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BIRDMAN d'Alejandro González Iñárritu ****

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Riggan Thomson a jadis été une star planétaire pour avoir interprété un super héros à grosse voix, masqué et ailé : Batman Birdman. Aujourd'hui il tente de se refaire une popularité mais aussi d'atteindre la reconnaissance et l'approbation de ses paires et de la critique en montant une pièce à Broadway.

Son choix se porte sur un texte de Raymond Carver qu'il adapte : What We Talk About When We Talk About Love (je ne vous fais pas un dessin). Et lorsque l'un des rôles principaux se prend un drôle de coup sur la tête lors d'une répétition, sa comédienne partenaire lui propose un acteur jusqu'au boutiste (genre Actor Studio : pour jouer un serial killer, IL FAUT ÊTRE un serial killer) et très en vogue : Mike Shiner (Edward Norton, impayable !). Pas simple de concilier les ego(s) hors normes des acteurs (qui ont tant besoin d'amour et de reconnaissance et pas nous !), la vie personnelle qui s'est barrée en sucette depuis longtemps, sa fille qui sort de réhab' et les répétitions, et les avant-premières...

Et puis, il faut bien l'avouer, Riggan n'est plus vraiment seul dans sa tête. Un drôle de type le regarde dans son miroir. Et il est le seul, avec le spectateur son complice, à le savoir...

Deux jours que j'essaie de parler de ce film démentiel et de cet acteur prodigieux. Et que j'hésite à leur coller les 5 étoiles maximales. Deux jours qu'ils me trottent dans la tête, que je suis en apesanteur, portée par tant de virtuosité. Voir ce film une seule fois ne sera pas suffisant c'est évident. Chaque plan mériterait d'être décortiqué, chaque note de musique, chaque effet. J'ai même crié au moment où... sur un toit de New-York... mais chut ! Je ne dirai rien.

D'abord, il faut se mettre en tête que toute ressemblance avec un personnage/acteur ayant vraiment existé n'est que le pur fruit du hasard. Michael Keaton, ici à son zénith, l'affirme en interview : "Michael Keaton n'est pas Birdman, Riggan Thomson n'est pas Batman" et réciproquement. Et il a raison, on s'en fiche, on s'en contre-moque. S'il se parodie et joue sa vie, tant mieux, et si pas, tant mieux aussi car le film est monstrueusement beau, de toute façon.

Et au moins ça m'évitera de parler de la notion à la mode : la fameuse mise en abyme !

Ceci étant dit et bien dit... comment parler de Birdman et de Michael Keaton ?

Sa première apparition, de dos magnifique ce dos d'ailleurs, assis en tailleur et en slip dans sa loge bordélique nous indique d'emblée que ce que nous allons voir ne sera pas toujours de l'ordre du tangible et du réaliste et que la schizophrénie du personnage va nous bousculer sévèrement.

Mais encore !

J'aime beaucoup de choses au cinéma mais certaines me mettent en transe : l'histoire, l'interprétation des acteurs, les plans séquence ! Et là, je suis aux anges, comblée car Birdman est un festival de tout cela réuni. Evidemment quand la technique tellement parfaite se voit, cela peut finir par être gênant. Pas ici, et la succession de plans séquences interminables fabuleux laisse pantois. Suivre pendant plusieurs minutes des acteurs dans des couloirs où l'on ne tiendrait pas à deux de front, passer d'une pièce à l'autre, de la scène du théâtre aux loges, sortir par la porte, rentrer par la fenêtre, grimper dans les cintres, s'envoler au-dessus de New-York, courir parmi la foule... cela vous donne peut-être une vague idée du dynamisme, du caractère électrique du film tout entier agité d'une énergie dingue.

On se serait... moi en tout cas, allègrement bien passé de la fille blonde-décolorée-racines-grasses, perdue parce que papa n'était pas là pour les fêtes de fin d'année et qui a sombré dans la drogue mais bon... elle est la caution djeunz de l'histoire et permet de démontrer à son papa, tout aussi perdu qu'elle, ce que sont les "vues sur twitter". Et plus il dérape plus les followers affluent !

Michael Keaton, pilier de ce tourbillon de folie, d'émotions, de cynisme parfois, est l'incarnation du désarroi. Il se décompose sous nos yeux inquiets pendant que son réalisateur fait tourner, virevolter, voler sa caméra autour de son héros qui décolle parfois aussi. Et nous emporte avec lui.

Il nous balance des solos de batterie inquiétants, redoutables. Puis il envoie les violons et les fait s'arrêter brusquement. Parce qu'il a tous les pouvoirs et qu'on est au cinéma et qu'au cinéma, on peut tout faire. Et il le fait. Et c'est beau, brillantissime.

Dans la foulée, il use et abuse du name-droping, il offre à Zach Galifianakis son premier bon rôle, adulte et c'était pas gagné avec 250 kgs de moins, preuve que sa réalisation de virtuose ne lui fait pas perdre de vue la direction de ses acteurs. Edward Norton est tordant et pourtant on sent les fêlures. Andrea Riseborough, je l'aime d'amour et partage avec Naomi Watts bon, elle, euh, comment dire... rien une bien jolie scène de filles...

Mais Michaël Keaton, à qui l'Académie des Oscar (qui ne s'est pas trompée en sacrant ce film meilleur film de l'année et son réalisateur, meilleur réalisateur !) a préféré Eddie Redmayne..., démontre pendant deux heures comment un acteur emmène son personnage à la lisière de la folie et peut interpréter tous les regrets, les ratages et les blessures de son humaine condition. Et dans une scène hallucinante à moitié nu dans les rues de New-York, ridicule, vulnérable, pathétique, il est grandiose.

C'est beau, c'est drôle, c'est triste et la dernière image est d'une beauté !

Commentaires

  • C'est pas comme si l'Académie n'avait rien donné à ce film.
    Je vais le voir demain, si tout va bien.

  • C'est pas comme si certes, mais l'Académie aime les prestations où les acteurs croulent sous les grimaces et le latex. A ce titre Eddie Redmayne est imbattable (même s'il est bon parce qu'il n'en fait pas trop !).

  • Si s'il ne fallait garder qu'un mot dans la phrase "le film est monstrueusement beau" je ne garderais que l'adverbe.
    Tu sembles regretter le rôle de la fille junkie alors qu'elle est au cœur du propos lourdingue de Inarritu : ce métier qui dévore le rapport à la famille et qui vous laisse bouffi d'ego. Les autres (l'actrice fragile et petite fille, l'autre névrosée aux envies de maternité, sans parler de la diva narcissique et son admiration pour Brando et son discours de la Method) ne sont que décoratifs. ça nous donne de belles performances à Oscars ("j'en fais trop, c'est ça ?" dit le comédien shakespearien dans la rue) mais un film assommant.

  • Il est aussi bellement monstrueux.

    J'ai ai JUSQUE LA et même au delà des traumas familiaux dans les films. C'est pourquoi la junkie aux cheveux gras, je la zapperai sans qu'elle nuise au reste.

  • Bon ben j'ai bien aimé, et en effet il y avait un potentiel d'oscar dans la performance de Michael Keaton dans ce film, qui est magnifique de fluidité. Quant à l'ado aux cheveux gras, c'est Emma Stone, et elle pourrait en avoir trois fois moins à faire que je ne la trouverais encore pas de trop.

  • Ah oui, comme quoi les goûts et les couleurs en matière d'actrices...

  • quelle déception
    tous ses acteurs qui crachent dans la soupe... keaton pleins de tics et qui surjoue
    la mise en scène en un plan séquence complètement raté( les faux raccords et les coupes de cheveux différentes de norton)
    la batterie omniprésente m'a contrait à prendre deux dolipranes à l'issue de la séance
    c est un film un peu élitiste tu trouves pas ?

  • Oui nous sommes l'élite de la nation !
    Surtout l'élite de rouge :-)

  • tchin tchin

  • Hiiic !

  • Parti voir le film sur tes conseils (et un petit peu aussi à cause des oscars), j'en suis revenu un peu perplexe. J'ai trouvé que le traitement de la schizophrénie était bonne, l'ego sans limite des acteurs bien rendu. La scène en slip dans Broadway extra... mais le rythme trop soutenu, sans respiration, la multiplication des cas pathologiques m'a un peu gâché mon plaisir. Catherine n'est pas venu et je me suis dit, connaissant ses goûts, qu'elle avait sans doute eu raison.

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