernier espoir, de cow-boys usés, au bout du rouleau. 

Beau.

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Commentaires

  • Pas eu le temps et, j’enrage, pas le temps ce week-end. Ce qui nous reporte au week-end suivant... tout ça pour dire que je ne lirai ton article qu’après avoir vu le film pour te signifier mes désaccords ou ma totale adhésion.
    Mais bon, tu sais que moi, dès qu’il y a des chevaux et des chapeaux,je suis preneur.

  • Oui je sais mais tu vas chipoter. Ça me désole d'avance. Mais tu ne pourras reprocher à Rosamund de faire de la figuration.

  • Bonsoir Pascale, comment? Tu n'as pas reconnu Rutger? Il faut dire qu'on le voit peu et qu'on ne l'entend pas parler. J'ai aimé le film mais le sujet n'a pas "parlé". Bonne soirée.

  • Bonsoir dasola. Non pas reconnu... faut dire que dans l'état où il est...
    Ah moi il m'a parlé ce film !

  • Nous ne l'avons pas reconnu non plus ! Nous l'avons vu hier soir et nous réfléchissons encore avant d'en faire un post qui sera certainement un peu moins enthousiaste que le vôtre !

  • Ce film m'habite encore deux jours après.

  • Et bien quel enthousiasme ! J'ai été un peu déçue par les derniers Audiard je dois dire. J'ai quand même glissé celui-ci dans ma liste; peut être pour le weekend prochain :)

  • Ah ben c'est sûr que Dheepan c'était du caca.
    Rien à voir ici.

  • Je n'ai pas encore vu le film, mais j'ai lu le roman (c'est pour ça que j'aimerais tant aller voir le film).


    Assis devant la cuvette, je sortis ma brosse à dents et ma poudre et Charlie, qui n’avait pas vu mon attirail jusqu’alors, me demanda ce que je fabriquais. Je lui expliquai, et lui fit une démonstration, après quoi j’inspirai profondément : « C’est très rafraîchissant pour la bouche », lui dis-je.
    Charlie réfléchit. « Je n’aime pas ça, rétorqua-t-il. Je trouve ça idiot.
    - Pense ce que tu veux. Notre docteur Watts m’a dit que mes dents ne se gâteront jamais si j’utilise cette brosse comme il faut. »
    Charlie demeura sceptique. Il me dit que j’avais l’air d’une bête enragée avec ma bouche pleine de mousse. Je répliquai que je préférais avoir l’air d’une bête enragée quelques minutes par jour plutôt que d’avoir une haleine fétide toute ma vie, ce qui marqua la fin de notre conversation sur la brosse à dents."
    Patrick deWitt, les Frères Sisters.

  • Ce court extrait donne une idée du ton du livre. Audiar n'a pas su ou voulu le rendre totalement dans son film je trouve. Mais les frères Sisters sont une Jolie surprise pour moi.

  • C'est toujours difficile d'être totekement fidèle à un livre mais cet extrait donne envie de lire.

  • Magnifique. Il n'y a pas cet échange mais il se serait parfaitement intégré à l'ambiance.
    Du coup dans le film c'est assez subtil de voir cette grande bestiole d'Eli se brosser consciencieusement les dents chaque jour, tout comme le très dandy Morris.
    Il est vrai qu'Eli renonce souvent aux conversations avec son abruti de frère :-)

  • Comme d'autres, j'évite de lire dans le détail ton article pour éviter les spoilers (je ne sais rien ou presque sur le film), mais ton enthousiasme est de bonne augure. J'espère le voir ce week-end.

  • J'essaie de ne jamais rien spoiler d'essentiel.
    J'espère que tu le verras. j'ai hâte de te lire.

  • Ta prose enflammée par les granges brûlées et les chevaux de feu aurait presque raison de mes réserves (naturelles ?).
    Comme tu l'avais annoncé, j'ai chipoté.
    Désolé.

  • J'ai aimé à la folie. Comme toi l'humanité des personnages m 'a emue. Fait rire presque pleuré aussi. C'est beau. Et ce thème de fin... miam.
    J adore Audiard et là il m a vraiment pas déçue.
    (Je te donne mon planning rapidement. Je suis très "prise" en ce moment

  • Oui cette humanité, cette douceur, cette fraternité ça me troue le ....
    Ravie que tu te fasses prendre...

  • J'ai attendu de pouvoir attraper une séance en V.O. sous-titrée... et je ne le regrette pas ! C'est superbe sur la forme et plein de sens sur le fond. Les acteurs sont très bons (Ma préférence va à John C. Reilly, mais Riz Ahmed est étonnant en chimiste philanthrope peut-être un peu roublard)... et, moi non plus, je n'avais pas reconnu celui qui se cache derrière le masque du Commodore !

  • Heureusement que tu as eu une séance en VO.
    JOhn C Reilly est exceptionnel et Riz (merci à ses parents...) est étonnant. Les 2 autres sont TRÈS bons mais moins surprenant.
    Contente d'avoir un allié sui ne chipote pas :-)

  • Je sens comme une pointe d'intérêt néanmoins et ça, ça a failli me faire tomber de l'armoire. Mais pour citer un grand auteur : "Il y aurait bien des raisons de chipoter j'imagine. Je ne le ferai pas."

  • Sur une grande échelle pompiers de 10, la dite pointe d'intérêt n'excèderait pas 4. ;-)

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