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hélène fillières

  • A MOI SEULE de Frédéric Videau ***

    A moi seule : photo Frédéric VideauA moi seule : photo Frédéric VideauA moi seule : photo Frédéric Videau

    Un jour, sans qu'elle y soit préparée, Gaëlle est libérée par Vincent qui la retient enfermée depuis 8 ans. Elle court, se retourne, hésite et finalement s'enfuit. Elle retrouve sa mère, puis son père, tente de trouver sa place après un séjour en hôpital psychiatrique. Comment s'intégrer dans le monde quand on a vécu une partie de son enfance et son adolescence bouclée dans une cave dont on ne pouvait sortir que la nuit ?

    Le réalisateur choisit de dire que pour survivre dans de telles conditions, il faut accepter la situation. Cela peut paraître choquant et dérangeant mais effectivement, il ne fait pas de Gaëlle une victime totalement soumise. Et même si parfois elle est contrainte de baisser la garde et les yeux face à Vincent qui rarement s'énerve, c'est aussi parfois elle qui décide de retourner dans son sous-sol ! Gaëlle a compris que pour ne pas vivre dans la terreur qui l'assaille au début de sa détention alors qu'elle n'est encore qu'une toute petite fille, il faut se résoudre à faire confiance à son géôlier. Il faut dire qu'il est particulièrement ambigü ce Vincent et Frédéric Videau n'en fait pas un monstre mais un homme qui souffre autant que sa victime, de solitude. C'est là la grande subtilité ou l'énorme aberration du film, on s'attache à la relation de "couple" des deux personnages faite de complicité, de bouderies, d'engueulades en oubliant souvent que Gaëlle est une proie.

    Lorsque Gaëlle retrouve le monde (passé à l'Euro...), elle retrouve aussi une mère inconnue  mais tendre et un père coupable devenu alcoolique. Ses parents, séparés pour n'avoir pas réussi à vivre le cauchemar ensemble, sont plus détruits qu'elle dont émane une force qui dépasse tout son entourage. Comment rester des parents quand on n'a pas réussi à protéger son enfant ? A l'hôpital encore, on tente de la faire entrer dans un moule et une vie "normale" alors que toute sa vie a été bouleversée et inversée. Concrètement Gaëlle dort le jour et s'éveille la nuit, c'est un détail mais on ne sort pas la nuit... Encore une fois c'est sans doute Gaëlle qui sera plus forte que tout le monde en déclarant "je suis neuve, toute neuve".

    Au-delà de toutes les questions sans réponses que propose le film, il donne surtout à admirer deux acteurs, deux animaux époustouflants qui s'apprivoisent et s'aiment à leur façon singulière et inattendue. Agathe Bonitzer est une actrice étonnante et attachante à qui je décerne d'emblée le César du Meilleur Espoir. Même si elle tourne depuis déjà plusieurs années, elle prouve ici encore qu'elle est capable de porter un film sur ses graciles épaules. Et Reda Kateb combine intelligemment et subtilement l'inquiétude qui peut émaner de son regard à la douceur de son comportement.