Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

sami bouajila - Page 2

  • HORS LA LOI de Rachid Bouchareb ***

    19490528_jpg-r_760_x-f_jpg-q_x-20100806_052912.jpg19490529_jpg-r_760_x-f_jpg-q_x-20100806_052912.jpg19490532_jpg-r_760_x-f_jpg-q_x-20100806_052913.jpg19490530_jpg-r_760_x-f_jpg-q_x-20100806_052912.jpg

    Chassée de ses terres par des colons français, une famille algérienne (3 garçons, 2 filles et les parents) s'installe à Sétif. Le 8 mai 1945, la population fête la fin de la guerre et profite de ce rassemblement pour revendiquer l'indépendance de l'Algérie. La manifestation se transforme en massacre lorsqu'un policier tire sur un jeune homme. Le père et les deux filles sont tués lors des émeutes. Abdelkader est emprisonné en France comme opposant politique et s'engagera dans le Front de Libération Nationale (FLN) à sa sortie de prison, l'aîné Messaoud le rejoindra de retour d'Indochine, tandis que le plus jeune Saïd s'installera avec sa mère dans un bidonville de Nanterre (saisissante reconstitution) avant de devenir proxénète à Pigalle puis associé dans une boîte de nuit avant de faire fortune dans les combats de boxe.

    Ce n'est pas une leçon d'histoire que nous donne Rachid Bouchareb mais à travers les difficultés d'une famille marquée et secouée par les événements qui ont jalonné l'histoire de l'Algérie, mais surtout celle des algériens de France, il retrace le destin de trois frères qui avaient comme point d'ancrage l'amour indéfectible de leur mère. Des français de France nous ne verrons que les policiers. C'est donc bien du seul point de vue des algériens que le film se situe. Et c'est passionnant parce que le réalisateur nous détaille trois perspectives, trois façons de choisir ou pas de s'en sortir, trois manières différentes de vivre un engagement ou de décider qu'il faut s'en sortir coûte que coûte.

    Ce cinéma a belle allure, c'est un cinéma ample, lyrique et passionné, ponctué de scènes d'action efficaces et puissantes, d'autres plus intimistes. Rachid Bouchareb est à l'aise dans ces deux extrêmes. Film de gangsters, chronique politique, saga familiale, petite histoire des "petites" gens intégrée dans la Grande, "Hors la loi" est tout ça, c'est-à-dire éminemment populaire au très bon sens du terme, jamais prétentieux ou péremptoire mais toujours sincère et romanesque, donc accessible et captivant.

    Incontestable directeur d'acteurs accompli, Rachid Bouchareb réunit pour la deuxième fois son prestigieux casting quatre étoiles (sauf Samy Nacéri, hélas) d'"Indigènes", qui accomplit cette fois encore des prouesses et des miracles. Il faut dire qu'avec ces quatre là, il joue sur du velours. Sami Bouajila s'est emparé du rôle d'Abdelkader l'activiste forcené prêt à tout sacrifier au FLN même ses frères avec une telle détermination qu'il en fait presque peur. Son investissement est tellement radical qu'il en perd parfois toute humanité. Il ne s'accorde aucun répit dans sa lutte mais c'est pourtant à son grand frère Messaoud qu'il laisse le soin d'accomplir toutes les sales besognes. On ne sait jamais tout à fait si c'est à la cause ou à son frère que ce dernier est le plus dévoué. En tout cas, Roschdy Zem, constamment en lutte contre ses états d'âme et sa mauvaise conscience est un colosse aux pieds d'argile absolument fascinant. Jamel Debouze, toujours meilleur, toujours différent, est Saïd, le petit caïd de Pigalle qui refuse de "faire l'esclave chez Renault" et trouve les combines pour s'en sortir confortablement.

    Evidemment je n'oublie pas Bernard Blancan, ici colonel Faivre de la DST, ancien résistant qui continue après la fin de la guerre à faire son boulot "pour la France". Inflexible mais sûr de son engagement patriotique, il est ce flic appliqué néanmoins capable de respecter et d'admirer son adversaire au point de lui dire qu'ils auraient pu faire partie du même réseau de résistance. A ce titre Sami Bouajila et lui ont l'avantage de partager l'une des plus belles et plus fortes scènes du film. C'est aussi à Bernard que revient la très belle réplique finale au double sens et l'on décèle sous l'apparence imperturbable, l'humanité et la désillusion.

     

    NB : si vous ne l'aviez pas regardée en mai, je vous invite à (re)voir la vidéo de l'interview que Sandra M. avait faite de Bernard Blancan à Cannes, mais surtout à aller voir le film évidemment.

  • La sainte Victoire de François Favrat ***

    La Sainte VictoireLa Sainte Victoire

    Le rêve de Xavier, gosse d'une banlieue du sud de la France, est de devenir "quelqu'un", d'avoir de l'argent et une Rollex (bien avant 50 ans). Malgré ses modestes origines il parvient à devenir architecte et son rêve ultime de réussite est d'obtenir un marché public. Il est persuadé que sa rencontre avec Vincent Cluzel, candidat outsider à la mairie de la ville, vertueux et humain sera le dernier tremplin qui le mènera au sommet. Il devient très proche de cet homme avec qui il devient ami, et finance entièrement la campagne du candidat. Il parvient à mettre en lumière une sombre histoire de magouille qui disqualifie définitivement l'adversaire. Après l'élection remportée, Xavier est persuadé que Vincent va l'aider par recommandation à lui faire obtenir le fameux marché dont il rêve. Mais Vincent est réellement un homme politique honnête qui n'usera pas de son pouvoir pour favoriser ses proches.

    Voilà encore une bien belle surprise en cette bien belle semaine cinématographique ! Un film politique dépourvu de manichéisme où les gentils ne sont pas complètement blancs et les méchants complètement noirs. On découvre (et c'est rare au cinéma) que des hommes et des femmes peuvent s'engager parce qu'ils ont des convictions et un désir réel de vouloir changer les choses ou au moins les faire bouger. On voit des hommes et des femmes francs et honnêtes mais pas naïfs et confrontés à des décisions, des choix. Pour parvenir à un résultat, il faut souvent négocier et consentir quelques compromissions sans pour autant renier ses principes et ses amitiés.

    Tout s'enchaîne parfaitement dans ce film multiple, même si après l'élection, le film politique se transforme davantage en décryptage de la psychologie des personnages. Rythmé et haletant de bout en bout, s'éloignant quelque peu de la résolution et du happy end redouté ce film à la fois divertissant et profond que je recommande sans hésitation est aussi servi par un casting luxueux et brillant. Christian Clavier en politicien de haute moralité est absolument crédible et surprenant, tout en intelligence, finesse et sobriété. Face à lui, Clovis Cornillac, un poil déchaîné est finalement parfait en opportuniste blessé par la vie qui assume sa vulgarité. Mais il y a aussi une nouvelle révélation, Vimala Pons formidable en fille de Christian Clavier qui préfère l'amour à son confort bourgeois et Valérie Benguigui, Marilyne Canto Sami Bouajila militants impliqués et convaincants, et Marianne Denicourt, Michel Aumont, Eric Berger. Il est rare qu'un casting complet soit à ce point d'un niveau aussi élevé !

  • INDIGENES de Rachid Bouchareb ****

     

    indigènes,rachid bouchareb,bernard blancan,samy nacéri,roschy zem,sami bouajila,jamel debbouze,cinéma

     

    - « Ne les appelez pas les indigènes, mon capitaine !

    - Ben, les musulmans alors ?

    - Non, ils n’aiment pas non plus.

    - On doit les appeler comment alors ?

    - Les Hommes mon capitaine !!! ».

    Il y a toujours des scènes ou des répliques chocs dans les films. Ce film est un choc à lui tout seul. Des « africains » se sont engagés pour libérer la France, ici, Rachid Bouchareb s’intéresse aux algériens et aux marocains qui viennent pour la première fois fouler le sol de la « mère patrie », chanter « La Marseillaise » et libérer la France du nazisme. Le périple commence en Italie, se poursuit en Provence pour se terminer dans les Vosges puis en Alsace où quatre hommes résistent en attendant l’arrivée de la troupe… Quatre hommes dans la tourmente, transformés en « chair à canon » destinés à monter à l’assaut en première ligne ! Des hommes qu’on a utilisés, à qui on a menti et qu’on a oubliés.

    Vive la France !

    Rachid Bouchareb souhaite simplement que justice leur soit rendue en leur donnant une place dans les livres d’histoire, c’est peu, c’est énorme. Rendons dès à présent au moins hommage à son très très beau film, vibrant et bouleversant, qui alterne les scènes de bravoure militaire et les moments intimes. Mais ici, une fois encore, les soldats ne meurent pas dans des ralentis esthétisants et déplacés. Les hommes même s’ils sont solidaires et fraternels ne sont pas en colonie de vacances, comme parfois dans certains films, où entre deux combats, ils semblent être dans une fête entre potes. La guerre pue, les hommes crèvent de trouille, le temps s’étire, les injustices pleuvent (permissions pour les « métropolitains » et pas pour les « indigènes » par exemple…). Pratiquement deux ans à libérer un pays qui les ignorera, les rejettera, alors qu’ils se demandent parfois : « qu’est-ce qu’on fout ici mon capitaine ? ».

    Le film est beau, intense, puissant et la dernière demi-heure, beaucoup plus romanesque et spectaculaire est déchirante et bouleversante. Le tout dernier plan, douloureux et poignant vous laisse effondré dans votre fauteuil. Une fois encore, le public ne s’y trompe pas, qui ne peut manifester son adhésion qu’en applaudissant.

    Que dire des interprètes, sinon que Wong Kar Wai et son jury ne se sont pas trompés non plus à Cannes, même si Sami Bouajila me semble dominer cette interprétation sans faille. Il faut dire que son rôle est magnifique, et il est époustouflant d’énergie et d’obstination tranquilles ! De Samy Nacéri se dégage une force intérieure inouïe, une rage contenue impressionnante. Roschdy Zem, à la fois calme et tendu est une sorte de colosse tendre et fragile. Jamel Debbouze fait parler ses yeux comme jamais, prêt à tout pour être aimé et reconnu. Bernard Blancan, déchiré, à la fois brusque et humain est parfait.

    575x385_232035_0_cb0b_ill-816787-indigenes-ter.jpg
    3617491akxnm.jpg

    Une histoire oubliée, voire méconnue, racontée par des acteurs impliqués, concernés, véritablement « habités »…

    faites-leur un triomphe car le film est magnifique !