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L'ÉCUME DES JOURS de Michel Gondry ***

L'Ecume des jours : Affiche

Colin a une belle vie. Il est si riche qu'il n'a pas besoin de travailler. Il passe son temps à créer des machines insensées comme ce pianocktail qui permet de composer des boissons en fonction des accords interprétés. Il vit avec Nicolas, son conseiller, avocat et cuisinier. Son meilleur ami, Chick n'est pas issu du même milieu et doit travailler en usine, d'autant plus qu'il a une passion ruineuse. Fan du philosophe Jean-Sol Partre, il se procure chaque oeuvre, chaque conférence et même l'effigie de son idole grandeur nature. Pour l'aider à assouvir sa passion onéreuse, Colin offre à Chick le quart de sa fortune. Côté coeur, tout va bien. Chick et Alise s'aiment, Nicolas et Isis s'aiment et Colin trouvant injuste de ne pas être amoureux, rencontre Chloé ("avez-vous été arrangée par Duke Ellington ?") et l'épouse. Tout va bien, la vie est belle... mais plus pour longtemps. Chick délaisse Alise au profit de Jean-Sol Partre, Nicolas ne cesse de tromper Isis et le nénuphar qui pousse dans le poumon de Chloé bouleverse tout l'univers. 

N'en déplaise aux  Inrocks et autres pisse-vinaigre qui un jour peut-être aimeront le cinéma, ça leur déridera peut-être un peu les fesses fera un bien fou, Michel Gondry  a presque tout bon ! Et pourtant j'avais peur. On ne touche pas à l'Ecume des Jours. C'est LE roman de l'adolescence, de la jeunesse. Celui qu'on lit, qu'on relit et qu'on n'oublie jamais. Celui que même ceux qui ne lisent pas ont lu ! C'est un monument, une cathédrale et sans doute réputé inadaptable au cinéma. Et pourtant en regardant le film, on lit le livre en images et on a envie de le re-lire, de fouiller dans la bibliothèque et de retrouver la vieille version toute cornée  découverte en terminale ou avant, celle avec le nénuphar ou la tête de Boris en couverture. Le roman date de 1947.  Et cette histoire est incroyable, extraordinaire, toujours actuelle. J'espère qu'une nouvelle génération de teenagers va dévaliser les librairies et tomber amoureuse de Colin, Chloé, Isis, Nicolas, Chick et Alise, et du style époustouflant de l'auteur !

Evidemment, il y a deux segments bien distincts. Avant et après le "nénuphar" de Chloé. Et Michel Gondry accomplit la prouesse de nous mettre dans le même état d'esprit que ses personnages. En entrant dans cet univers, celui de Vian animé par Gondry, on passe une heure avec un sourire figé en mode découverte, admiration et émerveillement. Le réalisateur n'oublie rien mais ne se contente pas de faire figurer des gadgets en pagaïe mais bien de rendre vivant le monde surréaliste, onirique où les objets prennent vie, l'influencent ou agissent en fonction des événements. Jamais on aurait cru pouvoir voir le fameux pianocktail, la voiture nuage, la sonnette insecte, la souris, les doublezons, les fenêtres qui repoussent, la chambre qui rapetisse, ou assister à une démonstration de "biglemoi"...

Lorsque le film commence Colin se taille "en biseau les coins de ses paupières mates, pour donner du mystère à son regard" comme dans le livre. Et toute la fantasmagorie déployée par Vian refait brusquement surface. Et Colin (incarné idéalement par Romain Duris au jeu tellement surréaliste) apparaît, innocent, gentil, superficiel car "Il était presque toujours de bonne humeur, le reste du temps il dormait". Le temps de l'insouciance où les amoureux dansent, vont à la patinoire, boivent, s'amusent est éphémère. Et la seconde partie, dès le mariage de Colin et Chloé, est peu à peu et de plus en plus sombre, menaçante, angoissante. L'appartement si grand, si lumineux  devient lugubre, marécageux. Il rétrécit. Les couleurs s'estompent jusqu'à disparaître. Il ne reste plus qu'un noir et blanc brumeux, dramatiquement chargé.

Mais Gondry ne se contente pas de la forme, le fond est là aussi. Et le réalisateur, comme Vian, dénonce le monde du travail, l'exploitation, le rendement, les cadences, la médecine impuissante, l'Eglise cupide et mercantile, l'administration, le culte de la personnalité illustré par le personnage de Jean-Sol Partre, l'individualisme... Par ailleurs Colin, à l'instar de Vian est un grand amateur de jazz et pas n'importe lequel. La BO est donc admirable et les apparitions de Duke Ellington un régal.

Mais curieusement, on est beaucoup plus bouleversé par les modifications de l'environnement, par ce monde qui devient funeste et par Colin misérable, obligé d'accepter des emplois extravagants, (fabriquer des armes à la chaleur de son corps, travailler pour une administration qui prédit les événements) dans des conditions épouvantables que par l'histoire d'amour dramatique. J'avais le souvenir d'un grand roman d'amour triste à mourir, et du film je retiens surtout un profond désespoir provoqué par la perte de l'innocence, la fin de l'insouciance  douloureusement expérimentées par Colin.

Je n'arrive pas à dire si L'ECUME DES JOURS est un grand film ou un beau film ou les deux (sûrement les deux) mais il est à coup sûr, différent, inventif, subtil... désespéré.

Commentaires

  • Désolée mais Tautou jepeupa

  • Tant pis.

  • Pa trop envie de le voir au départ ( inutile de te préciser, je pense, que j'avais effectivement adoré le roman à l'adolescence) mais tu me titilles un peu quand même, là ...

  • youpiiiiiiiiiiiiiih !

  • Et dis donc au fait, le ceum dont tu devais me causer question littérature ???

  • Oui je dois toujours.
    Mais je suis sûre que tu as des choses à lire en attendant !

  • Ah ça, ma pauvre, si tu savais ce que j'ai en stock !!! Mais je suis malgré tout toujours preneuse de nouvelles idées ... une vraie maladie, j'te dis !

  • J'adore qu'on m'appelle ma pauvre !!!

  • J'ai bien envie de découvrir ce film, j'avais adoré le livre (lu tardivement il y a qq années) et puis Duris et Tautou je les aime bien !
    Bisous

  • Je ne pense pas que tu seras déçue.

  • J'ai trouvé que Gondry s'en est bien sorti, pour moi, c'est le premier film adapté d'un roman qui respecte aussi bien l'histoire, l'esprit du livre et l'univers de Boris Vian. D'ailleurs, j'ai enfin lu l'Ecume des jours avant sa sortie au ciné, je l'ai dévoré en même pas deux jours.

    J'ai quand même trouvé la première partie d'avant le nénuphar super naze, la deuxième partie est bien meilleure. Et sinon j'ai pas trouvé les acteurs exceptionnels, surtout dans la première partie, ils sont maladroits. Mais ils sont mieux quand il faut faire dans le tragique, notamment Duris et Tautou. Gad Elmaleh, plus je le vois en comedien, plus je le préfère en comique. Charlotte Le Bon est une potiche. Seul Omar Sy s'en sort bien du début à la fin.

    Sinon les ados d'aujourd'hui adorent et vont adorer, ma sœur de 15 ans a chialé à la fin, trop bouleversée par la descente aux enfers des personnages. Enfin, la BO est juste magnifique. Je pense l'acheter tout bientôt.

  • Oui on a l'impression de feuilleter le livre.

    J'ai beaucoup aimé la première partie moi.

    Quant à Gad... je suis d'accord. C'est l'un des rares humoristes français que j'apprécie mais en tant qu'acteur AU S'COURS... Il ne porte pas du tout le désespoir de Chick.
    J'ai trouvé que c'était Romain Duris qui s'en sortait le mieux.
    Les filles n'ont hélas pas grand chose à faire.

  • je m'en doutais ! ;-)

  • Et au fait ... le King ???

  • Super Kong !

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