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cinéma - Page 212

  • MY WEEK WITH MARILYN de Simon Curtis **

    My Week with Marilyn : photo Michelle WilliamsMy Week with Marilyn : photo Dougray Scott, Michelle Williamsmy week with marilyn de simon curtis,cinéma,michelle williams,eddie redmayne,julia ormond,kenneth brannagh

    Au sommet de sa gloire, Marilyn Monroe débarque en 1956 en Angleterre pour tourner sous la direction et au côté de Laurence Olivier Le Prince et la Danseuse. Tout récemment mariée à l'écrivain Arthur Miller, Marilyn est la proie de nombreux démons qui la fragilisent. Ses addictions, ses retards, ses caprices et son total manque de confiance en elle face à ces acteurs anglais qu'elle admire, font du tournage un cauchemar. Colin Clark jeune aristocrate fraîchement diplômé et promis à un brillant avenir ne rêve que de cinéma. A force d'obstination, il réussit à se faire embaucher sur le tournage du film en tant que 3ème assistant réalisateur. Il devient le confident de Marilyn et racontera plus tard dans un livre cette semaine auprès de la star et leur éventuelle idylle platonique.

    Pour qui connaît un peu la vie de Marilyn, la seule information sera ici de découvrir qu'elle aurait eu une aventure avec ce troisième assistant tombé instantanément (et comme tout le monde) sous le charme. Il faut dire qu'elle était irrésistible et parvenait à manipuler ceux qui l'entouraient avec la plus parfaite innocence. Même si Laurence Olivier (Kenneth Brannagh) affirme "ne te laisse pas avoir par ses airs de petites filles !", il reconnaît plus tard lui-même quelle magicienne elle est. Dès qu'elle apparaît, sa joie ou sa tristesse vampirise tout autour d'elle. Elle est le centre de toutes les attentions, de tous les regards. Et pourtant, personne ne parvient à la rassurer. Pas même Paula Strasberg, son "coach" aussi inutile qu'envahissant qui ne faisait que lui répéter à quel point elle était belle et unique sans jamais réussir à la convaincre de son talent. La présence de cette femme au côté de la star est une aberration pour les anglais qui ne comprennent rien à la fameuse méthode de l'Actors Studio.

    La bluette entre Colin Clark et Marilyn est insignifiante et anecdotique. Par contre, dès que le réalisateur se concentre sur le tournage du film dans le film, il devient beaucoup plus passionnant. Ainsi que lorsqu'il démontre à quel point la vie de Marilyn a pu être un enfer car la moindre de ses apparitions provoquait une émeute ou un attroupement. Délaissée par Arthur Miller qui commençait déjà à comprendre qu'elle ne lui laisserait plus un instant de répit, Marilyn est perdue et prête à se tourner vers le premier venu qui lui prodiguera attention et tendresse. C'est ce pauvre Colin qui s'y colle et en aura le coeur brisé. Mais apaisée provisoirement, Marilyn accomplira des prouesses, révélant quelle reine de comédie elle était. Finalement, Laurence Olivier et elle s'admirent réciproquement, sont fascinés par ce que l'autre possède ou représente. Le grand acteur rêve d'être une star tandis que la star brûle que soient reconnus enfin ses talents d'actrice. Hélas, malgré quelques beaux moments, le film finit par tourner en rond autour des retards et de la somnolence de Marilyn due à sa consommation d'alcool et de médicaments...

    Aucun reproche à faire à Michelle Williams qui n'a bien sûr pas l'aura de son modèle, mais quelque chose en elle de blessé qui la rend triste même quand elle sourit. Bravo encore à l'actrice pour sa sobre interprétation. A aucun moment elle ne force le trait ni n'insiste dans les mimiques, les clins d'oeil ou les sourires ! S'attaquer simplement à un tel mythe relève de la performance.

  • LA TERRE OUTRAGÉE de Michale Boganim ***

    La Terre outragée : photoLa Terre outragée : photoLa Terre outragée : photo Olga Kurylenko

    Piotr et Anya s'aiment et se marient. C'est la fête même si des pluies torrentielles s'abattent étrangement en cette journée de printemps. Le même jour Valéry plante un arbre en compagnie de son père adoré. Et puis Piotr, pompier, doit quitter la fête pour éteindre un incendie. Il ne revient pas, il ne reviendra jamais. Anya d'abord fâchée et déçue, s'inquiète. Et n'obtiendra pour explication à l'hôpital que : "vous ne pouvez plus revoir votre mari, ce n'est plus un être humain c'est une bombe". Cela se passe le 26 avril 1986 à Pripyat et l'incendie pour lequel Piotr a été réquisitionné est celui de la centrale de Tchernobyl situé à trois kilomètres.

    10 ans plus tard curieusement, Anya exerce un étrange métier. Elle est guide touristique sur les lieux mêmes de la tragédie. Et la première stupeur est de réaliser, d'apprendre qu'il existe des Tours Operator et plus encore des touristes de tout pays qui payent des sommes invraisemblables pour aller visiter l'endroit. Pour quelles raisons ? Se repaître d'un malheur qui ne les a pas atteint ? Faire fonctionner à plein une pseudo compassion ? Mais aussi poser des questions idiotes, toujours les mêmes, s'attendre à rencontrer des monstres à trois têtes ! Ecoeurant ou humain ? La réalisatrice ne tranche pas, elle observe. La déception doit être de taille  pour ces étranges touristes qui visitent, et le spectateur en même temps, une ville et le site même de la centrale laissés en l'état, à l'abandon. Et Anya ressasse le même discours. Pripyat était une ville modèle avec des cinémas, des théâtres, un avenir. Le 1er mai devait même être inauguré un parc de loisirs. Mais la grande roue restera désespérément immobile. Elle insiste encore pour expliquer que le dérèglement climatique intervenu dès les premiers instants de la catastrophe et ces pluies incessantes inhabituelles ont fixé l'irradiation dans le sol même. Tout cela sans aucun effet spécial, rien que par les mots. L'imagination se charge du reste. Nul besoin d'images !

    Michale Boganim est la première semble t'il à parler au travers d'une fiction de cet événement extra-ordinaire, cet "accident" nucléaire le plus grave répertorié jusqu'à présent. Pas d'images spectaculaires de la catastrophe en elle-même. Juste cette pluie mortifère que rien n'arrête. Et pourtant la réalisatrice a pu tourner à Pripyat, cette ville devenue fantôme et située à 3 kms de la fameuse centrale Lénine. On peut dire que pudeur et retenue sont les maîtres mots de Michale Boganim qui ne fait "que" constater l'étendue des dégâts, l'horreur inadmissible du silence des autorités qui n'ont commencé à prévenir et évacuer la population que 30 heures après la catastrophe. Elle s'attarde sur trois destins particuliers. Celui d'un garçon, Valéry, devenu grand, à la recherche de son père ingénieur qui a préféré disparaître plutôt que de s'associer au silence de sa hiérarchie. La scène où il achète tout un stock de parapluies et les distribue au hasard est déchirante car le geste est bien dérisoire en comparaison du désastre. Un garde forestier continue de planter et de vivre de ses fruits et légumes issus de cette terre empoisonnée. Et surtout, elle s'attache aux pas d'Anya, à la fois perdue et enracinée. Anya se partage entre deux amants. l'un français qui pourrait l'éloigner du chaos, l'autre de Pripyat comme elle qui la ramène toujours inéxorablement vers ses souvenirs, alors que tous savent que la mort accomplit sa besogne de façon implacable. Olga Kurylenko est merveilleuse, touchante, obstinée !

  • CLAUDE MILLER

    20.02.1942 – 4.04.2012 

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    Je suis triste. Claude Miller fait partie des GRANDS réalisateurs français qui ont marqué ma cinéphilie à tout jamais alors que j’étais encore toute jeunette. Au même titre que Truffaut et Sautet par exemple. Il faisait accomplir des miracles à ses acteurs et nous racontait des histoires d’une profondeur inouïe, inoubliables !

    Dans La Meilleure façon de marcher, on découvrait un Patrick Dewaere sadique parce troublé par un sublime Patrick Bouchitey. Dans Dites lui que je l’aime, Gérard Depardieu devenait fou d’amour pour une étrange mariée interprétée par une actrice magnifique Dominique Laffin morte à 30 ans (dont je découvre aujourd’hui qu’elle est la mère de Clémentine Autain). Je ne me lasse du face à face de Lino Ventura et Michel Serrault et de leurs dialogues merveilleux de Garde à vue. Michel Serrault encore et Isabelle Adjani me bouleversent dans Mortelle randonnée. Et la réplique « t’es toujours là mon vieux ? » me hante depuis 30 ans… C’est encore Claude Miller qui nous a offert de découvrir Charlotte Gainsbourg dans l’Effrontée et la Petite Voleuse.

    Un (quasi) sans faute pour une belle et abondante filmographie : l'Accompagnatrice , le Sourire, La Classe de neige, la Chambre des Magiciennes, Betty Fisher et autres histoires, La petite Lili, Marching Band, Je suis heureuse que ma mère soit vivante... et les articles sur ce blog à propos de Voyez comme ils dansent et Un secret,

  • J'AI VU MAIS

    je n'ai absolument pas le temps de vous décortiquer l'affaire :

    WELCOME IN VIENNA de Axel Corti ***

    Une trilogie absolument incroyable qui présente la troisième guerre mondiale sans la montrer jamais. Du seul point de vue de civils, juifs allemands, pris dans la tourmente. Jamais chez eux où qu'ils soient, où qu'ils aillent... Terrible, fort, bouleversant ! Le format (écran carré), le noir et blanc et les inserts de véritables documents d'époque font de ces trois films un document unique. 

    PARTIE 1 : DIEU NE CROIT PLUS EN NOUS

    Welcome in Vienna - Partie 1 : Dieu ne croit plus en nous : photo
     

    Synopsis : Vienne 1938 : après la Nuit de Cristal et le meurtre de son père par les nazis, Ferry Tobler, un adolescent juif, fuit l'Autriche. Avec un laissez-passer difficilement acquis, il échoue à Prague. Là, Il y fait la connaissance de Gandhi, soldat allemand anti-nazi échappé de Dachau, et d'Alena, une tchèque chargée d'assister les réfugiés. Ensemble et avec d'autres immigrants juifs, ils parviennent jusqu'à Paris. Mais, sans papiers, ils sont arrêtés et internés par les autorités françaises dans le camp de rétention de Saint-Just-en-Chaussée. Profitant du chaos qui suit l'invasion allemande, ils s'échappent et tentent de rejoindre Marseille dans l'espoir de s'embarquer pour les Etats-Unis. 

    PARTIE II : SANTA FEE

    Welcome in Vienna - Partie 2 : Santa Fe : photo

    Synopsis : New York 1940 : le Tonka arrive avec à son bord nombre de réfugiés épuisés. Parmi eux, Ferry Tobler, embarqué à Marseille après avoir fui l'Autriche, et Freddy Wolff, un jeune compatriote. L’entrée en Amérique est problématique pour tous ces émigrants sans papiers. L’accueil des rescapés du nazisme est loin d’être facilité par les autorités américaines.

    Ferry Tobler se noie accidentellement en tentant de secourir une jeune femme, qui a tenté de rejoindre les quais à la nage afin d’échapper aux contrôles des services d’immigration. Freddy Wolff rêve d’un nouveau départ dans le mythique Far West. Mais en réalité, il se retrouve confronté à l’isolement intense de la vie d’immigré sans ressources. Au sein de sa communauté, il sympathise avec Popper, photographe de talent réduit à la photo d’identité. Il trouve un travail de vendeur dans une delicatessen, et noue une relation amoureuse avec la fille de son patron. Freddy rêve de l’emmener à Santa Fe.

    Mais sa position, comme celle de ses semblables, est vite intenable : naguère persécuté en Autriche en tant que juif, puis stigmatisé comme immigré à New York, il est bientôt assimilé à l’ennemi allemand dès l’entrée en guerre des Etats-Unis. Il décide alors de s’engager dans l’armée américaine pour regagner l’Europe et combattre le nazisme.
     
     
    PARTIE III : WELCOME IN VIENNA
    Welcome in Vienna - Partie 3 : Welcome in Vienna : photo
     
    Synopsis : 1945, à Vienne, la guerre est terminée. Freddy Wolff et Georges Adler, émigrés aux Etats-Unis mais d’origine autrichienne et allemande, sont devenus soldats de l’armée américaine. Vienne est en ruines et divisée en quatre zones, le marché noir y règne en maitre. L’Autriche se présente comme une victime innocente du nazisme et refuse d’en prendre conscience. Les gens s’adaptent tant bien que mal au système sauf Freddy qui refuse l’hypocrisie générale et souffre malgré tout de son amour pour la jeune actrice Claudia.
  • TORPEDO de Matthieu Donck **

    Torpédo : photo Matthieu DonckTorpédo : photo Matthieu DonckTorpédo : photo Matthieu Donck

    Pour comprendre le titre, il faut avoir un minimum de belgitude au fond de soi. Heureusement le réalisateur l'explique : "En Belgique, le terme Torpédo désigne un rétropédalage et c’est aussi le tout premier vélo pour beaucoup de Belges." Et comme le dit le personnage principal Michel Ressac : "le vélo, c'est comme la vie (ou l'inverse) si tu n'avances plus, tu tombes."

    Il y a longtemps que l'on sait que les belges ne sont pas comme nous, différents ! Ce film le confirme une fois de plus avec bonheur. Michel Ressac donc, loser professionnel, est réveillé par la sonnerie du téléphone. Il apprend qu'il fait partie des concurrents qui ont gagné la possibilité de tourner la roue du bonheur et de partager un repas avec Eddy Merckx (oui oui, le vrai !). Pour cela, il doit se rendre au magasin "SofaLife" de sa ville en compagnie de sa famille. Michel saute de joie car son père qui ne lui a plus parlé depuis des années a toujours été fan du champion cycliste et il souhaite lui offrir cette soirée de rêve en signe de réconciliation ! Sauf que Michel comprend qu'il a gagné sans aucune condition, mais surtout le problème est que Michel est célibataire et sans enfant. Qu'à cela ne tienne, il embarque dans son camping-car une ancienne petite amie, un gamin de 10 ans malmené par sa famille d'accueil et au passage kidnappe aussi le responsable du magasin de meubles qui ne lui a pas donné la possibilité de faire tourner la roue. Direction la Bretagne où le prochain tirage au sort doit avoir lieu.

    Le road-movie est l'occasion idéale de faire évoluer les personnages, de leur permettre de faire des rencontres sans qu'elles aient l'air d'être parachutées sans liens et de faire progresser une histoire. C'est ainsi que ce film sans prétention tient la route en faisant finalement un peu du sur-place ou en tournant en rond. Michel Ressac est rêveur, naïf, gentil, idéaliste, farfelu, et François Damiens livre une nouvelle composition très belge complètement craquante. Autour de lui, il y a un petit garçon impoli, sans-gêne que la vie n'a jusque là pas ménagé. Christian Charmetant est formidable en vendeur de meubles et Audrey Dana impeccable, tous deux chahutés par l'existence également. Mais François Damiens concentre toute l'attention sur lui. Ce type n'a jamais l'air de jouer. Tout ce film ressemble à une immense improvisation où l'acteur laisse libre court à sa fantaisie et son naturel impressionnants. Son merveilleux accent ajoute encore à la spontanéité et l'innocence du personnage. Rire beaucoup n'empêche nullement quelques moments pas loin de piquer les yeux, car ce garçon sait comme personne terminer un sourire par un rictus et un regard qui peu à peu se trouble et s'embue.

    Un film sympathique et tendre avec un acteur étonnant.

  • ALOÏS NEBEL de Tomás Lunák *

    Aloïs Nebel : photoAloïs Nebel : photoAloïs Nebel : photoAloïs Nebel chef de la minuscule gare de Billy Potok en Tchéchoslovaquie est un homme sombre et peu bavard d'une cinquantaine d'années. Il accomplit avec conscience son travail lorsque passent de rares trains dans cette région somptueuse mais oubliée. Seul son chat retient son attention. La nuit, les mêmes cauchemars viennent le hanter. Ils le ramènent une quarantaine d'années en arrière lorsqu'il était un petit garçon témoin de quelques horreurs de guerre. Un mystérieux homme muet, proche de son histoire, va également raviver ces souvenirs enfuis qui peuplent ses rêves. Plus tard, devenu SDF en gare de Prague, il va rencontrer une femme qui va lui redonner un peu de goût à l'existence.

    On est instantanément happé par la qualité et surtout la beauté des images de ce film qui utilise le procédé de rotoscopie qui consiste à retranscrire en animation des images filmées préalablement en prises de vue réelles (c'est clair ?). Il est donc évident que cela donne un réalisme impressionnant à un film d'animation. C'est donc d'une beauté indiscutable qui ne se dément jamais tout au long du film. Il suffit de regarder les trois photos ci-dessous. La première demi-heure est captivante et, porté par le mystére qui entoure le personnage, on se laisse entraîner par un intérêt évident. Et puis, peu à peu, le film échappe totalement. Trop d'ellipses ou trop de lacunes historiques font que le pauvre spectateur est un peu baladé et finalement abandonné au bord de la voie. Il est évident qu'il doit nous manquer des éléments biographiques de Tchéquie pour tout comprendre. Nos connaissances s'arrêtent bien avant l'expulsion des minorités allemandes des sudètes ou la révolution de Velours qui met fin au régime communiste en 1989. Mais pas seulement. Dans l'histoire même d'Aloïs, certains points restent obscurs. Pourquoi ce brusque séjour à l'hôpital psychiatrique qui fait qu'ensuite le pauvre homme se retrouve sans travail et sans logement à dormir sur un banc en gare de Prague par exemple ?
    Reste pourtant les fabuleuses images quasi hypnotiques parfois qui nécessitent néanmoins de ne pas être en déficit de sommeil pour ne pas sombrer !

  • LES ADIEUX A LA REINE de Benoît Jacquot *

    Les Adieux à la reine : photoLes Adieux à la reine : photo Benoît Jacquot, Julie-Marie Parmentier, Léa Seydoux

    Alors qu'à Paris le peuple a "pris" la Bastille, à Versailles la Reine consulte le dernier Vogue son cahier des froufrous et falbalas, se meurt d'amour pour la belle et libre Gabrielle de Polignac et manipule sa très dévouée lectrice favorite Sidonie Laborde. Cependant les bruits de tumulte s'approchent rapidement et le Palais peu à peu se vide. Les nobles dont les noms circulent sur une liste de têtes à couper ont peur et fuient ainsi que leurs serviteurs qui ne se sentent plus en sécurité. Sidonie assure qu'elle ne quittera jamais la Reine qui en profite pour lui demander un étrange sacrifice !

    L'idée de ne pas montrer la "révolution" en marche mais la confusion puis le chaos qui s'emparent progressivement du Château est tout à fait originale. Tout comme découvrir les couloirs, les différents passages, les cuisines et les "quartiers" des domestiques. S'apercevoir aussi que tous ne sont pas aussi bienveillants et dévoués que Sidonie. Les médisances et mesquineries allaient bon train. Voir le désarroi des nobles paniquer dans une confusion totale est un triste bazar pathétique. De vieux barbons enfarinés s'émeuvent de lire leurs noms sur la liste fatale. Le réalisateur ne les épargne pas et capte la débâcle qui s'empare de Versailles devant les yeux effarés des serviteurs auxquels certains, telle Sidonie aveuglée par l'amour qu'elle porte à sa Reine, refusent de croire. Si d'aucuns veulent y voir des correspondances avec une certaine fin de règne actuelle, tant mieux pour eux. Moi je ne vois qu'un film en costumes, certes différent car brillant et d'un point de vue particulier puisque c'est celui des domestiques, mais surtout  usant à force d'agitation. Suivre Sidonie qui tombe et se relève, et sa course éperdue dans les couloirs interminables ont réellement fini par devenir fatigant pour la spectatrice que je suis.

    Reste l'interprétation. Certains seconds rôles sont vraiment aux petits oignons et il n'y a pas plus naturelle et convaincante que l'extraordinaire et extravagante Noémie Lvovsky en première femme de chambre qui veille avec dévotion sur sa royale patronne. Julie-Marie Parmentier est une petite soubrette mutine et charmante. Virginie Ledoyen une fière et conquérante amie/amante. Et Diane Kruger passe avec beaucoup de sensibilité de la femme superficielle et capricieuse à l'épouse inquiète pour son royal époux, puis brisée par l'abandon de son amie mais néanmoins d'une cruauté manipulatrice envers Sidonie.
    Et donc, lisant partout qu'il s'agissait ici du meilleur rôle de la toute récente mais fulgurante carrière de Léa Seydoux qui pour l'instant ne m'a JAMAIS convaincue, je m'attendais et d'ailleurs j'espèrais être enfin conquise par la demoiselle. Il n'en est rien. Fade et inexpressive, je trouve cette actrice absolument mauvaise et sans aucun mystère, et incapable de faire passer la moindre émotion dans son regard qui reste désespérément vide. Censée faire comprendre à quel point elle tient à la Reine, à aucun moment on ne voit passer la fièvre de l'admiration et de l'amour dans ses yeux.  Il n'y a que lorsqu'elle doit être encore plus boudeuse et renfrognée qu'elle ne semble l'être naturellement, qu'on peut apercevoir un léger frémissement de sa narine gauche. Ou lorsqu'elle espère obtenir quelque chose. Une réplique du film à elle destinée résume assez bien son jeu et le tempérament de son personnage : "Dis donc, tu peux être aimable quand tu demandes un service ?".

    Ce qui a fini de m'irriter est que Benoît Jacquot se serve de deux prétextes absolument minables pour déshabiller intégralement deux de ces actrices ! J'en ai vraiment plus qu'assez de ces scènes inutiles qui ne servent en rien l'intrigue et plus qu'assez des actrices qui acceptent ces scènes sans objet. La scène où Virginie Ledoyen et Diane Kruger se serrent l'une contre l'autre est bien plus explicite et sensuelle que si elles avaient été dans un lit.

  • A L'AVEUGLE de Xavier Palud **

    A l'aveugle : photo Xavier PaludA l'aveugle : photo Xavier Palud

    Une jeune femme se fait assassiner et découper en quinze morceaux chez elle sans la moindre trace d'effraction. Un autre meurtre au procédé très différent mais tout aussi spectaculaire est perpétré, suivi d'un troisième... Alerte générale au 36, le commandant Lassalle aidé de son lieutenant, la jeune et charmante Héloïse qui en pince pour lui, sont sur le coup. Rapidement un accordeur de pianos, Narvik est suspecté. Mais il est aveugle et du coup, cela devient peu vraisemblable qu'il ait commis ces horreurs étant donné la complexité des modes opératoires.

    Polar nerveux et efficace et pub non dissimulée pour la Ford Focus (paiement en espèces merci) ce film ne renouvelle le genre en aucune façon mais au moins offre la possibilité de passer 1 h 34 pied au plancher sans une seconde d'ennui. Tout le monde connaît l'assassin pratiquement dès le début, les spectateurs, les flics et même les instances supérieures qui semblent avoir intérêt à étouffer les affaires. Le truc est de savoir comment ce brave Lassalle va bien pouvoir s'y prendre pour coincer le coupable avec qui se noue une étrange relation de confiance et comment contrer sa hiérarchie.

    Mais la cerise sur le gâteau d'une intrigue sans grande surprise, c'est Jacques Gamblin et son interprétation nonchalante de ce flic usé et brisé par un drame personnel. Avec sa tignasse poivre et sel très seyante, sa barbe de trois jours so sexy, ses costumes gris souris assortis à son humeur, ses conversations avec son chien, il est à la fois flegmatique et insolent quand il balance ses répliques et donne finalement un ton humoristique à une histoire très sombre. On rit donc beaucoup malgré les cadavres. Mélange du Mel Gibson suicidaire de L'Arme Fatale et du Bruce Willis solitaire des Die Hard, il est LA raison essentielle de voir ce film fort plaisant par ailleurs.

  • 38 TEMOINS de Lucas Belvaux **(*)

     38 témoins : photo 38 témoins : photo38 témoins : photo

    Une nuit au Havre, une jeune fille morte baigne dans son sang dans le couloir d'un immeuble. Dès le lendemain la police enquête et se voit opposer un silence lourd et embarrassé de la part des habitants du quartier. Tout le monde dormait profondément, personne n'a rien vu ni entendu. Au bout de quelques jours Pierre tourmenté par le remords et alors que sa compagne lui demande d'oublier, prévient l'inspecteur de police qu'il a en fait entendu des cris et vu une femme blessée entrer dans l'immeuble. Et qu'il s'est recouché. Une journaliste fait par ailleurs des recherches de son côté pour tenter de comprendre pourquoi aucun voisin n'est intervenu. L'enquête prend alors un tour nouveau.

    Ce qui intéresse Lucas Belvaux n'est ni de chercher ni de trouver le coupable de ce meurtre barbare mais de s'interroger sur les raisons d'un tel silence. Et par là même de provoquer chez le spectateur les mêmes interrogations, sans juger évidemment. Juger c'est LE mal. Le procureur le dit d'ailleurs dans le film "personne ne prend plaisir à juger". Et des questions, on s'en pose, inévitablement. Que ferions-nous dans pareille situation ? Et le réalisateur n'élude rien, pas même la compassion commode et sincère qui fait que dès le lendemain une chapelle ardente avec photos de la victime, fleurs, bougies est installée à l'emplacement du crime et que la ville entière s'entasse à ses obsèques.

    Je n'aime pas ne pas adorer un film de Lucas Belvaux que j'aime d'amour, mais malgré les magnifiques moments et la profondeur du propos, il y a des lourdeurs qui ne l'ont pas élevé au niveau de ses précédents films (Rapt, La raison du plus faible ou Cavale). Ici les portraits de femmes m'ont semblé totalement raté. Je n'ai pas cru à l'amour entre Pierre et Louise, d'autant que leurs conversations théâtrales sont plutôt superficielles. Le couple ne fonctionne pas. Et si on comprend aisément qu'un couple peut se déliter face à un événement qui les dépasse largement, à aucun moment on ne sent, on ne croit que Pierre et Louise se sont vraiment aimés. Le personnage de Natacha Régnier en mère isolée avec sa fille n'est que survolé, et lorsqu'elle éclate en sanglots parce qu'elle veut protéger "sa famille", ça ne passe pas. Quant à la journaliste, madame je sais tout, interprétée par Nicole Garcia, son côté incorruptible justicière n'impressionne pas.

    Il n'en demeure pas moins que par certains aspects, Lucas Belvaux affirme encore ses dispositions de grand réalisateur de gauche en colère qui rêve d'un monde meilleur et continue de s'étonner de l'individualisme forcené de ses concitoyens. S'interroger sur la "non assistance à personne en danger", la honte et la lâcheté, c'est beau, fort et courageux. Et puis il y a Yvan Attal qui s'effondre intérieurement, rongé de remords, obsédé par des hurlements de femme qui ne lui laissent plus aucun répit. Parvenir au sous-jeu, au non-jeu que Belvaux lui a imposé est une performance. Et enfin, il y a le Havre, ville incroyablement grise, vide, rectiligne qu'il filme comme un personnage. La ville écrase tous les personnages par son gigantisme et Belvaux la rend belle quoique froide et impersonnelle. Le port, les cargos, les containers en enfilade sont comme une ville dans la ville, un labirynthe impressionnant où l'homme est insignifiant.