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UNE NUIT

d'Alex Lutz ***(*)

Une nuit

Avec Alex Lutz, Karin Viard

Le métro parisien à une heure de pointe. Une femme s'engouffre précipitamment dans le wagon, bouscule un homme qui exige des excuses.

Agacée la femme réplique, l'homme renchérit. C'est la dispute, argumentée et très énervée qui amuse les autres passagers qui n'interviennent pas. Scène suivante, on retrouve nos deux impatients dans une cabine photomaton, ils font l'amour. Et ensuite ? Faut-il se dire au revoir ? "On s'est disputés six minutes, on a fait l'amour les six minutes suivantes, pas de quoi en faire une histoire !" dit la femme. Et puis finalement si, faisons-en une histoire. Et si on s'offrait une petite parenthèse en forme de questionnement sur la vie mais surtout l'amour, le couple, les enfants, la famille ? Avec un-e parfait-e inconnu-e, cela peut être intéressant, surprenant, révélateur. Alors de bancs publics, en promenades dans le bois, sur les quais, à travers la ville qui s'endort, en squattant une fête privée, dans un club échangiste (la scène la plus artificielle malgré des échanges de regards et des sourires à tomber à la renverse), Nathalie et Aymeric, mais sont-ce leurs véritables prénoms, s'abandonnent aux confidences et aux révélations sans gêne, sans tabou, sans fausse pudeur.

Il faut un petit temps d'adaptation pour "entrer" dans le film. Il faut admettre que deux inconnus d'abord absolument hostiles l'un à l'autre succombent en même temps à un désir incontrôlé dans les minutes qui suivent leur affrontement. Il faut passer outre les facilités scénaristiques qui leur permettent d'être dans des endroits différents et de faire intervenir dans leur errance un cheval (la grande passion d'Alex Lutz). Et surtout il faut accepter que durant la prochaine heure et demie on va les écouter parler, se confier, se découvrir. Et puis les regarder aussi, s'effleurer, se prendre la main, atteindre l'évidence et la repousser, se vouvoyer, se tutoyer et peut-être, dans le meilleur des cas (le mien) succomber avec eux. Car oui, contrairement à d'autres, plus le film avance (excepté la scène du club un peu too much et "préparée" et vraiment pas bien jouée par l'autre partenaire féminine) plus on peut se laisser séduire et emporter par l'aventure éternelle d'une nuit d'un couple que les beaux hasards et les merveilleuses coïncidences de la vie ont mis en présence. A vous donner envie de prendre le métro (et de rencontrer Alex Lutz).

Alors oui c'est parfois philosophique, pas toujours limpide quand les personnages semblent avoir un avis tranché sur tout, voire psychanalytique parfois, mais en les accompagnant dans leur douce errance on s'interroge avec eux sur nos propres choix, nos doutes, nos convictions, nos erreurs mais aussi sur cette vérité qui parfois submerge. L'amour peut arriver et Nathalie et Aymeric parlent de leur conjoint respectif avec infiniment de tendresse et de respect. Car au-delà de tout il y a ces moments ou l'autre qui vous connaît mieux que personne, que l'on connaît mieux personne, peut tout voir, tout entendre, tout comprendre, tout accepter, c'est la magie de l'intimité, de la complicité. L'alchimie peut-être. Le film met cela parfaitement en lumière. Et Aymeric tente de l'exprimer maladroitement : "quand on est la bite à l'air... la brosse à dent dans la main", c'est dans ces moments là peut-être qu'on sait que l'autre est bien cet autre qui compte.

Alex Lutz totalement amoureux de sa partenaire, la filme et la couve de regards émerveillés. Il a l'audace (incroyable au cinéma) d'en faire le binôme d'un couple où c'est la femme qui a une dizaine d'années de plus que l'homme ("vous êtes essoufflée parce que vous êtes plus âgée que moi", mais est-ce bien pour cela ?) et cela fonctionne. Il ponctue son film de moments réjouissants où pour se rendre totalement libre et disponible on se débarrasse de son téléphone, où il fait une révélation particulièrement vexante mais drôle au restaurant et une autre beaucoup plus intime et drôle aussi.

Et comme Jérôme Garcin, je dirais que : "Karin Viard et Alex Lutz... sont comme en apesanteur. Ils dansent sur un fil. En dessous, il y a le vide". Et c'est follement réussi et je suis heureuse d'être du côté de ceux qui trouvent ce film élégant et délicieux, un peu douloureux aussi. Le réalisateur/acteur filme les visages au plus près de la peau et laisse percevoir toutes les émotions qui les parcourent et cet émerveillement aussi. Et fatigués au bout d'une nuit sans sommeil, les yeux cernés, les larmes affleurant lentement, il nous cloue sur place, en larmes aussi, sur un pont de Paris dans un épilogue bouleversant, éclairant de nombreux détails imperceptibles.

Laissez-vous embarquer, laissez-vous faire. Karin Viard, enfin débarrassée de ses "rôles à métier" est enfin douce, gentille et touchante. Mais c'est Alex Lutz qui est ici le champion de l'émotion.

Une nuit: Alex
Lutz, Karin
Viard

Commentaires

  • Bon... Mon coeur d'artichaut, mon cerveau analytique et moi, on va voir si on peut arriver à se mettre d'accord pour aller voir ce film et en revenir avec un avis éclairé!
    Vous donnez envie!

  • Il faut effectivement un coeur d'artichaut.
    Mais pas le reste...
    Contente de donner envie.

    Halleluyah, pas de signature et je sais qui a écrit :-)

  • Télérama ne tarit pas d'éloges sur Karin Viard. Si je trouve le temps, j'irai, mais il n'est pas en haut de ma liste (le Moretti et "les filles d'Olfa" d'abord).

  • Aaaah le Moretti. J'ai tant aimé.
    Les filles d'olfa c'est pour bientôt.
    J'ai choisi Master gardener : une épreuve !

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