MA SEMAINE AU CINEMA
LA RÉSURRECTION
The Wrestler de Darren Aronofski****

LE CLANDESTIN
Eden à L'ouest de Costa Gavras ***

L'ANGE

L'OMBRE D'UN DOUTE
Doute de John Patrick Schanley °

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LA RÉSURRECTION
The Wrestler de Darren Aronofski****

LE CLANDESTIN
Eden à L'ouest de Costa Gavras ***

L'ANGE

L'OMBRE D'UN DOUTE
Doute de John Patrick Schanley °



Il y a une vingtaine d’années Randy Robinson dit “le Bélier” était une star du catch. Aujourd’hui, sans un sou, il vit seul dans un mobil home crasseux, abandonné par sa femme et sa fille qui ne veut plus le voir mais avec qui il tentera de renouer une relation. Pour survivre il se produit dans des salles des fêtes minables, signe des autographes, vend des cassettes vidéo de ses combats et trouve des petits boulots mal payés.
Pour ceux qui comme moi n’y connaissent rien (mais vraiment rien de rien) au monde du catch, ils auront la surprise très inattendue de découvrir, et c’est l’aspect documentaire et manifestement documenté du film, que dans les coulisses ces gros bourrins aux muscles hypertrophiés, dopés aux anabolisants et autres substances chimiques qui se distribuent comme des chewing-gums dans les vestiaires, sont des amis mais aussi de gros nounours adorables qui vivent leur passion au-delà des limites, qui chorégraphient et élaborent leurs matches avant d’entrer en scène. Le but est d’en donner toujours plus à un public survolté qui n’en a jamais assez. Le paroxysme est atteint lorsqu’un adversaire propose un combat où les cordes sont remplacées par des barbelés et où l’on peut faire usage d’une agrafeuse !!!
Entre les coups feints, ceux qui portent vraiment, les chairs martyrisées, les doses phénoménales quotidiennes de médicaments… le corps et le cœur en prennent un sacré coup. Ici c’est Mickey Rourke I.M.M.E.N.S.E. qui abandonne son corps au cinéma et l’immole au pied de ce film qui lui doit tout ou presque. Evidemment, le talent, le savoir-faire de Darren Aronoski sont à l’œuvre également. Car il n’a pas son pareil pour nous embarquer dans une histoire et ici nous surprendre par son côté hautement réaliste. Il nous plonge littéralement dans ce monde sinistre, sordide malgré les paillettes de certains costumes sans jamais céder au misérabilisme car ces hommes aiment ce qu’ils font et ne savent d’ailleurs rien faire d’autre.
Le réalisateur n’élude pas l’aspect sentimental de la vie de son héros sans tomber dans un romantisme niais, bien au contraire. Randy essaiera maladroitement, naïvement mais avec une sincérité désarmante de se réconcilier avec sa fille. La scène à Coney Island est à ce titre sublime. Il poursuivra de ses assiduités toutes aussi pures une strip-teaseuse elle aussi fracassée par la vie (Marisa Tomeï dans son énième rôle de brave fille paumée au grand cœur ne m’a pas convaincue mais « énerve » beaucoup les garçons…). Mais c’est le ring, les cordes et les combats qui restent sa raison de vivre.
Revenons-en à Mickey Rourke ! Je m’étais promis de ne pas faire de parallèle entre le personnage qu’il interprète et ce que tout le monde connaît de sa vraie vie de bad boy, mais il est vrai que la frontière semble tellement mince entre les deux que je suis bien obligée de me résoudre à reconnaître que les deux semblent se confondre parfois. Cela n’empêche nullement Mickey Rourke, ex star sexy glamour des années 80 devenue has-been et indésirable par son acharnement à se détruire, de réussir ici le tour de force de nous émouvoir pendant 1 h 45 sans jamais nous appitoyer. Sa performance d’acteur digne, sensible, chaleureuse, humaine, douce, intelligente, d’une retenue exemplaire où on aurait pu craindre excès et cabotinage est ce qu’il m’a été donné de plus beau et admirable à voir au cinéma depuis longtemps. Sous la longue tignasse filasse jaunâtre dont il soigne particulièrement les racines, le visage presque méconnaissable où l’on retrouve néanmoins encore le doux regard d’ex séducteur sous les traits boursouflés et dans ce corps massif, puissant qui perd peu à peu de sa vigueur, le rare sourire, les larmes de Mickey Rourke sont bouleversants.
Darren Aronofski conclut son film et nous laisse comme son héros, en apesanteur.
Mais K.O.
Ils ont tous un point commun...
I

II

III

IV

V

VI

il n'y aura pas de nouveau film avant plusieurs jours, voici votre petit jeu préféré pour ne pas que vous vous ennuyiez.
De quels films sont extraits ces morceaux d'affiches ?
I

II

III

IV

V

VI

VII

VIII



Elias vient de l’Est après un voyage dans un rafiot plein d’émigrés comme lui. Pour échapper à la police il plonge et parvient à la nage sur les côtes italiennes dans un club de luxe entouré de barbelés qui propose comme activité à ses riches résidents la chasse nocturne aux clandestins.
A pied ou en stop, nous suivons le périple d’Elias du sud de l’Italie jusqu’à Paris où il rêve de rejoindre un magicien peu scrupuleux qui lui a fait miroiter un avenir. A cause de, ou plutôt grâce à son irrésistible beauté et à sa grande naïveté, Elias franchira les épreuves et les étapes de ce parcours, toujours entièrement prêt (ou presque) à mettre ses charmes à disposition. Hommes, femmes et enfants tombent immédiatement sous le charme de ce beau jeune homme. La beauté aide manifestement à s’en sortir. Il quittera les bras d’une belle allemande en quête de sensations exotiques pour suivre un temps un illusionniste, faire un bout de route avec deux routiers sympas et « gays » dont il repoussera les avances, un couple de suisses en pleine scène de ménage l’abandonnera en pleine montagne, il s’échappera de chez une paysanne solitaire pas à son goût pour satisfaire son appétit sexuel, il devra semer la police et fera également une halte dans une usine qui exploite les émigrés…
Il est difficile de reconnaître le style de Costa-Gavras qui nous avait habitués à des charges politiques très sombres et très virulentes. On se demande même s’il ne va pas tenter à la fin de nous faire croire au Père Noël… mais non, quand même pas. Cela dit les aventures picaresques, mouvementées et ensoleillées la plupart du temps d’Elias sont une vraie bonne surprise et il fallait beaucoup de talent pour nous faire vivre à la manière d’une fable à la fois humaniste et humoristique l’itinéraire d’un émigré clandestin. Les aspects plus rugueux comme l’exploitation, l’indifférence ou l’humanisme intéressé ne sont pas éludés mais la plupart du temps traités sur le ton de la comédie. On ne saura jamais d’où vient Elias car le but est sans doute d’en faire un déraciné universel comme le dit lui-même le réalisateur.
"Eden à l'Ouest tente de faire écho au parcours, à l'errance, à l'histoire de ceux - hier ce fut nous-mêmes ou nos pères et mères - qui traversent la terre, bravent les océans et les uniformes à la recherche d'un toit. L'histoire d'Elias n'est pas celle d'Ulysse, ni celle de Jean-Claude, ni la mienne. Mais je me reconnais dans Elias, cet étranger qui ne m'est pas étranger..."
La désarmante fraîcheur de Riccardo Scamarcio dans le rôle d’Elias est pour beaucoup dans la réussite totale et l’immense plaisir qu’on prend à ce film. Dans un rôle quasiment muet, on ne peut que reconnaître à quel point l’acteur évoque Charlie Chaplin ou Buster Keaton tant son physique, son visage et ses yeux n’ont besoin d’aucun mot pour exprimer tous les sentiments et sensations qui traversent son personnage. Il est de quasiment tous les plans, époustouflant et porte le film.

de François Ozon **

avec Alexandra Lamy, Sergi Lopez, Mélusine Mayance


Au milieu des années 60 dans le Bronx, la directrice d’une école catholique Sœur Aloysius soupçonne et accuse le Père Flynn de pédophilie sur un élève noir de 12 ans.
Les discussions interminables sur la foi, l’engagement, la morale, la confession, le pardon, la rumeur s’enflamment. La mère supérieure s’acharne sans preuve réelle à établir la culpabilité du prêtre qui se défend parfois mollement, parfois avec ambiguïté. Philip Seymour Hoffamn joue de son physique et de sa personnalité qu’il peut rendre tour à tour séduisants ou inquiétants. Méryl Streep, sévère, rigide raide dans sa soutane multiple les 24 rictus secondes. Tous deux finissent par éructer, des larmes plein les yeux, Amy Adams disparaît sous la coiffe de Sœur James en pleurnichant beaucoup et la mère du jeune garçon qui l’a peut-être bien cherché pleure aussi en avalant trois kilos de morve.
Coupable, pas coupable, doute ou pas : on se fiche de ce film qui sent la boule à mites...
Si les Oscars se méritent au nombre de litres de larmes versées, les trois acteurs principaux l’emportent haut la main.
Vous me pardonnerez, je profite du fait que des réalisateurs passent parfois ici pour me permettre une annonce personnelle.
P.S. : propriétaire du blog surlarouteducinema.com , passionnée de cinéma depuis avant « La Grande Vadrouille », n’ayant aucun talent pour la comédie, aucun humour mais souffrant de conjonctivite chronique (se réveillant parfois le matin avec des yeux plus rouges qu’un lapin russe albinos) cherche emploi de pleureuse à Hollywood (ÉCONOMIE DE MAQUILLAGE GARANTIE !).
Une nouvelle fois ALLOCINE me permet d’offrir une invitation pour deux personnes qui aura lieu à Paris à partir de 19 h 30 au Forum des Images :
Le mercredi 25 février.
Il s’agit de la troisième édition de la soirée « AlloCiné Family & Friends » avec au programme :

Pour gagner cette invitation, il vous faut répondre à cette question simple.
Vous constaterez que je reste très « in the mood » en vous demandant :
Quel est le réalisateur ayant reçu une Palme d’Or à Cannes a également reçu le Grand Prix du Festival International du Premier d’Annonay (ce qu’il oublie toujours élégamment de préciser dans ces CV…) ?
Question subsidiaire : serai-je à cette soirée ?
THOMAS de Miika Soini *****
Finlande
Thomas est un vieil homme de 83 ans. Il vit (très) seul dans un minuscule appartement ni vraiment au rez-de-chaussée ni vraiment au sous-sol. Un petit soupirail par lequel il accède en grimpant sur une caisse en bois lui offre un peu de lumière et lui permet d’observer les mouvements de sa rue très en pente. Parfois il se risque à l’extérieur pour une promenade qui lui donne immédiatement envie de rentrer chez lui retrouver son quotidien monacal entre son jeu d’échecs, la radio qui ne diffuse que de la musique classique et une photo de sa femme.
Immobile et silencieux, mélancolique et pas très sympathique, un peu absent au monde, c’est grâce à une rencontre inattendue dans un parc où il se promène parfois que Thomas va trouver un sens, l’explication, la reconnaissance de toute son existence et peut-être enfin la paix avec lui-même et ce monde qui l'a exclu...
Comment vous parler de « Thomas » que peut-être vous ne verrez pas alors qu’il représente pour moi 1 heure et 10 minutes de cinéma parmi les plus vibrantes que j’ai vues dans ce Festival pour ne pas dire 1 heure et 10 minutes de cinéma essentiel ? Car oui, c’est un film qui va à l’essentiel en prenant néanmoins le temps de s’attarder sans jamais s’apesantir. Un miracle de tous les instants, d’une profondeur insensée, où tout s’éclaire peu à peu, où toutes les révélations finales expliquent et justifient la moindre scène, le moindre comportement depuis le début. Un cinéma lumineux où tout se justifie sans peser jamais, de la musique la plus troublante (Mozart) au silence parfait jusqu’au moindre dialogue anodin qui finit par se révéler déterminant.
Dès l’ouverture du film, on est embarqué et surpris sans jamais être manipulé. Un vieil homme ronchon en reçoit un autre. On sait, en ayant lu le sinopsis qu’il n’en restera qu’un puisqu’on s'attend à suivre l’histoire d’un vieillard seul. Et dès les premières minutes, on est cueilli avec délice car celui qui reste n’est pas celui qu’on attendait. On retrouve donc Thomas à l’enterrement de son frère et l’on rit, comme il arrive parfois aux enterrements. Les surprises ne cesseront jamais dans ce film qui réussit l’exploit d’être à la fois contemplatif et de nous emballer par une histoire, celle de Thomas, dont on VEUT connaître l’issue et l’origine. Par petites scènes cocasses, pitoyables, bouleversantes, pathétiques… (il faudrait TOUTES les citer, ne pas en exclure une seule pour être juste et équitable) le réalisateur colle aux basques de Thomas (même les chaussures ont un « rôle » comique) et nous laisse avec le souvenir inoubliable d’un film, d’un personnage, d’un rôle et d’un acteur hors du commun.
Gloire aux réalisateurs, de plus en plus rares, qui « posent » leur caméra pour nous raconter une histoire, qui ne poursuivent pas systématiquement leurs acteurs caméra à l’épaule (cela dit Thomas ne va plus très vite mais il marche toujours…) nous donnant des vertiges injustifiés. Ici, tout est calme et mesuré sans que cela nous empêche d’apprécier peu à peu l’ampleur de la tempête qui se joue sous le crâne de « Thomas » et le ronge. Cela donne lieu à des plans d’une beauté rare, à tomber, où tout est parfait, le cadre, la lumière, la durée. Chaque scène est un tableau dans lequel Thomas peut évoluer et se déplacer.
Thomas c’est aussi un acteur, Lasse Pöysti, une légende vivante en Finlande qui continue d’avoir des projets malgré son grand âge. Il offre à ce rôle sa lourde stature fatiguée et son visage, incroyable masque impassible qui allie comédie et tragédie.
Gloire également au jury qui a décerné à ce film « Le prix spécial » et surtout au jury des lycéens qui ne se sont pas laisser piéger par d’autres oeuvres plus faciles ou racolleuses et ont accordé leurs voix à « Thomas » malgré les décennies qui les séparent de ce vieil homme et pour un film qui parle de vieillesse, de solitude, de compassion mais surtout comme le revendique sans relâche Miika Soini : d’amour, dont la plus grande preuve reste pour lui de laisser « partir » ceux qu’on aime. Deux tomates d’or pour ce film, c’était le moins.
Vous l’avez compris Miika n’est donc pas que ce beau jeune homme, sympathique, intelligent, drôle, merveilleux, attirant, chaleureux, charmant, gentil, ouvert, étonnant, spirituel… AIMABLE… c’est aussi un cinéaste. Après avoir été serrurier… il a fait du théâtre pendant des années en Finlande. Il est devenu acteur, mais il souhaitait tout maîtriser. Il a donc d’abord mis en scène des pièces de théâtre et intégré une école nationale de cinéma. Il est très fier d’avoir pu tourner son film « Thomas » en 10 jours avec un budget d’à peine 200 000 €uros. L'histoire est issue d’un recueil de nouvelles qui traitent de la vieillesse et dont il a écrit le scénario. Miika a tenu à plusieurs reprises à insister sur son empathie avec les personnes âgées dans un pays, la Finlande, où une personne de plus de 65 ans sur 2 se suicide…
Ce film est inoubliable et Miika Soini peut en être fier car c’est bien le cinéma qui coule dans ses veines.
THE SHAFT de Zhang Chi ****
Chine.
Dans un petit village de la Chine Occidentale un mineur vieillissant s’approche de la retraite. Avec la modeste somme qui lui est allouée après 40 ans d’un travail accablant, il part à la recherche de sa femme disparue. Sa fille amoureuse fera un mariage de raison pour sortir de sa condition toute tracée d’ouvrière et son fils fait l’école buissonnière et rêve de devenir chanteur.
Par ce film tout en finesse, en douceur et en subtilité, le réalisateur s’applique à démontrer la diversité de la Chine et surtout l’écart phénoménal entre le développement prodigieux de l’ouest et le sud quasi sous-développé. Pour avoir passé trois mois en compagnie de ces mineurs aux conditions de travail moyen-âgeuses et à la pauvreté écrasante il peut affirmer que tous, sans exception n’ont qu’une idée en tête : PARTIR, s’enfuir. Pour les jeunes, le choix est restreint. S’ils réussissent dans leurs études ils tentent d’intégrer les prestigieuses écoles de Pékin dans lesquelles il semble vraiment difficile d’entrer. Les filles peuvent espérer se marier avec un « beau parti » pour échapper à cette vie de misère. Ce sera le cas ici où la fille du mineur épousera un homme manifestement beaucoup plus âgé. Elle fondera une famille, totalement résignée à son sort.
Toujours reliés au reste du monde par l’écran de télévision, les personnages voient leurs rêves s’écraser un à un face aux réalités, à l’adversité et au manque de moyens. Pour le fils, c’est par une participation à un karaoké dans une scène à la fois burlesque et bouleversante qu’il verra son rêve s’effondrer. Quant au père, on le verra partir et le plan qui l’accompagne est d’une beauté saisissante, symbolique des méandres qu’emprunte parfois la vie d’un homme.
Aucun misérabilisme ni tentative d’apitoiement sur le sort des personnages et la monotonie de leur quotidien ne sont à déplorer ici. C’est au contraire avec une grande intelligence, beaucoup de délicatesse, d’élégance et des images superbes plus évocatrices que bien des discours que Zhang Shi raconte les désillusions de cette famille.
Le réalisateur a mis 5 ans à financer son film, hypothéquant son appartement pour y parvenir. En Chine, seuls rois réalisateurs sont connus et obtiennent des financements. C’est aussi grâce à sa participation dans un film qui a obtenu un prix qu’il a pu réaliser celui-ci. Heureusement.
CONTINENTAL, UN FILM SANS FUSIL de Stéphane Lafleur***
Québec
Il fait nuit, un homme descend d’un bus et s’enfonce dans une forêt. On ne le reverra plus. Sa femme s’inquiètera de sa disparition auprès de la police qui lui rira plus ou moins au nez. Un homme démarre un nouveau travail d’agent d’assurances et peine à trouver des arguments pour placer des contrats. Loin de chez lui, il devra également soutenir par téléphone interposé une grande scène de ménage avec sa femme qui lui reproche son absence. Une jeune femme travaille de nuit à la réception d’un hôtel, elle rêve d’avoir un enfant mais ne trouve pas le père convenable. Un homme d’une soixantaine d’années accro aux jeux a été quitté par sa femme, il tente de la reconquérir mais avant souhaite s’offrir un nouveau sourire grâce à une chirurgie dentaire.
Nous suivons pendant 1 heure 45 le destin sans beaucoup de joie de ces héros ordinaires. Le premier talent du réalisateur est de n’en perdre aucun en route, de les coller au plus près, de faire qu’on s’y attache et de parfois un court instant faire croiser leurs chemins. Le film est moins mystérieux et énigmatique que son beau titre, mais c’est effectivement un film sans fusil où les personnages accablés de solitude sans l’exprimer jamais vraiment, semblent ne même plus avoir la force et l’énergie nécessaires pour hurler l’amour dont ils sont emplis. L’humanité, la compassion et l’empathie s’échappent de chaque scène sans qu’à aucun moment on ne soit tenté de céder à un sentiment plus mesquin telle que la pitié. C’est l’autre grand miracle de ce film de faire de ces êtres touchants et vulnérables des hommes et des femmes qu’on aime sans les plaindre, qu’on aimerait aider ou prendre dans les bras. Un film qui révèle sa propre part d’humanité. Le dernier prodige et pas le plus négligeable de Stéphane Lafleur est évidemment de nous faire rire franchement aux déboires, au parcours de ces anti-héros « ben » ordinaires. On rit effectivement beaucoup sans se moquer car chacun peut se retrouver et reconnaître les petites tentatives ridicules que l’on déploie parfois pour être aimé. Les 4 acteurs/héros principaux n’ont pas leur pareil pour passer du tragique au comique dans la même scène avec ces petits riens burlesques, bizarres ou absurdes qui rendent la vie plus supportable parfois.
Une belle part de vie, d’humour et d’humanité pour un beau film empli de douloureuse solitude.
L’acteur canadien Gilbert Sicotte (il jouait dans « Mesrine : l’instinct de mort ») était présent et reconnaît que le fait de jouer dans des premiers films fait toujours évoluer un acteur.
Voir des premiers films est aussi une expérience qui fait redécouvrir le cinéma parfois, encore et encore. Merci.