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AVANT L'AUBE

de Raphaël Jacoulot ***

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Frédéric est un jeune homme en réinsertion. On ne saura pas ce qu'il a fait et là n'est d'ailleurs pas le sujet. Son éducateur lui a trouvé un stage dans un hôtel/restaurant **** en région pyrénéenne, tenu d'une main ferme et stressée (normal c'est Bacri) par Jacques Couvreur. Les repas familiaux ne sont pas détendus chez les Couvreur.

Le père et son unique fils Arnaud déçus l'un par l'autre sont en conflit permanent et face à eux leurs épouses respectives tentent de maintenir le lien. Au lieu de reprendre l'affaire familiale Arnaud a préféré devenir militaire et le père n'a de cesse de lui exprimer sa déception. La vie va basculer le soir où Arnaud renverse en voiture un client de l'hôtel et préfère ne pas s'arrêter... Jacques choisit de cacher l'acte de son fils mais Frédéric surprend les deux hommes alors qu'ils rentrent la voiture endommagée dans le garage. Frédéric et Jacques savent que chacun sait mais se taisent. Tendresse et fascination vont réunir les deux hommes, le patron et l'employé jusqu'à ce que l'enquête policière avance...

C'est toujours facile de parler des films que je n'aime pas. Je me laisse aller et je profère de grosses âneries. Mais parfois défendre un film à ce point formidable me paraît difficile. Etrange non ? car cet "Avant l'aube" est typiquement le genre de films que j'aimerais que tout le monde voit tant il est différent et palpitant. Cela tient à l'ambiance, à la subtilité de la réalisation et à l'interprétation. C'est énorme. L'introverti Frédéric (l'intense et fiévreux Vincent Rottiers qui semble toujours au bord de l'implosion) va peu à peu relever la tête et sans doute croire en l'avenir grâce à son patron sincèrement touché par la loyauté du jeune homme. Est-elle désintéressée ? Peut-être ou peut-être pas. Toujours est-il que le garçon prend de plus en plus de place au sein de la famille et l'on assiste à des scènes d'une cruauté sans nom notamment lorsque Frédéric invité par Jacques à des réunions familiales est, au mieux totalement ignoré par les autres membres, au pire l'objet de remarques désobligeantes, la femme, le fils ou le grand-père ne se gênant pas pour parler de Frédéric en sa présence comme s'il était transparent. Mais Frédéric ne voit que son patron, allant jusqu'à rompre sans explication avec sa petite amie et ses "amis" qu'il se met à trouver ordinaires et sans intérêt. Privé de logement, il s'installe à l'hôtel avec l'accord enthousiaste de Jacques et se met à porter les costumes du fils de famille offerts (à contre coeur) par la mère. Mais ces costumes sont trop grands pour lui, tout comme est trop grande, trop voyante cette nouvelle voiture qu'il s'offre avec son nouveau salaire puisqu'il passe du statut de stagiaire à celui d'employé. Il est évident que dans un premier temps Jacques s'attache à ce garçon chez qui il trouve peut-être les qualités qu'il cherchait chez son fils. Mais la France d'en bas ne peut côtoyer celle d'en haut sans dommages et Raphaël Jacoulot le démontre de façon implacable et avec une certaine maestria.

Si la famille est très perturbée, déstabilisée par les affrontements réguliers entre le père et le fils, elle se trouve miraculeusement re-soudée dès lors qu'il faut faire face à ce qui pourrait entâcher sa réputation voire son train de vie. C'est sinistre, cynique et répugnant cette bourgeoisie compatissante, faussement charitable, toujours encline à ces petites bassesses et mesquineries ordinaires et qui verse des larmes de crocodile sur son propre malheur.

Il est difficile de ne pas penser à Chabrol pour la peinture au vitriol de ces petits bourgeois imbus d'eux-mêmes et condescendants. Mais le réalisateur se démarque néanmoins du maître en osant des hors champs et des élipses où d'autres se seraient sans doute montrés trop explicites. Ce ne sont pas les grands discours ni même l'action qui rendent ce film encore plus intense, mais bien ses silences, les regards que chacun se portent, la façon dont tous s'observent de loin avec hypocrisie ou violence. L'atmosphère hivernale décidément très prisée ces derniers temps est un plus indéniable. C'est fou comme le froid et la neige sont propices et favorables aux polars !

Question casting, je n'ai pas réussi à trancher ; la prestation de Sylvie Testud en fliquette opiniâtre qui se la joue Colombo est-elle horripilante ou adaptée ? Par contre l'insupportable Ludmila Mikaël reste solidement cramponnée à l'unique rôle de sa carrière que je lui connaise : la bourgeoise hautaine, dépassée par les événements et qui souffrotte en soupirant mollement. Au pire des événements, alors que les hommes culpabilisent et ruminent dans leurs coins, sa remarque se limite à : "ce que vous pouvez fumer tous !!!" ; ça en dit long sur la profondeur du rôle. Mais Ludmila excelle. La fadeur faite femme.

Si la confrontation patron/prolo des rôles de Bacri tendu, hésitant et Rottiers avec sa gueule de coupable idéal chemine vers un échec, on ne peut en dire de même de la rencontre des deux acteurs qui impriment au film leur forte personnalité tout en profondeur et subtilité.

Un film à la fois humble et ambitieux. Immanquable.

Commentaires

  • C'est pas assez
    c'est juste
    répugnant

  • j'enlève derechef cet 'assez' (disait la baleine...).

  • A voir donc ! 3 étoiles une étoile de moins que le restaurant hôtel de cette histoire !
    Merci pour ton avis en ce moment j'ai de la peine à me motiver pour le ciné ...
    Bon WE !

  • J'ai hésité sur le nombre d'étoiles.
    Un film à VOIR ABSOLUEMENT. Crois moi. Ce genre de film remotive.

  • Je l'avais raté en ville, il faut dire qu'il est passé à la vitesse de l'éclair, je viens de le rattraper en banlieue .. je savais que j'aimerais, cette atmosphère glaciale, tous ces tournants çà fout déjà les jetons et l'interprétation du jeune Rottier, formidable. Son expression à la fin ! Et oui on sait ce qu'il a fait, tu as mal écouté.

  • Ah bon ? On sait ?
    Dis moi, m'en souviens plus !

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