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cinéma - Page 199

  • ARGO de Ben Affleck ***

     Argo : photo Ben AffleckArgo : photo Alan Arkin, Ben Affleck, John Goodman

    Argo : photo

    Alors que la révolution iranienne fait rage en ce 4 novembre 1979, des militants font irruption dans l’ambassade américaine de Téhéran. Tout le personnel est pris en otages et passera plus de 400 jours en captivité, mais 6 d'entre eux réussissent à s'échapper. Encore plus exposés dans les rues de la ville que prisonniers à l'intérieur de l'ambassade, ils trouvent refuge au domicile de l’ambassadeur canadien. La CIA met alors son meilleur agent "exfiltreur"  sur le coup pour ramener les 6 américains au pays, sains et saufs. Mais rien que pour pénétrer dans ce pays, l'agent Tony Mendez a besoin d'une "couverture". Aidé par un ami responsable des maquillages du film La Planète des Singes, pour lequel il a obtenu un Oscar, et par un producteur cabotin, il décide de monter une fausse maison de production chargée de réaliser un faux film dont le tournage aurait lieu en Iran. Et justement un scénario minable, improbable, dort dans les archives du producteur : ARGO...

    Alors oui, ce n'est peut-être pas le moment de montrer clairement que l'Iran est bien le dernier pays où il ferait bon aller faire du tourisme. Mais est-ce jamais le "bon" moment avec l'Iran ? Oui, le héros s'auto-proclame "bon américain" et les bannières étoilées flottent aux frontons des maisons. Oui les états-uniens sont toujours persuadés qu'ils sont les rois de l'univers et au-delà, qu'ils sont les gentils et qu'un jour ils sauveront le monde de sa folie furieuse... Oui, oui, oui, mille fois oui à tout ça, ainsi qu'au fait que ce film manque une nouvelle fois cruellement de Casey. Ah la famille !

    Mais aussi, une fois encore rendons grâce au cinéma de nous révéler des événements étonnants qui étaient passés sous silence à l'époque, même si l'acte héroïque du véritable Tony Mendez fut récompensé et révélé plus de 20 ans plus tard. Et à Ben Affleck de continuer son chemin de réalisateur éclectique. Après son complexe et passionnant Gone Baby Gone, suivi d'une plongée bostonienne chez les gangsters avec The Town, il démontre à nouveau que coiffer sa casquette de réalisateur n'était pas le fruit d'une lubie passagère. Et il réussit selon moi, haut la main son thriller d'espionnage en maintenant constamment la tension tout au long de cette histoire rocambolesque, une farce tellement grotesque qu'on a parfois du mal à croire que la CIA lui ait donné son accord.

    En tout cas, Tony Mendez est un héros. Il faut une sacrée dose de courage ou d'inconscience pour se jeter ainsi dans la gueule du loup (l'anti-américanisme ambiant fait froid dans le dos) pour sauver des gens terrifiés, peu enclins aux effusions, pas vraiment reconnaissants, même s'ils finissent pas coopérer. Ben Affleck endosse le rôle du héros. Look eightie idéal, physique imposant, mélancolie du preux chevalier solitaire, il est parfait. Même s'il ne les élude pas, il n'abuse pas des scènes épuisantes à propos de la famille du poor lonesone cow-boy et intègre une scène aussi inutile qu'agréable à regarder et qu'on peut intituler : regardez mon beau, puissant, velu et musclé torse nu !!!

    Ben Affleck réussit les scènes d'action, de foules et les copient/collent à la réalité. Nous verrons les "vraies" scènes au cours du générique de fin. Il réussit à rendre palpable l'enfermement et la terreur des 6 personnes. Mais comment a t'il choisi son casting qui rivalise de fadeur ??? En outre, il parvient à être drôle en menant une petite charge anti-hollywoodienne, bien aidé par les deux cabots géniaux que sont Alan Arkin et John Goodman. Le dernier quart d'heure joue parfaitement avec les nerfs déjà à vif du spectateur et j'aime ça. Bref, un bon film, efficace.

  • N'AIE PAS PEUR de Montxo Armendàriz ***

     N'aie pas peur : photo Michelle JennerN'aie pas peur : photo Belén Rueda, Michelle Jenner

    N'aie pas peur : photo Lluis Homar, Michelle Jenner

    Quelques mots sur ce film lourd et difficile avant qu'il ne disparaisse complètement des écrans.

    Sylvia n'est encore qu'une toute petite fille lorsque son papa adoré, au terme d'une séance de chatouilles lui murmure ces mots en lui retirant sa culotte "n'aie pas peur". Ce cauchemar va durer des années. Mais Sylvia va grandir, car quoiqu'ils aient à endurer comme épreuves, peu de choses empêchent les enfants de grandir. Elle n'aura qu'une amie tendre, attentive mais qu'elle ne mettra pas dans la confidence. Elle se réfugiera dans la musique. Accrochée à son violoncelle comme à une béquille. Elle cherchera un temps à faire des études qui l'éloigneraient de son bourreau mais il s'y opposera. C'est au travers de jeux de rôles avec ses poupées que Sylvia exprimera le mieux ce qu'il lui fait endurer. En entendant ces horreurs, sa mère croira à un délire d'enfant. Plus tard, elle ne verra en elle qu'une ado perturbée jamais satisfaite. Car Sylvia ne cessera d'hurler sa détresse et de réclamer du secours, mais en silence... en traînant un spleen maximum, en étant la proie de crises d'angoisse infernales et de coliques incontrôlables.

    Ce n'est que vers ses 25 ans que Sylvia décidera brutalement, d'une étrange façon, de résister enfin et de se reconstruire. Et pourtant, entre temps, elle aura tenté plusieurs fois de se séparer de ce père, cet homme "qui l'a le plus aimée, mais a bousillé sa vie" et elle reviendra le voir presque implorante "fais moi des chatouilles", car elle ne connaît pas d'autre façon d'être aimée. Sa mère, dont nous sommes persuadés qu'elle a compris l'abomination, a préféré quitté cet homme et lui abandonner sa fille qui l'a pourtant suppliée de l'emmener avec elle. Ils vivront pendant des années comme un couple sans que personne jamais ne se doute de rien.

    Le film propose quelques témoignagnes d'enfants devenus adultes, jadis victimes d'inceste, comme si le réalisateur, qui a le bon goût de fermer la porte avant chaque scène d'inceste, voulait faire le tour de toutes les façons de survivre à cette dévastation. L'histoire de Sylvia aurait suffi mais tous ces témoignages renforcent la puissance d'un thème rarement traité au cinéma.

    Les moments forts se succèdent portés par deux acteurs extraordinaires qui empoignent leur rôle avec une grande détermination. Le grand Lluis Homar réussit courageusement à ne pas nous faire vomir d'horreur en restant toujours comme en retrait. Sans ,jugement ni explication de la part du réalisateur. Son mélange d'autorité et d'humilité ne laisse aucun doute, Sylvia ne pouvait pas lui échapper. Quant à Michelle Jenner, elle interprète cette jeune femme brisée avec une intensité folle. Elle est d'une beauté, d'une grâce, d'une douceur douleureuses, bouleversantes. J'ai très hâte de retrouver cette étonnante et magnifique actrice.

  • LOOPER de Rian Johnson ***

    Looper : photoLooper : photo Emily BluntLooper : photo Joseph Gordon-Levitt

    En 2044, des mafieux pourris jusqu'à l'os ont inventé une machine à remonter le temps. Ils envoient dans le passé des tueurs chargés d'éliminer des témoins gênants. Ces sales types sans foi ni loi ni grandes compétences mais frimeurs et drogués car plein aux as s'appellent des "loopers". Leur boulot est assez simple, équipés d'un "tromblon", une arme qui éclaterait un moustique à 200 mètres, ils se contentent d'attendre aux abords d'un champ de maïs qu'un gars leur tombe du ciel directement sur les pieds, cagoulé, les mains dans le dos et de tirer. En échange de ce service, ils reçoivent une coquette somme en lingots d'or qu'il leur est conseillé de capitaliser jusqu'aux jours où ils se retrouvent face... à eux-mêmes. La plupart des "loopers" tirent sans rechigner sur leur "moi" âgé. Dans ce cas, la "boucle est bouclée" et ils n'ont plus qu'à se ranger des voitures. Parfois, un looper hésite à se tirer dessus et là, ça fiche un sacré bazar. C'est ce qui arrive au jeune Joe... d'autant que le vieux Joe, informé de ce qui va lui arriver... a réussi à ôter le sac qu'il devait porter sur la tête. Une seconde d'hésitation et paf, la machine s'enraye. Contre toute attente, les deux Joe ne vont pas s'allier, ne vont pas s'entendre. Et le vieux Joe va se mettre à la recherche du pourri qui sera responsable de l'assassinat de sa femme 30 ans plus tard et qui est à l'heure actuelle un enfant. Cet élément, empêcher un petit garçon de devenir une ordure, ne lui pose d'ailleurs aucun problème... Ce qui n'est pas l'élément le plus inattendu du film.

    J'arrête là de me retourner le cerveau et je vous conseille d'en faire de même et vous recommande également de laisser votre logique au vestiaire avant de voir ce film FORMIDABLE et unique en son genre. Même s'il lorgne avec humilité du côté des Matrix, Inception, Memento et compagnie avec une petite dose homéopathique de Damien, la Malédiction. Et même si j'en suis encore à me demander comment et pourquoi, alors qu'ils sont renvoyés dans le passé... ce sont les jeunes qui sont chargés de tuer les vieux !!! Vous me suivez ? Moi non plus. Peu importe. A cette même époque, certaines personnes ont développé un mini pouvoir télékinésique à peu près inutile sauf à draguer des filles impressionnées de voir un garçon faire tournicoter une pièce par le seul pouvoir de la pensée. Ce don minable et vain prend une toute autre dimension et d'autres proportions chez un petit garçon isolé avec sa jolie maman dans sa ferme au milieu de n'importe où et qui pourrait bien être le futur pourri responsable de la mort de la femme de Joe. Ou pas !

    Vous ne suivez toujours pas ? C'est normal.

    Néanmoins, je vous recommande vivement de ne pas faire l'impasse sur ce grand petit film qui sans surenchère d'effets spéciaux envahissants (la deuxième partie se passe dans une ferme au milieu d'un champ je vous le rappelle) va vous en mettre plein la vue et vous laisser sur le fondement avec un final tellement inattendu, renversant que je n'ai pu m'empêcher de dire "oh" ou "noooon !"  de stupéfaction, c'est dire !!! Quant aux réponses à certaines questions, et bien, je pense qu'il faut revoir la chose.

    Bruce Willis est beau et bon comme Bruce Willis. Il porte toujours admirablement le ti-shirt blanc taché de sang, a toujours ses magnifiques yeux verts et son regard qui semble frisotter. Et Joseph Gordon Levitt, parfois méconnaissable, lui ressemble comme un double et a poussé le perfectionisme jusqu'à emprunter ses tics et ses tocs. Impressionnant.

  • FRANKENWEENIE de Tim Burton **

    Frankenweenie : photoFrankenweenie : photo

    Victor est un petit garçon différent. Victor doit sans aucun doute être le double de Tim lui-même qui a dû proposer à ses parents incrédubles de visionner des petits films bidouillés dans sa chambre ou son grenier avec ses jouets. Victor pourrait être un petit loustic exclu s'il n'avait un ami à la vie à la mort en la personne de Sparky. Un chien affreux, mais plus fidèle qu'un chien. Le grenier de Victor c'est un peu le labo IV du savant fou et il utilise tout ce qui lui tombe sous la main, y compris les ustensiles de cuisine de maman, pour tenter des expériences inédites. Et ça tombe bien, le professeur de sciences de l'école propose un concours qui récompensera la meilleure expérience scientifique. Mais un drame survient. Paf... Sparky se fait renverser par une voiture. Il faut dire que ce nigaud avait une fâcheuse tendance à courir sans discernement après la première baballe lancée. Victor est effondré. Ses parents lui assènent des banalités telles que "Sparky sera toujours dans ton coeur !" et ça lui fait une fichue belle jambe de savoir que l'être qu'il a le plus adoré sera toujours dans son coeur. Ce qu'il veut c'est qu'il soit là, en chair et en poils. Et Victor est inconsolable mais mâlin comme il est, en combinant des bidouillages électriques, les éclairs des orages... il parvient à ramener Sparky à la vie. Il se rend rapidement compte qu'il doit tenir cette prouesse cachée mais ce ne sera pas possible bien longtemps. Des personnes mal intentionnées vont découvrir le secret de Victor et blablabla et blablabla...

    Je ne m'éterniserai pas pour vous dire qu'avec Tim je vais de déception en attente et en désillusion. Alors évidemment c'est sublimement beau à regarder. Les personnages sont magnifiques, du pur Tim, avec leurs grands yeux incroyables qui s'ouvrent sur un monde étonnant puis cruel. Bien sûr, Victor s'appelle Frankenstein, sa copine Van Helsing et c'est lolant. Bien sûr le héros a toujours un petit air de Johnny même si ce n'est pas lui qui double cette fois, Lydia est coiffée comme Wynona Rider dans Beetlejuice, le prof de chimie ressemble comme trois gouttes d'eau à Martin Landau et Christopher Lee. Mais une fois de plus, j'ai eu le sentiment que Tim recyclait du Burton, un peu d'Edward par ci, un peu de gothique par là. Et pour ceux qui ont une idée de ce que ça peut bien vouloir dire (moi le concept même m'échappe toujours), sans doute de la poésie et les sempiternels thèmes sur la vie, la mort, les êtres, les monstres, la différence, la cruauté d'un monde impitoyable... Mais je crois que j'en ai ma claque de les voir ressasser sans surprise.

    Alors bien sûr, il y a LA scène de la résurrection qui vaut plus que le détour, elle vaut le voyage, tant ici le bricolage fait place au génie. Mais ça dure 5 minutes. La mysoginie m'a sauté aux yeux comme jamais, la mère passe son temps dans sa cuisine, ou un aspirateur à la main et lit un roman à l'eau de rose qu'elle ne parvient pas à finir... Définitivement, je crois que ce que j'ai préféré dans ce film, c'est la musique de Danny Elfman...

    Une fois de plus, je cherche en vain le chef-d'oeuvre annoncé et je me retrouve comme Roxane face à Christian avec l'envie de dire à Tim Burton : "Délabyrinthez vos sentiments !...Allez rassembler votre éloquence en fuite !.. Vous m'offrez du brouet quand j'espérais des crèmes !"

  • J'ENRAGE DE SON ABSENCE de Sandrine Bonnaire ****

    J'enrage de son absence : photo Alexandra Lamy, Jalil Mehenni, William HurtJ'enrage de son absence : photo Augustin Legrand, Jalil MehenniJ'enrage de son absence : photo Jalil Mehenni, William Hurt

    Afin de régler la succession de son père récemment décédé Jacques, qui vit désormais aux Etats-Unis, revient en France. Il en profite pour revoir Mado qui avait partagé sa vie une dizaine d'années plus tôt, et avec qui il avait eu un fils. Lors de ces retrouvailles chaleureuses, on ne doute pas un instant qu'entre Jacques et Mado une forme de sentiments, si ce n'est l'amour, est toujours bien présent. A moins qu'il ne s'agisse de l'émotion qui fait ressurgir brutalement les souvenirs de leur douloureux passé. L'enfant né de leur union est mort à 4 ans dans un accident de voiture. C'est Jacques qui conduisait. Mais alors que Mado a "refait sa vie", s'est mariée et a eu un autre enfant, Paul 7 ans, Jacques n'a jamais réussi à faire le deuil de cet enfant perdu. Il souhaite néanmoins rencontrer Paul. Et entre l'homme triste et le petit garçon, le coup de foudre est instantané et réciproque. La relation d'abord ténue devient rapidement de plus en plus profonde et cette complicité insaisissable dérange et inquiète Mado qui interdit à son fils de revoir Jacques. Sauf qu'il est trop tard, l'homme et l'enfant sont devenus indispensables l'un à l'autre. Et ils vont continuer à se retrouver le plus souvent possible en cachette. 

    Et j'espère qu'aucun "critique" encarté n'a révélé la façon dont Jacques et Paul vont finalement continuer à se voir car ce stratagème est un des premiers chocs de ce film qui en réserve pas mal...

    Chacun des protagonistes va se mettre à mentir. Mado à son mari en ne lui révélant pas qu'elle a revu son ex compagnon. Paul à ses parents en gardant le secret de ses rencontres avec Jacques. Et chacun va faire peser sur les épaules de ce petit garçon incroyable le poids terrible de leur douleur et de leurs mensonges. Ce petit Paul qui mènera sa réflexion jusqu'à exprimer que si celui qu'il continue d'appeler "mon petit frère" alors qu'il ne l'a pas connu et serait plus âgé que lui, n'était pas mort il n'aurait lui-même pas vu le jour. Terrible de se dire et de penser que sa propre existence tient à la disparition d'un enfant. Et les paroles rassurantes de son merveilleux et si doux papa (étonnant Augustin Legrand (ne cherchez pas "je connais ce nom... je connais ce visage...", les Enfants de Don Quichotte, c'est lui)) ne réussiront pas à l'apaiser.

    Sandrine Bonnaire, actrice supra sensible choisit pour sa première réalisation (Je m'appelle Sabine était un documentaire) de nous parler du chagrin le plus inconsolable qui soit, la perte la plus injuste, inadmissible, inenvisageable, la mort d'un enfant. Alors ce n'est rien de dire que la vision de ce film est une épreuve et qu'il est d'une tristesse insondable. Mais pas seulement, si elle creuse jusqu'à l'os la douleur d'un homme brisé, perdu, on finit par se demander jusqu'où cet homme dévasté va aller pour tenter de calmer sa douleur. Que va t'il se passer entre cet enfant qui n'est pas le sien et lui ? Pourquoi ce lien soudain et mystérieux ne va t'il cesser de croître ? Comment cela va t'il finir ? La tension est donc constante, permanente et ne cesse de s'enfler jusqu'à un final sidérant. Une scène d'une intensité, d'une violence, d'une tristesse comme on n'en voit rarement et qui laisse le spectateur anéanti dans son fauteuil. Et tout ce déchaînement de fureur provient du personnage dont on l'attendait sans doute le moins...

    Pour nous faire partager et vivre toute cette douleur, Sandrine Bonnaire s'est entouré d'un casting complice à la hauteur de son ambition. Alexandra Lamy est son double. Physiquement d'abord. Même mâchoire carrée, même sourire éclatant, même fossette. Mais elles possèdent aussi la même profondeur "terrienne" tant elles semblent toujours l'une comme l'autre ne pas faiblir, ne pas flancher, être là, résister. Le petit Jalil Mehenni est parfait, fragile et solide. Augustin Legrand, un géant de douceur et de compréhension. Et William Hurt, dans son par-dessus bleu erre comme un fantôme désespéré à la recherche de l'impossible. Son beau visage livide, mélancolique, ses yeux rougis et délavés, sa démarche lourde portent toute la tristesse du monde. A tout jamais inconsolable. Et c'est lui qui prononcera cette phrase si belle "j'enrage de son absence"... une rage constamment contenue, intériorisée qu'il parvient par cette interprétation prodigieuse, phénoménale à rendre aussi palpable qu'inimaginable !

  • SKYFALL de Sam Mendès ***

    Skyfall : photo Daniel Craig, Naomie HarrisSkyfall : photo Daniel Craig

    James -Ô ! James- est en mission à Istanbul et comme toujours pour une scène inaugurale qui décoiffe, l'Agent Secret est obligé de filer le train à un vilain qui détient une liste vitale pour la survie de l'Agence. Mais cette fois c'est dans un très seyant costume de tergal gris clair qu'il fonce en moto sur les toits du Grand Bazar d'Istanbul puis au "volant" d'un engin de chantier sur un train en marche, écrabouillant aux passages quelques "coccinelles". James mouille et tache la chemise à toutes berzingues. M. suit la scène par satellite depuis son QG pluvieux  londonien, commentée par Eve (je ne vous dis pas le nom de famille de la demoiselle...) chargée de récupérer 007 à l'issue de la mission.

    Sauf que... Eve risque de perdre James de vue et M. ordonne à Eve de tirer.

    Agent touché.

    Laissé pour mort,  mais récupéré par une sirène, James traîne un spleen comac en Turquie, se met minable chaque nuit, joue à la roulette russe (ou approchant) avec un scorpion et essaie de pardonner ou d'oublier que M. l'a trahi, abandonné, abattu. Lorsque le MI6 est mis en pièces par une attaque terroriste visant M., James revient en vrac, en pièces détachées à Londres prêt de nouveau à défendre son pays mais surtout sa chère M. menacée jusque dans son ordinateur par une organisation inconnue et sommée par les hautes instances de l'Etat de prendre sa retraite. Un certain Mallory est déjà prêt à s'asseoir dans son fauteuil tout chaud.

    Vexée comme un pou et nullement surprise que James réapparaisse "où étiez-vous donc passé ?", elle ne lui offre même pas le gîte et le couvert pour se faire pardonner une oraison funèbre honteuse, en plus de sa trahison ! Sa seule explication : les intérêts de la Patrie. Et ça tombe bien, James est fait du même métal. Le pays d'abord. La mission s'il l'accepte, après avoir passé des tests d'aptitudes comme un bleubite, est de découvrir qui a attaqué le MI6 désormais planqué 6 pieds sous terre. Sauf que James, diminué par ses blessures rate les tests. Mais M. n'en est pas à un mensonge près et double zéro sept reprend du service.

    Pour faire court c'est moins bon que Casino Royale (le meilleur de tous les temps selon moi, en comptant les épisodes de ce poilu de Sean, de cette endive de Roger et même de Pierce que j'ai longtemps tenu pour meilleur que les deux précédents !) mais cent mille fois meilleur que Quantum of Solace qui servait à rien, sauf à abuser de Daniel Craig. Cette fois ça ne ressemble pas non plus tout à fait à un James tant ça psychologise (et j'aime ça) à tous les étages mais c'est du très bon néanmoins.

    Ce qui change c'est que James est tout diminué. Daniel Craig a dû renoncer à dormir pendant au moins quinze jours pour avoir la tête qu'il a au début du film ! Après, ça s'arrange au niveau des valoches sous les yeux et comme il est plusieurs fois torse nu, on peut constater que, exceptées les égratignures, tout va bien pour lui et pour nos yeux merci ! Et puis James prouve que tout ce qu'il fait, ce n'est pas pour jouer les gros bras aux quatre coins de la planète, il aime son pays, il est prêt à mourir pour lui mais aussi à se sacrifier pour M. plus impitoyable et dure que jamais, qu'il aime comme sa maman et qui le lui rend d'une bien étrange façon. C'est très beau quand ils sont tous les deux à s'appliquer consciencieusement à ne pas montrer leurs sentiments réciproques. Mais on n'est pas dupes on sait qu'ils s'aiment. Mais M. a eu d'autres préférences jadis. Et James a été enfant... Alors Sam Mendès ressort l'Aston Martin, la musiquette des années 60 et propose un nouveau Q (Ben Wishaw, IMPECCABLE !), fort en thème et en informatique, chargé de proposer des gadgets à James. Et comme le réalisateur n'est pas un manchot, les décors sont parfois à couper le souffle de beauté (Istanbul, Macau, l'île abandonnée...), il assure dans les scènes d'actions époustouflantes alors pourquoi, mais POURQUOI a t'il chargé son film d'une demi-heure de blabla en trop ?

    Je termine par le dossier : James et les garçons femmes, le sexe, l'amour tout ça ! Il est l'homme d'une seule femme, il l'a dit et démontré dans Casino Royale et il le prouve, il demeure fidèle à feue Vesper Lynd. Quel homme ! Néanmoins, James n'en est pas moins homme avec des besoins mais il préfère les brunes c'est évident. Et voilà que Javier Bardem, déguisé en vilain Silva s'est teint en blonde pour tenter de le faire changer d'avis. Après s'être fait chatouiller par Le Chiffre/Madds Mikkelsen,

    James se fait de nouveau attacher sur une chaise pour endurer les délicates carresses de Javier et nous fait la révélation la plus inattendue qui soit...

    Skyfall : photo Daniel Craig, Javier Bardem

  • STARS 80 de Frédéric Forestier, Thomas Langmann ***

    Stars 80 : photo Jean-Luc LahayeStars 80 : photo Jeanne MasStars 80 : photo Emile & Images, Gilbert Montagné, Jean Schultheis, Jean-Luc Lahaye, Jean-Pierre Mader

    Oui je sais ce que vous allez me dire ! Alors ne me le dites pas. Je suis déjà suffisamment surprise de mettre *** à un film au générique duquel se trouvent : Images, Gilbert Montagné, Sabrina et les autres ! J'ai eu beau réfléchir, je suis d'accord avec moi-même pour maintenir ma décision. Parce que ce film c'est de la dynamite et absolument pas ce que j'imaginais ce que ce serait. Alors tant pis si j'assume avec difficultés et si je perds le peu de crédibilité que j'avais déjà en tant que cinéphile qui vénère un acteur/réalisateur qui parle à une chaise et vote républicain, qui a péri d'ennui devant le dernier spectacle de Carax, est restée de marbre (voire pire) face à Perdre la raison, trouve que Matthew McConaughey est triplement un excellent acteur, adore presque tous les super héros... Bon, je ne vais pas faire le tour de toutes mes tares et lacunes cinématographiques.

    J'ai aimé ce film.

    Pire.

    Ce film m'a embarquée alors que je ne m'y attendais pas. J'y allais, sans avoir vu la bande-annonce, me disant qu'il s'agissait sans doute d'une espèce d'émission de télé, de show, de spectacle... où des chanteurs has been tentaient de faire acteurs en poussant la chansonnette et que j'y ai traîné Jules un peu à reculons avec des pieds de plomb. C'est dire si ce n'était pas gagné. Nonobstant ces réticences, je n'étais pas contre le fait d'écouter un peu du top 50 des années 80, époque curieuse qui me semble antédiluvienne, ringarde ou vintage c'est selon. Epoque révolue donc, où je regardais beaucoup la télé et écoutais beaucoup la radio.

    Il y a donc deux vrais acteurs (voire trois si je compte Bruno Lochet) Anconina (formidable) et Timsit, deux braves types, Vincent et Antoine un chouilla losers mais obstinés et fans des années 80. Ils tentent de survivre en produisant des sosies dans des spectacles. Leur affaire prend l'eau de toute part et avant que leur banquier ne les lâche définitivement, ils décident après avoir retrouvé un vieux 45 Tours de contacter les chanteurs qui ont été les vedettes d'un seul titre et ont complètement sombré dans l'oubli, de les réunir et de monter un spectacle en souvenir des années 80. Contre toute attente, Peter & Sloane, François Feldman, Début de soirée, Cookie Dingler, Images... (oui je sais, ça envoie du bois) acceptent. Mais le rêve ultime serait de faire participer la star des stars de ces années là, qui hélas vit aux Etats-Unis : Gilbert Montagné !

    Le choc passé de constater qui a morflé (Sloane, Cookie...) et qui pas (Jeanne Mas (fragilissime), Jean-Luc Lahaye...), on s'habitue, on craque, on fond, on s'attendrit et on rit. Franchement. Et contrairement à ce que je craignais, on ne rit pas D'EUX mais avec et grâce à eux. Car même si le scenario est une success story sans l'ombre d'une anicroche dans le parcours, les apprentis acteurs, ex-gloires d'un jour ou d'une saison, armés d'un solide et savoureux sens de l'humour posent sur leur parcours un regard inattendu, sans concession et sans la moindre nostalgie. Ils sont drôles à évoquer ce qui, en plus de leur titre unique, a fait leur gloire : les déboires sentimentaux de Peter et Sloane, le quasi anonymat de Début de soirée dont on ne sait jamais qui est qui, tout comme celui de Cookie Dingler qu'on prend pour Michel Delpech etc... C'est difficile à exprimer mais c'est à mourir de rire, mais jamais ce n'est méchant donc jamais gênant.

    Tout le monde a l'air de se marrer et faire une fête du feu de dieu et le public de toutes les villes de France qui remplit les Zénith suit comme un seul homme. Et dans la salle, je mets quiconque au défi de ne pas agiter les gambettes sous le siège. Impossible de résister à ces chansons qu'on connaît par coeur (sauf Voyage Voyage*... seule la fille aux cheveux zarbis peut la chanter). La séquence à New-York, très Blues Brothers avec Gilbert Montagné en prédicateur gospel m'a sciée. J'avais envie de sauter partout et qu'elle ne s'arrête plus. Une comédie musicale dans le film. Euphorisante.

    Evidemment, acteur c'est quand même un métier et certains chanteurs ont du mal à exister... Mention spéciale à Jean Schulteiss, souriant comme un ravi de crèche, qui ne se donne même pas la peine de "jouer". On le pose, il se met au piano et vas-y mon toc toc, c'est reparti comme en 14 :

     "Je me fous, fous de vous, vous m'aimez
    Mais pas moi, moi je vous voulais mais
    Confidence pour confidence
    C'est moi que j'aime à travers vous"...

    Par contre la prestation de Jean-Luc Lahaye... et là je me pince encore deux jours après à me demander si c'est bien moi qui vais dire ce que je vais dire... m'a complètement mise KO. En parrain (musique de Nino Rota comprise), cuir, chaînes et chemise léopard, complètement alaindelonisé (il parle de lui à la troisième personne), il est exceptionnel. Il se pointe et clame "Jean-Luc Lahaye est dans la place", il récite par coeur son "livre" Cent familles, persuadé d'être LA star, distribue des bisous à des filles qui se pâment, "t'as quel âge ?" lance t'il à une jeunette, "non j'rigole" ajoute t'il. Il est tordant, drôle à un point que vous devez avoir du mal à imaginer ! Sur scène, c'est une bête, dans l'histoire il est le bad boy qui vient mettre avec bonheur un peu de piment dans cette sucrerie pleine de tendresse et de bons sentiments. Il est bien meilleur que certains acteurs confirmés. Une présence, quelque chose en plus quoi...

    Même si c'est éphémère, on sort de la salle avec une pêche d'enfer, un sourire jusqu'aux oreilles et bon sang ça fait un bien fou toute cette énergie !

    *Au dessus des vieux volcans
        Glissent des ailes sous les tapis du vent
        Voyage Voyage
        Eternellement
        De nuages en marécages
        De vent d'Espagne en pluie d'Equateur
        Voyage voyage
        Vol dans les hauteurs
        Au d'ssus des capitales
        Des idées fatales
        Regarde l'océan 
         Voyage voyage 
        Plus loin que la nuit et le jour
        Voyage
        Dans l'espace inoui de l'amour
        Voyage voyage
        Sur l'eau sacrée d'un fleuve indien
        Voyage
        Et jamais ne reviens 

       
        Sur le Gange ou l'Amazone
        Chez les blacks chez les siks chez les jaunes
        Voyage voyage
        Dans tout le royaume
        Sur les dunes du Sahara
        Des îles Fidji au Fuji-Yama
        Voyage voyage
        Ne t'arretes pas
        Au d'ssus des barbelés
        Des coeurs bombardés
        Regarde l'océan 


        Au dessus des capitales
        Des idees fatales
        Regarde l'océan
        Voyage voyage...    

  • ASTÉRIX ET OBÉLIX AU SERVICE DE SA MAJESTÉ de Laurent Tirard **

    Astérix et Obélix : au service de Sa Majesté : photo Edouard Baer, Gérard Depardieu
    Astérix et Obélix : au service de Sa Majesté : photo Fabrice LuchiniAstérix et Obélix : au service de Sa Majesté : photo Edouard Baer, Gérard Depardieu
    A la tête de ses légions bas du bulbe, César continue d'envahir le monde. Son choix se porte sur une île aux rites bizarres : Britania. Même si la victoire est aisée, comme pour la Gaule, César tombe sur un os. Un village d'irréductibles résiste mais s'épuise peu à peu. La Reine des bretons se voit donc contrainte à contre coeur d'envoyer son fidèle serviteur Jolitorax chercher de l'aide en Gaule et surtout de rapporter la fameuse potion magique qui permet encore et toujours aux gaulois de tenir tête à César. Astérix et Obélix sont chargés d'escorter Jolitorax et de remettre eux-mêmes à la Reine un tonneau de potion. Evidemment il y aura plein d'embûches en chemin d'autant que les deux comparses sont flanqués d'un compagnon peu ordinaire en la personne de Goudurix, un ado dans toute sa splendeur dont ils sont chargés de faire l'éducation. Et puis, surprise, Astérix et Obélix vont se brouiller un temps,  ils vont devoir prouver qu'ils ne sont pas "deux hommes qui vivent ensemble avec un petit chien", l'un d'eux va tomber amoureux, Obélix va pouvoir baffer quelques romains et toute cette sorte de choses... comme disent les bretons !
    Mais ce qui compte ici ce sont les acteurs, davantage au service de leurs personnages que d'une histoire dont on n'a en gros, que faire. Si l'on excepte quelques passages sans intérêt, la conversion de Dany Boon en gentleman, la cuite carabinée des légionnaires, le personnage agaçant de Pindépis... il faut bien reconnaître que ce quatrième épisode des aventures filmées des deux gaulois est l'un des plus marrant (loin derrière l'opus Chabat évidemment). J'ai donc bien ri de voir énumérer les préjugés que les anglais et les français ont les uns envers les autres (entre autre, les anglais boivent de l'eau chaude et les français puent...), d'entendre l'accent délicieux et excessifs des acteurs français qui jouent des anglais et surtout leurs répliques traduites littéralement comme par un site de traduction en ligne gratuit, que certaines expressions soient prises au pied de la lettre (un gentleman ne doit jamais courir).
    L'idée de mettre dans les pattes des deux compères un troisième luron est excellente et Vincent Lacoste nous refait son numéro très con mais très réaliste d'ado insupportable dont on ne peut rien tirer. Fabrice Lucchini en César c'est du nanan, pour lui comme pour nous. Une fois encore, alors qu'on l'imagine peu en toge et coiffé de lauriers, il donne l'impression d'improviser chacune de ses répliques. Cet acteur est étonnant au point de se fondre dans chaque rôle comme s'il l'inventait et d'y imprimer sa forte personnalité. Guillaume Galienne est plus vrai que vrai en gentleman qui ne veut pas trahir sa bonne éducation. Les filles sont plutôt bien servies et aussi drôles que les garçons ; Catherine Deneuve en reine imperturbable, Valérie Lermercier en chaperon rigide et Charlotte Lebon en jeune première (même si elle hérite de la robe la plus moche qui soit)... Le casting luxueux réserve plein de bonnes surprises et quelques apparitions inattendues.
    Il semble par ailleurs qu'avec Edouard Baer on retrouve le vrai tempérament d'Astérix. Celui d'un petit bonhomme sûr de lui, de son charme, imbu de sa personne, donneur de leçons et un chouilla méprisant. Evidemment il reste toujours le plus courageux dès qu'il faut défendre l'opprimé et cela même sans potion magique. L'acteur parvient comme personne à faire ressortir le côté un peu pathétique et ridicule du personnage.
    Et Gérard Depardieu fait plus que jamais de cet Obélix un couillon empoté, naïf et immature mais invariablement fidèle en amitié. Tout en lui exprime la douceur et la gentillesse, sa voix, sa démarche, son regard, son sourire. Et c'est extravagant que ce soit avec un tel personnage de BD qu'il nous offre sa composition la plus discrète, modeste  mais aussi la plus touchante depuis bien longtemps !

  • PAPERBOY de Lee Daniels **(*)

    Paperboy : photo John Cusack, Matthew McConaugheyPaperboy : photo Matthew McConaughey, Nicole Kidman, Zac EfronPaperboy : photo John Cusack

    En 1969, dans un coin paumé et très moite de la Floride, le shérif a été assassiné. Ce n'était pas un type bien mais néanmoins pour tout crime il y a un coupable. Et Hillary Van Wetter a la sale tête et le comportement de l'emploi. Chasseur d'alligators, il a toujours la machette à la main. Dans le couloir de la mort, il entretient une correspondance torride avec Charlotte, poupée blonde plus très fraîche mais naïve et sentimentale qui a deux obsessions : ses cheveux (pas facile d'avoir le brushing nickel par ces chaleurs !) et les courriers qu'elle échange avec différents détenus à travers les Etats-Unis. Elle finit par déclarer qu'Hillary est "son homme" et entend faire éclater la vérité sur son innocence. Pour reprendre l'enquête, elle engage Ward Jansen, reporter au Miami Times qui entend se refaire une popularité avec cette affaire. Il sera aidé dans la tâche par son ami Yardley et son petit frère Jack qui tombe instantanément sous le charme de la peu farouche Charlotte.

    Deux atouts fondamentaux dans ce film, les acteurs qui mettent le paquet pour casser leur image et l'atmosphère poisseuse, acqueuse, suitante imposée par le climat subtropical humide et chaud. L'histoire et l'enquête arrivent en troisième position. D'ailleurs, quitte à céder au délit de sale gueule, dès que l'on découvre Hillary (John Cusak, méconnaissable, véritable repoussoir, méchant jusqu'à l'os) on a beaucoup de mal à croire à son innocence. Ce qui compte ici, ce sont les personnages, les rapports qu'ils entretiennent et l'effet que produit sur eux le peu de variations climatiques. Il fait chaud, on étouffe. Que faire sinon éventrer des crocodiles ou baiser ? Pendant que les blancs tentent à peine de réprimer ou de céder à leurs plus bas instincts, les noirs luttent ou subissent le racisme latent, rampant, omniprésent. Il y a donc du sexe, de la haine, de la violence et du sang à Lately/Floride. Et même un petit côté Delivrance, tant il saute aux yeux que, même s'ils ne sont pas des virtuoses du banjo, les inquiétants membres de la famille d'Hillary que l'on visite au coeur de marais inaccessibles, se reproduisent entre eux !

    Plus l'enquête avance moins la culpabilité d'Hillary fait de doute. Mais on s'en moque un peu. On préfère observer et voir évoluer cette étrange faune accablée par la chaleur qui triche et dissimule des secrets. Les deux frères sont au coeur de la tourmente qui émerge peu à peu. Matthew McConaughey dont j'espère qu'il n'a cette fois plus à prouver quel acteur étonnant il est. Après Magic Mike et Killer Joe, il dévoile avec beaucoup plus de sobriété une autre facette de ses multiples personnalités. Zac Efron est épatant et ne se contente pas de jouer les beaux gosses torse nu la plupart du temps. Beaucoup d'émotion émane de son personnage. Les relations d'amour qu'il entretient avec son frère et sa nourrisse noire sont très touchants. John Cusak est parfait. Un salaud aussi irrécupérable doit être aussi jouissif à interprétrer par l'acteur qu'à découvrir par le spectateur.

    Je suis hélas moins convaincue par la prestation de Nicole Kidman. En Barbie défraîchie, naïve, fleur bleue et spontanée, elle est d'une vulgarité aux antipodes de ses rôles de grande gigue élégante et bourgeoise. Mais les trois scènes bien trash dont elle est "l'objet" (dont une (hilarante) qui renvoie Sharon Stone dans ses 18 mètres) ont l'air d'être parachutées là comme pour dire "regardez-moi, je suis Nicole Kidman et je pisse sur Zac Efron !" (entre autre). Elle semble crier "OSCAR" à chacune de ses apparitions et c'est agaçant. Qu'est devenue Virginia Woolf ?