Laura rêve du Prince Charmant. Elle croit aux signes, au destin, aux voyantes. Ses parents vivent dans un chateau. Un jour le Prince lui apparaît en la personne de Sandro, compositeur bègue discret et maladroit. Autour des deux tourtereaux que des événements hostiles vont contrarier, gravite tout un ensemble de personnages plus ou moins proches des contes de l'enfance. Une marraine extravagante qui rêve d'indépendance, de devenir comédienne et organise en attendant mieux des spectacles pour enfants, un grand méchant loup charismatique, froid et manipulateur, une femme qui refuse de vieillir, interroge régulièrement son miroir et multiplie les interventions de chirurgie esthétique, et puis des amis, des parents, des maris, des femmes, des amants...
Bacri et Jaoui de retour au scenario et aux dialogues, c'est une excellente nouvelle et le résultat est à la mesure des espérances. D'autant qu'Agnès Jaoui à la réalisation multiplie les trouvailles de casting (Benjamin Biolay en Wolf, c'est idéal), de mise en scène et filme un Paris idyllique de conte de fées et parsème son film de références jusque dans les enseignes de magasins, le nom des personnages. L'histoire des amoureux est charmante et drôle. Ils se rencontrent au Bal des Princes et non au Bal des Débutantes. Et c'est davantage la fille, plus entreprenante, plus sûre de son pouvoir qui fait office de Prince Charmant. En périphérie de leur histoire évoluent une amie discrète, délaissée et amoureuse en cachette, un ami trahi, digne et généreux. Et en père du Prince Charmant, un homme qui ne voulait pas d'enfant, qui ne croit en rien et va finalement s'affaiblir, troublé par la prédiction d'une voyante 40 ans plus tôt qui lui avait annoncé la date de sa mort...
Et là, nous assistons à un festival Jean-Pierre Bacri, Jean-Pierre chez le psy, Jean-Pierre et les femmes, Jean-Pierre et les enfants, Jean-Pierre aux fiançailles de son fils, Jean-Pierre moniteur d'auto-école... Les tirades et répliques de cet acteur génial devraient être cultes. Son éloge de la solitude "pas de négociation, pas de bruit", sa façon de jeter un os à une petite fille pour qu'elle lui rapporte "les enfants c'est chiant, vus à plat", sont de grands moments. Et finalement, (attention spoilage... clic gauche sur la souris pour visualiser) Jean-Pierre qui fond en larmes dans les bras de son fils...
Jaoui et Bacri, plus tout jeunes, ratissent large et visent juste. Le rôle des parents, leur place, leur disparition, la place des enfants, les relations des uns avec les autres, la peur de vieillir, de mourir, une vision un peu sombre de l'amour "la fidélité n'est qu'un mot", le tout enrobé d'infiniment de douceur et d'une mélancolie nouvelle. Pas de cynisme, pas de noirceur absolue, juste la vie qui va ! Un beau film avec de beaux acteurs aimés par leur réalisatrice.
Agathe Bonitzer, Nina Meurisse, jeunes femmes, jeunes actrices sont parfaites.