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LETO

de Kirill Serebrenikof ****

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Avec Roman Bilyk, Irina Strashenbaum, Teo Yoo

Synopsis : Leningrad. Un été du début des années 80. En amont de la Perestroïka, les disques de Lou Reed et de David Bowie s'échangent en contrebande, et une scène rock émerge. Mike et sa femme la belle Natacha rencontrent le jeune Viktor Tsoï. Entourés d’une nouvelle génération de musiciens, ils vont changer le cours du rock’n’roll en Union Soviétique.

Première scène, intrigante. Trois jeunes filles dans une arrière-cour sinistre pénètrent par effraction par la fenêtre d'un bâtiment grâce à une échelle bringuebalante... Mais où vont-elles ?

Deuxième scène, électrisante et surprenante. Un groupe de rock déchaîné se produit sur scène alors que dans la salle, les jeunes gens sagement assis assistent au spectacle. Sous haute surveillante, ils n'ont le droit ni de bouger, ni même de taper du pied. Au moindre écart, ils sont exclus. Sur scène les artistes laissent déferler leur énergie et leurs insultes. Eux, ont le droit. Contradiction évidente du pouvoir soviétique en place. Interdire et autoriser tout et son contraire.

Troisième scène, très longue, magnifique, enthousiasmante. Le groupe de rock est réuni sur une plage entouré de musiciens, de fans, de groupies, de quelques parasites sans doute aussi. La vraie vie d'un groupe de rock ordinaire sans doute. Et l'on assiste à la rencontre entre Mike déjà célèbre et Viktor, plein de compositions dans sa musette et sa housse de guitare. Il est beau, mystérieux et rêve de chanter ses chansons sur scène.

Mike et Vikor seront et resteront amis ou ennemis intimes. L'aîné aidera toujours le cadet mais tous les deux seront également amoureux de la même femme (Natacha, une splendeur) qui ne supporte pas de faire souffrir le premier avec qui elle a un enfant et ne peut résister à l'autre, tellement romantique.

Ce film vibre d'une énergie folle où une jeunesse créative bercée par les stars mondiales du rock dont les pochettes de disques (interdits) tapissent les murs des appartements, rêvent d'être reconnue. Comment se faire entendre ? Comment faire pour exister quand on vit en Union Soviétique ? Comment sortir des frontières ? Comment réinventer la musique quand on passe derrière les Stones, les Beatles, Dylan et Bowie ?

Serebrenikof nous conte une partie de l'histoire vraie de Mike Naoumenko pionnier du rock léningradois et fondateur du Groupe Zoopark et Viktor Tsoï (adulé en Russie) artisan d'un rock plus crépusculaire. Mais le réalisateur se garde bien de nous livrer un Biopic ordinaire. Je n'ai d'ailleurs compris que ces personnes avaient vraiment existé qu'à la toute fin du film. Je ne les connaissais pas. Le réalisateur alterne les séquences sur scène, celles de création pure absolument passionnantes avec celles de la vie communautaire qui va avec la rock attitude (c'est là que j'ai ressenti l'unique faiblesse du film, les nombreuses scènes d'appartement, plutôt claustrophobiques m'ont semblé trop nombreuses, redondantes et ont cassé le rythme).

Mais l'hymne à la liberté et à la création artistique est absolument captivant. La gaité et l'optimisme de cette jeunesse brimée fait du bien et fait de la peine aussi. Être né de ce côté de la Volga n'est vraiment pas un gage de liberté et pourtant c'est la joie de vivre qui domine et envahit tout le film. Je laisse parler Serebrenikov : "Leto, est une histoire de rock’n’roll [...] dans un climat totalement hostile à la musique rock et aux influences occidentales [...]. Notre histoire traite de la foi nécessaire pour surmonter ce contexte, et de l’insouciance de nos héros face aux restrictions dont ils ont hérité. Par-dessus tout, cette histoire est celle d’un amour ingénu et inaltéré, comme une ode à ceux qui vont devenir des icônes du rock, à la façon dont ils vivaient et à l’air qu’ils respiraient". Merci à lui d'avoir choisi de ne pas nous raconter la fin tragique de ces deux héros, morts bien jeunes l'un et l'autre.

Mais plus encore, le réalisateur fait preuve d'une originalité folle en incluant au cours de son récit des scènes qu'il est difficile d'évoquer avec d'autres mots que : magiques, miraculeuses, sublimes. Une scène de train violente, une scène de tramway déjantée, une autre de concert totalement folle... Le film se fait alors comédie musicale, la justesse des notes n'est pas de mise... les personnages se mettent à reprendre des standards de la pop anglaise ou américaine Psycho  Killer de Talking Heads, The Passenger d'Iggy Pop, It’s a perfect day de Lou Reed et c'est MAG(N)I(FI)QUE ! Jusqu'à ce qu'apparaisse un trublion avec une pancarte :

"ceci n'a pas existé".

Inconcevable en Russie.

Mais cela aurait pu... cela aurait dû.

Pour d'obscures raisons, le réalisateur est assigné à résidence. Pendant ce temps son film lumineux parcourt les écrans du monde et les festivals. L'équipe du film a gravi les marches à Cannes en brandissant une affiche portant son nom.

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A suivre : Une affaire de famille de Hirokazy Kore-Eda ****(*)

Commentaires

  • "Ceci n'a pas existé" : j'ai beaucoup aimé cette idée et le film en général. C'est très bien filmé, en particulier les scènes de concert et de "boeuf", et puis le réalisation n'oublie jamais de nous parler, derrière la scène, du destin de son trio de personnages.

  • Oui tout cela est bien subtil :-) Un film différent, ça fait du bien.

  • Pardon, je voulais écrire : "le réalisateur".

  • Je te pardonne mais ne recommence jamais.
    En fait j'avais traduit et mis mon correcteur automatique en action.

    Par contre je ne sais si je te pardonnerai ta détestation de Sorrentino. Je me réunis avec moi même à ce sujet.

  • Tu en parles très bien. C'est vrai que certaines scènes d'appartement sont trop longues, je confirme. Mais heureusement, la magie opère le plus souvent. Moi aussi j'ai compris qu'ils avaient existé seulement à la toute fn, quand leur date de déces s'affiche au dessus de leurs têtes ... ça m'a fait un choc !

  • A cause de ces scènes répétitives j'avais d'abord mis ***(*)... mais non, ce film est trop hors normes et les personnages trop attachants.
    Et oui quel choc... j'aurais préféré qu'ils n'aient pas existé plutôt que morts si jeunes.
    Ça n'a aucun sens ce que je dis.

  • Je suis moins enthousiaste. J'ai apprécié la fraîcheur de certaines scènes. Je reconnais le talent du metteur en scène. Mais c'est long, c'est long, Dieu que c'est long ! Trop de scènes sont inutilement étirées. Et la partie sentimentale ne m'a pas vraiment convaincu. Quitte à choisir un film musical, autant (re)voir "Bohemian Rhapsody".

  • Je suis d'accord c'est long, trop long. Moi ce sont les scènes d'appartement qui mont ennuyée mais c'est tellement original et instructif... Les personnages sont attachants même si, je suis encore d'accord, la partie sentimentale n'est pas renversante.

    Bohemian Rhapsody m'avait donné la patate.

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