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VINGT DIEUX

de Louise Courvoisier ****

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Avec Clément Favreau, Luna Garet, Maïwène Barthélémy, Mathis Bernard, Dimitri Baudry

Totone et ses amis Francis et Jean-Yves passent beaucoup de temps à ne rien faire d'autre que boire et draguer les filles dans les bals du Jura.

Le père de Totone meurt (bêtement) et voilà le garçon, sans doute paresseux et sans grande ambition, obligé de s'occuper de sa petite soeur de 7 ans, Claire. Pour subvenir aux besoins il vend une partie du matériel de la ferme familiale mais est obligé de se rendre compte que sans travail, l'argent ne rentre pas. Il découvre que remporter le concours agricole du meilleur Comté de la région peut rapporter gros (30 000 €uros). Il se met alors en tête de fabriquer lui même le précieux fromage. Dans le même temps il fait la rencontre de Marie-Lise une fille magnifique (courageuse et travailleuse) mais plutôt bourrue et pas commode au premier abord. La vie de Totone est en train de changer...

Pour son premier film, la jeune réalisatrice jurassienne a choisi de s'attarder sur une frange de la population française peu visible voire invisible au cinéma : la jeunesse rurale. Confrontés à l'ennui, ces jeunes choisissent pour le combattre, l'alcool et la bagarre facile. On peut le regretter et se désoler de les voir finir ainsi leurs nuits totalement imbibés, proches du coma et d'en rire. Mais la réalisatrice porte sur eux un regard tendre et choisit aussi de montrer que confrontés aux exigences, ils savent prendre des décisions. On est ici entre Bruno Dumont (en moins sordide) pour l'immersion dans un département et le côté naturaliste, accent compris, le Ken Loach de La part des anges voire un peu de Chien de la Casse de Jean-Baptiste Durand. La réalisatrice a néanmoins sa marque personnelle parfois proche du documentaire avec un grand souci d'authenticité quand il s'agit de nous faire assister à la fabrication du Comté (scène drôle et passionnante), à un vêlage (scène hyper anxiogène parce qu'en parallèle du vêlage et de la bête qui ne peut être laissée seule, se déroule, hors champ, une scène d'une grande violence qu'on ne peut qu'imaginer)..., nous faire admirer les belles vaches et la douceur des montagnes.

Mais il y a également chez elle une grande et belle envie de cinéma que l'on ressent dans la progression de son histoire dans laquelle elle inclut la métamorphose de son frustre héros qui découvre le sens des responsabilités et l'amorce d'une jolie histoire d'amour dans laquelle le plaisir féminin surprend le garçon. Dans un éclat de dire il avoue à sa belle : "Tu sens la vache !".

La réalisatrice nous transmet à bas bruit sa tendresse pour ses personnages pas immédiatement sympathiques. Elle nous invite à l'indulgence pour leur côté parfois bas de plafond et finalement nous propose de nous y attacher. Ce que l'on fait, gagné peu à peu par la tendresse qui se dégage d'eux et une forme de souffrance et de courage notamment lors d'un échange entre Totone : "Tu as de la chance, tes parents t'ont transmis une ferme de 120 ha", ce à quoi Marie-Lise répond : "Quelle chance ? Je me lève à 5 heures, me couche à 22 heures. Je n'ai ni week-end ni vacances".

Il faut se battre constamment dans ce petit coin de France pour survivre grâce aux fruits de son labeur. Tout en plongeant dans une réalité sociale plutôt âpre, Louise Courvoisier réussit un beau film de cinéma comme une bouffée d'air. Les scènes entre Totone et sa (délicieuse) petite soeur qu'il se met à protéger comme une mère poule sont parmi les plus belles. Et lorsqu'il dit à son meilleur ami : "Tu t'occuperais de la petite si je disparaissais" et que l'autre répond "Ben non, je l'abandonnerais"... on sent tout l'amour que cette petite a su créer autour de ce petit personnage aux magnifiques grands yeux bleus qui lui dévorent le visage.

Finalement Claire, du haut de ses huit ans, est peut-être bien à l'origine de la prise de conscience de Totone qu'il doit, à toute vitesse, devenir adulte.

P.S. : j'ai appris que Clément Favreau et Maïwène Barthélémy ne comptaient pas abandonner le métier agricole qu'ils aiment. Et que Clément Favreau, pressenti pour être sur la liste des César catégorie Meilleur espoir avait refusé. Ce qui me les rend encore plus sympathiques.

Commentaires

  • d'accord avec toi, un petit film un brin caricatural (donc tous alcoolique, beauf, irresponsable...) mais sincère et touchant

  • Non, la fille ne l'est pas ainsi que d'autres responsables agricoles.

  • J'ai bien voyagé jusqu'en Franche-Comté avec cette belles histoire. Petit coup de cœur pour les 2 filles du casting.

  • Je comprends. Ils sont merveilleux ces jeunes.
    Et coup de coeur pour les filles aussi.

  • Bonjour Pascale
    Je suis d'accord avec ta formulation "La réalisatrice nous transmet à bas bruit sa tendresse pour ses personnages pas immédiatement sympathiques" ... et frustes. On peut supposer qu'ils ont été au moins jusqu'au Bac (dans l'enseignement agricole?), mais que ce ne sont pas des intellos...
    Je me demande si le jeu de mot était volontaire avec une meule sur une meule (quand Antony va rendre le produit laitier à qui de droit).
    Encore un film dont j'aimerais bien connaître la suite (savoir ce qui va se passer après...).

  • Bonsoir,
    Je te sens plus enthousiaste que dasola pour ce film formidable.
    Et moi aussi j'aimerais les retrouver.
    Je ne me souviens pas de la meule sur la meule...
    Totone et Marie-Lise sont en formation agricole en alternance.

  • J'ai failli passer à côté car l'histoire du comté ne m'intéresse pas. Et bien heureusement que j'y suis allée, c'est tout ce que tu décris. Il y a tellement de cinéma dans ce film‧ Et je suis touchée de savoir que les jeunes sont vraiment exploitants agricoles. Même si ça serait bien qu'on lâche le pis des vaches, ils me sont sympathiques. Mes grands parents étaient exploitants laitiers aussi ... ça touche forcément qq chose au fond de moi. Mais c'est vraiment un super film de cinéma !

  • Ouiiiii un vrai film de cinéma.
    Tu ne veux plus qu'on trait les vaches ??? Elles vont exploser non ?

  • Pas si on arrête de les inséminer pour faire des veaux qu'on emmène ensuite à l'abattoir ;) Ou qu'on leur laisse leurs petits au pire !

  • Vingt Dieux, ça a le goût des pâtures en fleurs. Mon bonheur de fin d'année, je viens de le trouver dans le pré !
    Tout ce que tu dis est vrai. Et ce n'est pas toi qui me dira le contraire. ;-)

  • Le goût ou l'odeur ? Serais-tu aller du côté de la savane et de Melele ?

    Je suis entièrement d'accord avec moi-même.

  • Les deux, madame, quand le produit est de qualité il faut le souligner (au stabilo s'il le faut, tchak!)
    Pas de savane, les pâturages jurassiens ont suffi à mon bonheur.

  • Bon sang mais c'est bien sûr, Marie Lise offre un lait au goût fleuri des pâturages jurassiens et Mufasa renifle à distance l'odeur de la prairie en fleurs kenyanne où a grandi Sarabi. J'ai mixé les deux.
    Tellement romantique ce Mufasa.

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