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françoise fabian

  • JE N'AI RIEN OUBLIE de Bruno Chiche ***

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    Conrad est un grand garçon d'à peu près 60 ans qui commence à yoyoter de la cafetière. C'est en fait l'alzheimer qui s'insinue peu à peu. Du coup, il ne se souvient pas de ce qu'il a fait deux secondes avant mais se trouve par contre envahi des souvenirs de sa petite enfance. C'était le temps béni  où il était l'ami, le quasi frère de Thomas qui aujourd'hui le rejette. Cette mémoire sélective qui va puiser trop loin dans le passé,  n'est pas du goût d'Elvira matriarche presque octogénaire qui règne sur le domaine et la famille Senn et qui semble cacher quelques secrets. Conrad, qui a toujours vécu aux crochets de cette famille, leur a servi de jardinier, de gardien, d'homme à tout faire n'est plus le bienvenu depuis qu'il a mis accidentellement le feu à une maison de vacances de la tribu. Alors qu'Elvira a organisé en très grandes pompes le mariage de son petit fils et héritier chéri Philippe avec Simone, jeune beauté un peu perdue qui va essayer de s'intégrer au clan, Conrad fait irruption pendant la fête tel l'éléphant dans un magasin de porcelaine. Sa maladie l'empêchant de vivre seul désormais, Elvira décide, à la stupéfaction de tous, de l'héberger dans une "petite" maison au fond du domaine. Curieusement, la jeune mariée délaissée puis trompée par son goujat de mari et Conrad vont devenir amis. Pensant l'aider à faire travailler sa mémoire, Simone va en fait contribuer à faire ressurgir un passé que certains cherchaient à effacer ou mieux, à ne pas connaître. 

    Il ne faut pas être extralucide ou fin psychologue pour comprendre le fameux secret qui pèse sur certains membres de la famille. D'ailleurs, les explications finales fumeuses et alambiquées sont tellement compliquées qu'elles m'ont laissé comme un arrière goût d'à peu près et l'impression d'avoir même loupé une révélation... Malgré cela, ce film étrange, tantôt léger, tantôt inquiétant m'a profondément troublée. Il règne dans cette grande demeure aristocrate où Elvira (Françoise Fabian d'une beauté diabolique et d'une incroyable cruauté) impose sa loi, une atmosphère souvent pesante où l'on sent bien que l'hypocrisie et les mensonges sont une seconde nature pour chacun. Pour Thomas (Niels Arestrup, beau, charmant et souriant comme rarement jamais..) boire et se saoûler lui permet d'oublier et notamment d'oublier pourquoi il boit. Il élude l'évocation de son mariage échec et de son divorce avec Elisabeth (Nathalie Baye, douce et désenchantée) qui a préféré la sécurité en le choisissant lui plutôt que Conrad qu'elle a aussi aimé. Thomas repousse Conrad, préférant se persuader que sa maladie le rend gâteux. La relation qui naît entre Conrad et Simone (Alexandra Maria Lara, belle et digne) réserve de beaux moments de complicité. Et c'est finalement elle qui va, en toute innocence, réveiller le passé infâmant.

    C'est doux, profond, lumineux, sombre et cruel, parfois même envoûtant et ce casting singulier mais harmonieux où chaque interprète brille d'intensité est sans doute l'un des attraits essentiel de ce film classique et raffiné. Mais pas seulement... Et puis il y a Gérard Depardieu, fragile comme un oiseau, de plus en plus calme, doux et léger à mesure qu'il se dilate...

  • L'ARBRE ET LA FORET de Olivier Ducastel et Jacques Martineau ***

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    Frédérick n'assiste pas aux obsèques de son fils Charles. Lorsqu'il rentre chez lui après la "cérémonie" les réactions des membres de la famille ne se font pas attendre. Sa femme Marianne et une de ses belles-filles Françoise semblent comprendre ou du moins accepter, son autre fils Guillaume explose et crie sa honte, sa petite fille Delphine (fille du défunt) reste provisoirement muette de stupéfaction. Frédérick ne s'explique pas, il préfère nonchalamment retourner "parler" au tilleul, compagnon de son mystère et qu'il a planté en 1943, continuer d'écouter (ampli sur 12) et réveiller chaque jour tout le monde au son de la tétralogie de Wagner !

    Frédérick et Marianne sont un couple solide depuis près de 60 ans. Guy Marchand et Françoise Fabian en sont les interprètes et déploient une complicité et une intimité tellement évidentes qu'elles donneraient presque envie de vieillir tant leur sagesse et leur connivence font plaisir à voir. Ils sont propriétaires d'une belle demeure perdue dans la campagne au milieu d'une forêt qui leur appartient et dont ils ont au fil des décennies planté et regardé grandir les arbres. Dans un premier temps, chacun va essayer d'oublier cet épisode étonnant d'un père qui n'assiste pas aux obsèques de son fils. Faire comme si... Jusqu'à ce que Frédérick au cours d'un énième repas familial décide de révéler le secret qu'il garde depuis longtemps et l'a isolé de ses proches. Il commence ainsi : "Je ne suis pas allé à l'enterrement de Charles parce qu'il m'a demandé de ne pas venir. Charles était un salaud...".

    Stupeur et tremblement !

    La révélation, même si elle est loin de celle(s) de "Festen" n'en est pas moins surprenante mais c'est davantage les réactions de chacun qui sont explorées ici. Ah la famille !!!  Les secrets y font mal la plupart du temps, parce qu'ils sont l'objet de fantasmes, d'interprétations, de confusions, de méprises, de jugements qui isolent, séparent ou détruisent. Les réalisateurs choisissent clairement de nous dire que c'est par la parole qu'on se décharge du poids que font peser les mystères, les mensonges, les dissimulations sur tous les membres d'une famille. Que seule la parole est libératrice et permet de combler ce besoin incomprénsible parfois tyrannique d'une plénitude familiale !

    Certains personnages sont particulièrement bien observés et les réalisateurs me semblent accorder une attention toute particulière à l'autre fils Guillaume, alcoolique, amer, malheureux qui crie son besoin d'amour et de reconnaissance par une attitude souvent odieuse. A Marianne, la femme éternellement amoureuse malgré les décennies qui s'additionnent, compréhensive et accommodante sans être une victime résignée. A Delphine, la petite fille qui tremble de s'engager avec l'homme qu'elle aime et qui l'implore constamment de l'aimer, de la protéger, de ne jamais lui mentir, de lui faire des serments pleins de toujours et de jamais... Et puis il y a Françoise, la belle-fille, ex femme de Charles, qui refuse de juger, qui affirme que le deuil s'accomplit pour chacun à sa façon, que rien n'est vraiment grave et définitif au fond. C'est mon personnage préféré et c'est Catherine Mouchet qui l'interprète. Actrice rare, d'une classe et d'une intelligence hors du commun, d'un naturel désarmant, son attitude souvent désinvolte mais dénuée d'ironie, sa gaité, sa malice et son humour, sa voix très caractéristique et son débit nonchalant font que c'est décidé, quand je serai grande si je suis grande un jour, je VEUX être Catherine Mouchet. Ses conversations avec Marianne/Françoise Fabian ou sa "fille" sont des moments de grâce et d'intelligence. L'entendre dire à Françoise Fabian qui lui fait des confidences "ah ben ça mérite un ptit verre !" ou à sa fille qui s'inquiète de son avenir : "Tout ce fatras psychologique j'trouve ça tellement... bête. On a des problèmes avec son papa et sa maman, et alors qui n'en a pas ?" sont des merveilles !

    Un beau film à l'interprétation plus que parfaite plein de douleur et de sagesse qui ne donne pas de recette mais essaie de traduire quelques comportements, tels que juger sans savoir ou comprendre, s'enfermer en croyant bien faire, révéler sans se préoccuper de ce qu'on va déclencher. Prendre la bonne distance est parfois source de conflits mais peut aussi/surtout être salvateur et favoriser un certainement apaisement voire l'épanouissement. Il n'est pas interdit de rêver, on est au cinéma.

    Pour vous achever de vous donner envie : la bande annonce (avec Catherine Mouchet vers 1mn30...)