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GODZILLA MINUS ONE

de Takashi Yamazaki ***

GODZILLA MINUS ONE, Takashi Yamazaki, cinéma, Ryûnosuke Kamiki, Minami Hamabe, Yûki Yamada

Avec Ryûnosuke Kamiki, Minami Hamabe, Yûki Yamada

En 1945, Little boy et Fat man n'ont pas encore été larguées sur Nagasaki et Hiroshima que le Japon s'effondre en cendres et en ruines.

La seconde Guerre mondiale touche à sa fin et Koichi Shikishima pose son avion kamikaze sur l'île d'Odo en prétextant un problème technique. Les mécaniciens basées sur l'île ne détectent aucune panne et comprennent que Koichi a failli à son devoir de soldat en n'accomplissant pas sa mission suicide. Les missions kamikaze envoyaient à une mort certaine des soldats pas particulièrement nationalistes ou fanatiques, mais de jeunes gens d'une vingtaine d'années, terrifiés. L'un d'eux aurait dit : "Je ne fais pas cette mission pour l'Empereur ou l'Empire… Je la fais, car j'en ai reçu l'ordre !" On comprend, on excuse, on pardonne donc Koichi mais le japonais a un sens du devoir, de l'honneur, de la Patrie qui (nous) échappe.

Pendant que le pauvre garçon tente de ravaler sa honte, surgit des flots le monstre Godzilla qui détruit la base tuant la plupart des occupants et une fois de plus Koichi, paralysé par la peur est incapable de rien faire pour venir en aide à ses compagnons. Il est le seul survivant avec le chef mécanicien. De retour chez lui à Tokyo le garçon ne peut que constater l'ampleur des dégâts, la ville est un champ de ruines et notamment son quartier où ses parents n'ont pas survécu aux bombardements. Dans les décombres de ce qu'il reste de sa maison, accablé par la culpabilité d'être en vie il recueille une jeune femme Noriko et un bébé abandonné qui ont toutes deux perdu leurs parents. Cette improbable famille recomposée va alors affronter le fléau suivant qui frappe le Japon : Godzilla.

Je remercie sa majesté de m'avoir influencée et incitée à aller voir ce film spectaculaire, réjouissant et surprenant. Je ne suis pas sûre d'avoir jamais vu une des trente huit aventures cinématographiques du gros lézard dinosaure (on sait pas trop) mais ce film-ci, au destin étrange* est absolument formidable. J'adore la formule de Sylvestre du magazine Première : "Le blockbuster américain est dans un coma dépassé." Il n'a pas tort et ce Minus one est un mélange de blockbuster et de film intimiste qui replace la famille et l'humain au centre des débats.

Alors bien sûr, la bestiole est absolument immonde. D'une laideur repoussante avec sa petite tête, son gros ventre et ses horribles petits yeux ronds remplis d'une haine inextinguible. Il me semble qu'il ne cesse de grossir au fur et à mesure de l'histoire et parfois lui sort du dos une sorte de crête radioactive fluorescente. On ne sait ce qui anime sa détestation du japonais mais dès qu'il surgit, il écrase et croque tout ce qui remue sur son passage dans une débauche de cruauté. Le réalisateur a la bonne idée de ne le faire apparaître que parcimonieusement et c'est tant mieux car il m'a semblé moins effrayant que véritablement répugnant. Notons que les effets spéciaux sont remarquables et que la bête semble plus vraie que vraie.

Ce qui fait la particularité et la grande qualité du film (j'insiste) est que face à la férocité implacable du monstre le réalisateur ne place pas un ou des super héros qui en viendraient à bout à force de courage ou de force surhumaine, mais des humains faibles, touchants, émouvants, préoccupés par leur survie dans un pays humilié. Un peu comme si Michael Bay s'était associé à Kore-Eda pour écrire le scenario. Cela ne donne en rien un film bancal mais au contraire plutôt cohérent et absolument captivant car on s'attache beaucoup aux personnages principaux. Je note également une scène terrible où la folie nucléaire évoque le douloureux Pluie noire de Sohei Immamura. Les références sont fortes mais elles me paraissent évidentes.

Les multiples rebondissements parfois dramatiques, les astuces pour combattre le monstre, les traumatismes liés à la guerre, la beauté de la réalisation, la qualité du combat final atomique, l'épilogue sentimental résolument optimiste et généreux confèrent à ce blockbuster nippon un miraculeux mélange d'action et de drame intime. Plusieurs jours après l'avoir vu, j'ai quasiment oublié la présence du reptile géant sur deux pattes pour ne garder que la tragédie d'un peuple et de quelques personnages attachants.

* Vous voulez être surpris ? Précipitez-vous : sorti une première fois en France le 7 décembre 2023, pour quarante-huit heures seulement, dans quelques grandes villes le film est ressorti le 17 janvier 2024 dans environ 300 salles et pour une durée de quinze jours... Incompréhensible quand on sait que les blockbusters américains et déclinaisons de franchises à n'en plus finir et de plus en plus médiocres squattent les écrans pendant des mois.

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Commentaires

  • Plus que quelques jours pour se laisser irradier par ce Godzilla thermonucléaire ! Comme tu dis, c'est incompréhensible. J'ai réussi à convaincre deux de mes neveux d'y aller avant mardi. Quand je l'ai vu, la salle était quasi pleine.
    Merci pour la pub chère Pascale, et content de te savoir désormais des affinités avec le roi Lézard du Japon (dont le nom est en réalité un mot-valise croisant un gorille et une baleine, les Japonais sont décidément très surprenants). Je suis loin d'être un spécialiste de la Bête et de ses multiples déclinaisons, mais je confirme la supériorité de cette espèce endémique sur son clone frelaté produit par la Warner. On laissera d'ailleurs Michael Bay tranquillement moisir sur son Rock, et préférera les destructions massives du Godzilla inventé par maître Honda comme seules inspirations qui vaillent.

  • Merci encore. Qu'est-ce que je suis contente d'y être allée. Dommage que mon Koji n'ait pas joué le rôle du général en chef qui verse sa larmichette devant la bravoure de ses... braves, allez, n'ayons pas peur !
    Tu seras toujours plus spécialiste que moi qui le vois pour la première fois je pense.
    Et oui, le japonais est surprenant.

  • Bonsoir Pascale, quel enthousiasme, cela fait plaisir. Je viens de le revoir pour la deuxième fois avec mon ami Ta d loi du cinema que j'ai convaincu de m'accompagner. Il a aimé et comme toi, il a trouvé que la bêbête était affreuse. Bonne fin de week-end.

  • Bravo Dasola !
    J'attends maintenant qu'il vienne survoler mon article pour compléter son premier commentaire.
    Belle fin de dimanche.

  • Bonsoir dasola. Bravo de l'y avoir emmené. C'est un film qu'on peut effectivement revoir mais c'est le monstre le plus répugnant que j'ai vu.

  • Tu viens mendier des commentaires chez moi à présent !

  • Je prends tout ce qu'il y a prendre.

  • Mendiant de l'amour.
    Moi aussi j'ai un juke box (djoubox comme on disait dans le temps).

  • @Pascale
    Il faudra corriger "Fat Man" (et non at boy ni Fat girl...).
    J'ai vraiment trouvé que le bestiau avait une sale gueule. Mot qui n'a pas dû inspirer les rédacteurs des sous-titres puisqu'ils mettent à plusieurs reprises la locution "dans son bec" pour dire "dans sa bouche (animale?)...
    Sur les deux "sorties limitées" successives: je suppose (pure intuition, j'ai pas vérifié) qu'il s'agit de pur et simple "business", avec les "ayants droits" japonais (Studios Toho?) qui imposent aux "demandeurs" des tarifs qui varient selon la date (+ ou - vite après la sortie japonaise ou dans d'autres pays?) et la durée de maintien en salle...?
    Pour donner une comparaison de "cultures culturelle" différente: dans la BD franco-belge, une BD pourra naviguer d'éditeurs en éditeurs selon les albums et les contrats successifs négociés par les auteurs. Mais un éditeur français qui veut obtenir du Japon les droits sur une série manga doit s'engager sur la parution de toute la série. S'il lâche l'affaire, l'éditeur japonais exigera d'un "repreneur" éventuel de recommencer la parution (et repayant les droits, bien sûr) depuis le 1er tome...
    Enfin, à ce jour, je n'avais vu qu'un "Godzilla contre Kong" américain, et j'ai bien apprécié ce film humain - même si ça peut pleurnicher un peu trop par moment. J'ai apprécié que les "anciens combattants" qui s'occupent de "régler le problème" le fassent de leur plein gré, après avoir laissé chez eux ceux qui estiment "avoir déjà trop donné"...

  • J'ai corrigé le fat. Merci.
    Pour son espèce, c'est peut-être un bec ce truc plein de dents. Il a une sale gueule et un corps dégueulasse. Franchement, le voir était éprouvant.
    Aucune idée du pourquoi de cette sortie et ressortie étranges alors que c'est un film qui pourrait faire venir du monde.
    Cela dit nous n'étions qu'une dizaine dans la salle. Mais c'était en VO (j'ai apprécié).
    Je n'ai pas trouvé que ça pleurnichait et de toute façon, je trouve que c'est un pays qui a vraiment de bonnes raisons de pleurnicher.

  • Moyennement apprécié, si ce n'est pour l'aspect ultra-spectaculaire !
    Je préfère la version de 1954. Tu pousses un peu en comparant avec Kore-eda, non ?

  • Je ne connais pas cette version.
    La partie familiale, famille recomposée m'a vraiment touchée et évoqué Kore Eda.

  • J'ai adoré le côté vintage de Godzilla, bcp aimé le contexte historique, mais trop d'incohérences dans le scénario (corps croqués ou écrasés qu'on retrouve intacts, ou un ménage qui ne choque personne dans une société où c'est clairement quasi impossible) qui m'ont un peu gâché le plaisir

  • Rien ne m'a gâché le plaisir de ce surprenant film que je n'ai pas du tout trouvé vintage.
    Et je crois que dans l'état où se trouvait la ville, la solidarité et les cohabitations improbables devaient arriver.
    Et le réalisateur est japonais.

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