Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

CHIEN DE LA CASSE

de Jean-Baptiste Durand ***(*)

0272581.jpg-c_310_420_x-f_jpg-q_x-xxyxx.jpg

avec Raphaël Quenard, Anthony Bajon, Galatea Bellugi, Dominique Reymond, Bernard Blancan

Dog et Mirales sont amis depuis de longues années. Totalement désoeuvrés, ils passent beaucoup de temps ensemble avec un groupe de copains, à ne rien faire autour de la fontaine d'un village de l'Hérault, Le Pouget (2 000 âmes, j'ai compté cherché).

Ou à jouer à des jeux vidéos affalés sur un canapé, à condition que Dog accorde ce compromis à Mirales.

L'un (Dog, Anthony Bajon comme toujours parfait) est aussi taiseux et introverti que l'autre (Mirales, Raphaël Quenard, surprenant) est expansif. Ce dernier passe d'ailleurs beaucoup de temps à taquiner Dog en public, quitte à l'humilier sans que jamais l'autre ne réagisse. Lorsque Dog prend en stop Elsa une étudiante qui s'installe au village pour un mois et entame une relation avec elle, Mirales en prend ombrage, souffre et multiplie les coups d'éclat. L'amitié va-t-elle résister à l'arrivée de cette jeune fille futée, libre et insolente (Galatea Bellugi, douce et solide) ?

Ce film ne cesse de surprendre tout du long. Avec ses joggings moches, parfois même roses, Mirales a l'air du parfait crétin et pourtant à la moindre occasion et fort à propos, il cite Montaigne, parvient à soutenir une conversation avec Elsa qui fait de brillantes études littéraires et a toujours un livre à la main dès qu'il n'est pas avec ses copains ou ne deale pas. On a du mal à cerner ce personnage, fou de son chien, charmant et admiratif face à une vieille voisine pianiste, charitable avec l'idiot du village (incarné avec beaucoup de douceur par Bernard Blancan) et proche de sa mère dépressive avec qui il vit et à qui il prépare de bons petits plats qu'elle n'apprécie même pas. Deux écoles s'opposent ici : faut-il mettre ou pas de la crème dans les carbonara ? 

Mirales ne cesse d'asticoter Dog qui attend d'entrer à l'armée et a bien du mal à exprimer le moindre sentiment ou aligner deux phrases correctes voire cohérentes. A part pour son charmant minois on a du mal à comprendre pourquoi Elsa l'intello s'y intéresse. Et pourtant malgré leurs travers et leur apparente superficialité, on est contents de faire la connaissance de ces trois zigotos et aussi de partager leur quotidien apparemment insouciant qui va peu à peu se transformer en douleurs.

D'abord on rit beaucoup. Dans le rôle de Mirales, Raphaël Quenard se livre à un véritable one man show absolument irrésistible. Pour ceux qui ont vu Coupez ! de Michel Hazavanicius, il était le grand escogriffe diarrhéique et ingé-son obsédé par l'eau dure. La moindre de ses interventions se transforme en punch line délirante et pourtant le garçon est capable d'une  douloureuse mélancolie tout aussi surprenante.

On finit par être profondément touché par le vide existentiel de ces jeunes qui ne savent même pas en quoi espérer ou à quoi croire. Et on s'y attache, surtout aux deux garçons surtout lorsque l'arrivée d'une tierce personne finit par les séparer. La scène de l'anniversaire de Dog au restaurant est d'une cruauté dérangeante et assez bouleversante. Là encore Dog élude et s'échappe sans réagir malgré la violence des propos de Mirales, incompréhensiblement et inutilement méchant.

Finalement celui qui souffre le plus n'est peut-être pas celui qui semble effacé, humble, voire ignorant. Alors que l'autre, flamboyant, envahissant et parfois méprisant souffre d'un véritable vide existentiel et n'a toujours pas trouvé la femme idéale, celle avec qui on veut partager la même tombe...

Par un artifice scénaristique subtilement amené et pas incohérent, le réalisateur parviendra-t-il à faire triompher l'amitié ? La course folle à travers les rues pavées et les vielles pierres du village pour échapper à des poursuivants très mal intentionnés est de toute beauté.

Et il faut encore insister sur le bonheur et la joie de découvrir Raphaël Quenard, charismatique, ténébreux, inquiétant, imprévisible, séduisant, IRRESISTIBLE, capable de tirades déjantées comme de la plus profonde mélancolie.

Espérons que le titre du film plutôt abscons, même avec les explications du réalisateur présent lors de la séance en avant-première à laquelle j'avais assisté (il s'agirait d'une expression locale) ne freine pas les spectateurs de se rendre en salle. Remercions-le de permettre à cette bombe à retardement qu'est Raphaël Quenard d'exploser à la face du monde dans un premier rôle, après Coupez !, Novembre et Je verrai toujours vos visages où chacune de ses apparitions était déjà assez remarquable.

Chien de la casse: Raphaël
Quenard

Commentaires

  • Coucou,
    Et bien ce film me tente carrément avec l'amitié au masculin pour thème !
    Et toutes tes étoiles en plus.
    Bisous bonne journée

  • Un film pas ordinaire avec plein d'étoiles oui. Bonne journée.

  • Bonjour Pascale, ce fiim me tente beaucoup, je vais aller le voir demain. Et suite à ton commentaire sur Je verrai toujours vos visages, j'ai vraiment dit ce que je pense et tant pis si cela a dissuadé mes quelques lecteurs. Personnellement, j'avais préféré Pupille. Bonne journée.

  • Bonjour dasola.
    C'est un film incontournable selon moi. Pas ordinaire et il est indispensable de découvrir Raphaël Quenard.
    Oui je sais que tu parles de ton ressenti :-) je trouve dommage quand les gens ne se donnent pas la peine de se faire leur propre opinion surtout pour un film aussi fort.
    Bonne journée.

  • Tellement pas pu m'attacher à ces personnages complètement antipathiques et inutiles...

  • Pffff. C'est une certaine image d'une partie de la jeunesse rurale oubliée des scénarii.

  • Et j'espère pour toi que tu as vu la série Le monde de Demain (ça devait être sur Arte, le jour du yoga) où Anthony Bajon interprète magnifiquement Kool Shen...

  • Et ben non... on m'en a encore parlé ce week-end mais j'ai vite lâché l'affaire.
    Arrête de raconter ma vie.
    Mais... c'est CE SOIR !!!!!!

  • Ah oui, il m'a frappé dans Je verrai toujours vos visages !
    Encore un film que j'espère voir rester un peu en salle car il est dans ma liste et ton avis me conforte !

  • Il faut un peu se hâter quand même.
    Les "petits" films sont souvent sur un siège éjectable.

  • Oui hélas :( je reviens sur Paris seulement le 9 mai, je vais surement en louper quelques uns !

  • Il en sort de plus en plus, c'est impossible de suivre... C'est NUL.
    Bonne nouvelle : Chien de la casse semble bénéficier d'un engouement assez générale. Tu devrais pouvoir le voir.

  • Je viens de le voir dans une salle vide et c'est bien dommage pour un si bon premier film. Beaucoup de travail sur la psychologie des personnages. Des paysages et un village du sud magnifiquement filmé. On est un peu mal à l'aise par rapport à l'emprise de Morales sur Dog et l'absence de réaction de celui. Les séquences avec ton ami Campan sont des pauses sympathiques. Raphaël Quenard est excellent, oui vraiment. J'ai trouvé l'happy end un peu trop...happy et donc en décalage. Un cinéaste à suivre.

  • Ravie que tu aies aimé cet excellent premier film. Différent et surprenant.
    C'est rare de voir ainsi la jeunesse "rurale".
    Et oui la relation toxique met souvent mal à l'aise, surtout au moment de la soirée d'anniversaire je trouve.
    Raphaël est LA révélation du film. Enfin et tant mieux.
    D'autres réalisateurs auraient sans doute laissé une fin plus ouverte. Ici le "destin" des personnages est clair.
    C'est la baballe à Malabar :-)

    P.S. : mon ami s'appelle Blancan mais il est habitué à cette confusion :-)

Écrire un commentaire

Optionnel