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NOUS NOUS SOMMES TANT AIMÉS (DVD)

d'Ettore Scola ****

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Avec Vittorio Gassman, Nino Manfredi, Stefania Sandrelli, Stefano Satta Flores

Pendant la seconde guerre mondiale Gianni, Nicola et Antonio sont amis et font partie de la résistance. Après la guerre, armés de leurs rêves mais aussi de leurs illusions, ils sont prêts à se battre pour vivre la meilleure vie possible pleine de combats idéologiques et d'utopie.

Prêts pourquoi pas à révolutionner le monde... mais comme le dira plus tard l'un des personnages : "Nous voulions changer le monde, mais le monde nous a changés !".

nous nous sommes tant aimes. ettore scola,vittorio gassman,nino manfredi

Le film couvre 30 ans de cette amitié chaotique mais aussi 30 ans de la vie en Italie, et c'est passionnant. Il date de 1974, époque bénie où le cinéma italien était l'un des meilleurs et plus prolifiques qui soit et nous offrait son lot de chefs-d'oeuvre chaque année. Celui-ci en est un et c'est cette fois C8, dès que le fléau cathodique a consenti à la boucler, qui nous a offert la possibilité de le revoir. Heureusement, j'ai la touche miracle jaune sur ma télécommande (merci Mister Loup) qui permet la VO car Michel Roux est sympa mais le doublage français... au s'cours !

Faite de séparations et de retrouvailles, l'amitié s'effritera peu à peu malgré les efforts des 3 amis pour tenter de retrouver la folie, l'ambition et la douceur de leur jeunesse. Gianni a pu faire des études et devient avocat, Antonio aspire à être médecin mais son tempérament impulsif fera qu'il en restera au grade de brancardier et Nicola se rêve critique de cinéma mais il se marie devient prof puis abandonne sa famille.

Antonio le premier rencontre Luciana qui rêve de devenir actrice. Il l'aime mais il a le tort de la présenter à Gianni dont elle tombe amoureuse. Gianni l'abandonne à son tour pour faire un mariage de raison. Au cours des trois décennies, Luciana qui elle aussi va de dérive en désillusion, aura une liaison avec chacun des trois amis.

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Que deviennent l'amour et l'amitié confrontés au temps qui passe ? Ettore Scola (dont j'ai aussi tant aimé Affreux, sales et méchants, Une journée particulière, Les nouveaux monstres, la terrasse, Passion d'amour, La nuit de Varennes et Le bal)  passe du rire aux larmes, de la mélancolie à la tendresse. Il aime ses personnages mais n'élude pas leurs travers, leurs incohérences et leurs faiblesses. Ils sont humains, ils ont été jeunes et leurs rêves se brisent sur la brutalité du monde et de ses réalités. Mais aussi sur la fragilité de l'engagement et la tentation de la réussite. Gianni en est l'exemple flagrant qui préfère l'appât du gain et le prestige quitte à perdre son âme en s'associant avec un magouilleur plein aux as.

Scola confirme ici son affirmation : «Le concept selon lequel chacun de nous, dans son intimité, dans ses sentiments, dans ses amours, subit les conséquences des grandes décisions historiques, et du contexte dans lequel il vit, est commun à presque tous mes films.» C'est cette espèce de fatalité qui semble déterminer le destin de chacun. Lorsque les personnages font le bilan des trente années qui se sont écoulées, on sent peser sur eux la fatalité et les regrets. Sur leurs visages fatigués se lit surtout la résignation. Une génération désenchantée qui a survécu à la guerre mais n'a pu réaliser ses rêves... La comédie laisse place peu à peu à la mélancolie.

Mais le film n'est pas que la photographie sociale d'un pays qui passe en quelques années de la monarchie à la république, de la dictature à la démocratie, de la désillusion au seuil de la vieillesse de voir ses rêves de jeunesse à tout jamais perdus, c'est aussi un hymne au cinéma. Le film est parcouru de références cinéphiles notamment grâce au personnage de Nicola, cinéphile passionné dont l'amour pour le film Le voleur de bicyclette lui vaudra deux déconvenues radicales au cours de sa vie (la perte de son emploi puis de beaucoup d'argent). Le film est d'ailleurs dédié à Vittorio de Sica qui fait une apparition ici et meurt quelques jours après la fin du tournage. Plus tard, il mimera pour Luciana la scène mythique de l'escalier et du landau du Cuirassé Potemkine dans les escaliers de la Trinité des Monts à Rome.

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Un moment magique est l'arrivée d'Antonio sur le tournage de La dolce vita de Fellini où il retrouve Luciana devenue figurante. La reconstitution de la scène, 14 ans plus tard,  est bluffante. On y croise le maestro lui-même, agacé et amusé qu'un critique le prenne pour Rosselini et Marcello Mastroianni qui refuse d'ôter ses lunettes pour une fan.

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Un cinéma projette L'Eclipse d'Antonioni et la femme de Gianni s'identifie à Monica Vitti.  Au cours d'une autre séance on découvre L'ange pervers de Ken Hugues et cette fois ce sont Luciana et Antonio qui s'imaginent à la place des protagonistes.

Car le cinéma, la salle de cinéma, les films sont l'endroit où l'on peut se projeter, s'identifier, faire siennes les répliques et la vie des personnages, s'imaginer à leur place.

Embrasser Kim Novak ou Vittorio Gassman.

Comme je comprends !

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Commentaires

  • Un film super, et un bel hommage au cinéma oui.
    J'aime les portraits, la fin un peu douce-amère, et j'ai beaucoup ri parfois. La femme de Gianni je l'ai trouvée formidable aussi. La scène où toutes les voitures sortent en même temps du grand garage m'a fait bien rire.

  • :-)
    Belle évolution de la femme de Gianni. On aurait pas misé cher sur elle.
    Et oui la fin est mélancolique.
    Beau plongeon.
    Et les voitures qui sortent c'est rigolo.

  • Un film d'une grande richesse, une leçon d'histoire et de sociologie tout en simplicité. Un film complet et inépuisable qui peut toucher plusieurs publics, chacun y trouve son compte et son plaisir.

  • C'est tout à fait ça. Un voyage en Italie sur 30 années.

  • Ah le cinéma italien...
    Comment peut-on même imaginer de doubler un film en langue italienne, une si douce musique ? En n'importe quelle langue du reste, sinon comment aurais-je appris l'anglais ?
    En parlant de production italienne, plus récente, nous avons bien aimé la mini-série "Nos meilleures années".
    Belle soirée

  • Bonjour, Nos meilleures années, tu parles du film de Marco Tullio Giordana. Je l'avais vu à sa sortie. Il fallait se rendre deux jours de suite au cinéma pour le voir intégralement. Admirable saga.

  • oui. J'ai confondu mini-série avec film en trois ou quatre parties. L'avons vu en DVD, sur plusieurs soirées. Je vais programmer une nouvelle vision.
    Belle soirée.

  • Pas grave, je voulais juste être sure qu'on parlait du même film.
    ça m'a donné envie de le revoir d'autant que j'entends souvent la superbe musique sur Radio Classique.
    Bonne journée.

  • Grosse envie de le voir, mais j'ai zappé C8 (l'idée d'être coupé en plein élan par la pub...).
    En revanche, je suis de plus en plus intéressé par le cinéma classique italien. Son tour viendra.

    Je te le dis en confidence: deux De Sica arrivent d'ici quelques semaines sur les Bobines.
    Comencini et Fellini sont par ailleurs revenus dans mon viseur. On s'en reparle vite !

  • Ah dommage, c'est un film merveilleux.
    Le hasard fait que j'ai vu un autre italien hier.
    De De Sica je n'ai du voir que Le voleur de bicyclette et Le jardin des Finzi Contini mais il y a très très très longtemps..
    Je lirai bien sûr.

  • Oui, ils étaient irrésistibles.

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