L'HOMME QUI RÉTRÉCIT
de Jan Kounen **
FRANCE
Avec Jean Dujardin, Marie-Josée Croze, Daphné Richard
C'est l'histoire d'un homme, Paul, qui rétrécit.
Un jour qu'il nage en pleine mer, il est confronté à un phénomène météorologique inexplicable, le ciel se troue littéralement. La faculté en blouse n'a aucune explication.
Dans une brève première partie on découvre la vie de cet homme, patron d'une petite entreprise qui peine à encaisser les factures dues. A la maison, avec sa femme Elise et sa fille Mia ils forment un trio tout en harmonie. Le père raconte une histoire à fifille avant de dormir et honore madame fougueusement. Sauf que la présence de l'épouse et de la fille devient tellement anecdotique sur la durée qu'on a bien du mal à croire à leurs affinités. On a l'impression que les acteurs ont à peine eu le temps de faire connaissance et à l'écran rien ne passe entre eux. Moi, cela me gêne (l'absence de connivence entre les acteurs surtout s'ils forment un couple).
Cela s'arrange dès que Jean Dujardin se retrouve seul en scène car à force de rétrécir il finit par disparaître aux yeux de son entourage qui le cherche un quart d'heure et passe à autre chose. On peut noter avec délice les réactions étranges voire très bêtes notamment de l'épouse dès que le constat de son rétrécissement est enclenché. Notons également que notre Jeannot (excellent) va finir par devenir le champion du monde des acteurs qui rétrécissent (dans Un homme à la hauteur de Laurent Tirard, il avait terminé sa croissance à 1 m 36) mais aussi seuls à l'écran pendant les trois quarts de ses films puisque c'était déjà le cas dans (le magnifique) Les chemins noirs de Denis Imbert. Comme dans le film précité, il assure également la voix off qui hélas n'est pas à la hauteur du vertige métaphysique que devrait nous provoquer cette sale affaire sans explications. Je n'ai pas retenu de propos exacts mais c'est un peu du style "la vie c'est beau mais dès qu'on naît il faut apprendre à mourir". Soit.
Certains films très réussis n'ont pas besoin de remake. Je pense que celui-ci en fait partie car si le classique de Jack Arnold (1957) n'est plus très frais dans ma mémoire il avait profondément marqué les consciences. Peut-être que sans la comparaison cette nouvelle version fera son travail.
A la suite d'un accident Paul se retrouve à la cave notamment face à l'araignée qui est devenue monstrueuse et aimerait le grignoter, au poisson rouge abandonné au sous-sol dans son aquarium (comment se sort-il du bocal quand il y tombe ?), à des fourmis, à un moustique (tigre)... toutes ces petites bestioles sont à présent des ennemis, prédateurs gigantesques. Paul se bat avec les moyens du bord que l'on trouve parfois dans une cave : une aiguille. Mais comment trouver de la nourriture ? Cette nécessité absolue est bien décrite dans une scène assez flippante face à un piège à souris mais ensuite on ne sait comment il fait pour survivre. Le besoin d'eau est aussi parfaitement illustré tout comme le moment où Paul escalade à mains nues le mur dressé à la verticale comme un Everest. Le film alterne ainsi des moments qui sont de pures trouvailles : la craie, l'allumette (je vous laisse découvrir) et d'autres où j'ai eu parfois envie de rire, ce qui n'est sans doute pas le but recherché.
J'ai par ailleurs trouvé qu'il y avait beaucoup trop de scènes face à l'araignée (mais sans doute fallait-il rentabiliser la bestiole animée). Le trouble, le vertige, le malaise qui devraient nous saisir, nous, petites poussières faites de matières infiniment négligeables (en temps de présence sur Terre et en taille) face à l'infiniment grand constitué de vide est totalement absent. Dommage.
Un divertissement pas déplaisant mais sans réflexion. Les effets spéciaux sont top.

Commentaires
Etant fan de l'original de 1957 (que j'ai revu il y a quelques jours et chroniqué dans la foulée pour préparer cette nouvelle séance) le duo Kounen-Dujardin souffre évidemment de la comparaison. Résultat, ce remake ne démérite pas, surtout plombé par une voix Off superflue qui appuie une version métaphysique digne d'une philosophie de comptoir. Mais il y a assez de trouvailles et d'idées pour conseiller d'aller au cinoche ;)
Oui ce n'est pas indigne mais la métaphysique de comptoir... qu'est-ce qu'on se marre !
Moi qui, au regard de la bande-annonce mochedouille, ne considérais jusqu'alors ce film que comme un crachat au visage d'un de mes auteurs de SF favoris, voilà que tu redonnes espoir dans ce film.
Pas de quoi faire disparaître la vertigineuse version de 57, mais tu donnes des pistes intéressantes sur l'effacement d'un homme au sein même de son foyer. Après l'homme déconstruit, l'homme rétréci ?
Je suis d'accord sur la BA vraiment pas choupinette.
Cet homme rétréci est également bien déconstruit. Les personnages de sa femme et sa fille sont gratinés...
Je decouvre tout ce que Matheson a écrit. C'est vertigineux.
Il a aussi scénarisé un paquet de films et de nombreux épisodes de "la Quatrième dimension".
A noter que "l'homme qui rétrécit" n'est pas la première adaptation française d'un de ses écrits puisqu'avant cela il y a eu "les seins de glace" avec Mireille Darc.
Oui j'ai vu aussi toutes les adaptations. C'est impressionnant.
Je vais m'intéresser à ses écrits.
Mais ma pile va bientôt atteindre le plafond.
Ce ne sera pas mon premier Kounen, a priori. C'est le genre de films dont je préfère voir l'original avant, éventuellement, le remake. Peut-être que j'ai tort de le recaler pour cette raison...
Le Jack Arnold est une très sympathique série B qui avait fait sensation à l'époque avec sa grosse araignée. Il avait aussi réalisé le mémorable "Tarantula" où l'araignée était plus grosse encore (mais heureusement, Clint était là pour remettre de l'ordre).
Il peut être intéressant de voir une adaptation plus moderne.
Oui, peut-être, mon Prince. Je n'en disconviens pas totalement.
Mais j'insiste : je préfère souvent commencer par les originaux, même si j'imagine que certains sont "datés" sur le plan technique. Une partie du plaisir que je prends avec le cinéma de genre tient précisément à cela : découvrir l'inventivité (les "bouts de ficelle") des réalisateurs pour développer un imaginaire malgré leurs contraintes de tournage.
Je suis assez fan du carton-pâte et des films dont on voit les coutures.
A qui le dis-tu ?Je viens de publier un article sur une vieille crypte du cimetière Hammer.
Eteignez et fermez la porte en sortant.
Je pense que, pour celles et ceux qui n'ont jamais vu la version "carton pâte", ce film peut constituer une intéressante découverte.
Pour moi, il vaut surtout par son second degré (qu'il soit conscient ou inconscient). Le héros Paul est un homme dominant en voie de "déconstruction". Cela ouvre le champ des interprétations...
Tu expliques très bien cette déconstruction chez toi.
Je trouve cela intéressant mais capilotracté.
Il faudrait demander à Jan.
Je n'en attendais rien et je l'ai vécu comme un gentil divertissement d'horreur. Mais c'est plus le tout début, quand il commence à perdre qq centimètres qui m'ont fait sentir ce vertige horrifique. Après c'est un survival original mais moins émouvant. Dujardin est au top. Et la voix off métaphorico-relou , c'est une contrainte imposée par TFI, le réal n'en voulait pas (il avait raison).
Une voix off qui a quelque chose à dire ça peut aller mais là... la pauvreté du baratin !!!
Jeannot est comme toujours très bien.