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cinéma - Page 269

  • TETRO de Francis Ford Coppola ***

    TetroFrancis Ford Coppola

    Benjamin est serveur sur un paquebot. Lors d’une halte forcée à Buenos Aires, il décide de rendre visite à son demi frère Angelo qu’il n’a pas revu depuis des années. Il est très froidement accueilli par ce frère qui a depuis de longues années coupé tous les ponts avec sa famille au point de ne plus porter son prénom et se faire appeler « Tetro », diminutif de son patronyme Tetrocini.

    Très déçu par cet accueil glacial Benjamin décide néanmoins de s’installer pour quelques jours. Il relit la lettre que son aîné lui avait adressée 10 ans auparavant et dans laquelle il lui promettait de revenir le chercher. Le gouffre qui s’est creusé entre les deux frères semble infranchissable mais le plus jeune, plus que tout, cherche à comprendre pourquoi ce silence s'est installé, pourquoi leur famille est brisée (ils ne sont pas de la même mère) et à savoir d’où il vient, qui il est. Ce qui semble le plus rapprocher les deux hommes, est l’ombre colossale, envahissante de leur père, chef d’orchestre et compositeur mégalo et réputé capable de dire à son aîné qui lui annonce qu’il veut devenir écrivain « Il ne peut y avoir qu’un seul génie dans une famille ». La rivalité artistique n’est pas le seul obstacle qui existe entre le père et ses fils et peu à peu, en même temps que Benjamin, on va découvrir les lourds secrets qui pèsent sur les hommes de cette famille, ont engourdi puis anéanti les sentiments à force de trahison et de non-dits.

    Tetro partage la vie d’une femme, très belle, d’une patience et d’une indulgence admirables. Elle a été sa thérapeute lorsqu’il fut interné dans un hôpital psychiatrique. C’est pendant ce séjour qu’il a écrit une pièce de théâtre inachevée dans un langage codé que Benjamin va décrypter et retranscrire en cachette lui donnant la fin qu’il juge la plus probable et sera à l'origine de nouvelles révélations.

    Les mystères, les secrets, les trahisons sont au cœur de cette tragédie familiale où le fantôme du père absent ou présent flotte et envahit la vie telle la statue du Commandeur s’installant à la table sans y être invité.

    Autant le dire, « Tetro » est d’une beauté foudroyante principalement grâce à ce noir et blanc qui illumine chaque plan, chaque décor, chaque ombre, chaque visage. La lumière est parfois aveuglante et curieusement, sans doute parce qu’il n’est pas un réalisateur comme les autres, Coppola nous propose les flash-backs en couleurs.

    Lyrique et exaltée, la dernière demi-heure n’est pas sans rappeler la fin du Parrain 3.

    Vinvent Gallo (magnifique), apprivoisé, dompté, maîtrisé par le Maître, est d’une étonnante et très bienvenue sobriété.

    Il faut reconnaître que Alden Ehrenreich le tout jeune acteur qui interprète Benjamin est vraiment formidable également mais que sa troublante ressemblance avec Leonardo di Caprio est presque dérangeante.

    Vous vous souvenez peut-être à quel point j’avais été transportée, chavirée par le précédent film de Francis Ford Coppola « L’homme sans âge »… Mon attente n’en était que décuplée et il est incontestable qu’avec « Tetro », le renouveau, la renaissance du réalisateur sont confirmés. Hélas, mille fois hélas, il ne bouleversera pas mon « classement » 2009 car s’il est un film admirable, « Tetro » souffre d’un regret impardonnable : l’absence totale d’émotion…

  • Le soliste de Joe Wright***

    Le SolisteLe SolisteLe SolisteLe Soliste

    Steve Lopez traverse une mauvaise passe. Le journal pour lequel il travaille, le Los Angeles Times, est en perte de vitesse. Sa patronne n’est autre que son ex femme bien qu'il n’ait toujours pas compris les raisons de leur séparation. Il ne parvient pas à communiquer avec son fils parti loin pour ses études. Des ratons laveurs envahissent son jardin. Cerise confite sur le clafoutis, il se plante en vélo, se retrouve un bref temps à l’hôpital et en ressort le visage complètement boursouflé et couturé.

    Alors qu’il est attiré par des notes de musique dans la rue, il fait la connaissance de Nathaniel SDF un peu dérangé qui joue du violon sur deux cordes. En panne de sujet pour la rédaction d’un article, Steve se sert de Nathaniel pour raconter son histoire pas banale. Peu à peu, les deux hommes vont se lier d’une amitié inattendue qui va bouleverser leurs vies.

    Loin de la success story hollywoodienne parfaitement prévisible, ce film s’éloigne progressivement du chemin balisé, attendu ou redouté du mélo à fort pouvoir lacrymal estampillé « histoire vraie », pour finir par s’en écarter définitivement. Et c’est tant mieux. Car si l’émotion n’est pas absente ici, notamment dans les dernières minutes absolument vibrantes, à aucun moment le récit n’est encombré par une quelconque emphase. Le réalisateur évite aussi toute leçon de morale et se débarrasse, je dirai même qu’il anéantit radicalement le prêchi prêcha religieux qui encombre si souvent les films. Joe Wright réussit un film pétri d’humanité où il est question d’une amitié qui s’insinue tout en douceur dans le cœur de deux hommes que tout semble opposer sauf l’émotion et l’exaltation intenses que leur procure la musique et plus précisément la musique de Beethoven.

    Mais pas seulement, il réalise un film profondément social en abordant un sujet d’autant plus inattendu qu’il se situe à Los Angeles : la place des SDF dans la cité des anges où naissent et meurent les rêves de gloire. On sait peu que le nombre de sans abri y est effarant et qu’il y existe une véritable cour des miracles peuplée de laisser pour compte, de malades, de vagabonds… et aussi d’un surdoué tel que Nathaniel. On savait déjà que Joe Wright « responsable » d’un plan séquence extravagant et admirable dans son bouleversant « Reviens-moi » était capable du meilleur. Il le confirme en évitant tous les pièges et en filmant des scènes musicales dans les endroits les plus improbables tels un parking souterrain, un pont sous un échangeur d’autoroutes.

    Il aborde également le thème de la schizophrénie, cette maladie infernale qui vous impose des voix dans la tête et vous rend totalement inadapté au monde qui vous entoure. Il prouve aussi que la "normalité" n'est pas une notion si simple. Qu'il ne suffit pas de vouloir le bonheur ou seulement le bien de ceux qu'on aime pour leur apporter. Comment savoir ce qui est bon pour l'autre d'ailleurs ?

    Dans le rôle parfaitement casse gueule du génie méconnu, entre schizophrénie et autisme, Jamie Foxx, contrairement à ce que j’ai lu ici et là, reste sobre et touchant.

    Quant à Robert Downey Jr, s’il cabotine toujours, reconnaissons qu’il le fait avec génie comme l’un des plus grands acteurs américain actuel qu’il est (c’est MON avis). Mais comme délivré de son éternelle (et jouissive) ironie habituelle, il fait preuve de beaucoup d’aisance et d’inspiration dans les scènes d'émotion.

    En un mot, il est PARFAIT.

    Je le répète, les dernières minutes frémissantes, laissent le cœur battant au rythme du triple concerto pour violon et violoncelle de Beethoven, rappellent et confirment le pouvoir mystérieux et miraculeux de la musique, sur ceux qui la font comme sur ceux qui l’écoutent.

    Le Soliste

  • Gamines de Eléonore Faucher **

    GaminesGaminesGamines

    Quand elle était petite, Sylvie Testud vivait à Lyon avec sa mère et ses deux sœurs, une plus grande et une plus petite. Aucune ne connaissait son père qui était pourtant le même homme. Ici, Sylvie s’appelle Sybille mais c’est de sa vie dont il est question et plus particulièrement de quelques mois de cette enfance entre une mère débordée sur-protectrice mais insatisfaite et un père absent dont l’ombre omniprésente plane et effraie.

    Dans la maison on l’appelle « lui » ou « il ». Le drame de Sybille dans cette famille italienne du côté de la mère, c’est qu’elle est blonde comme les blés, blonde comme « lui » alors qu’ils sont tous bruns. Sybille lui ressemble et elle dit « je n’ai pas de père, j’ai une photo ». Effectivement elle a une photo, subtilisée dans l’armoire de sa mère, qui ne la quitte pas. On y voit un bel homme avec un pull bleu. Elle partage cette photo avec ses sœurs  qui essaient avec elle de lui trouver une histoire, un endroit où il vit.

    C’est l’histoire de Sylvie Testud et de ses soeurs qui ont rencontré ce père fantasmé 30 ans plus tard.

    Avant de parvenir à cette rencontre qu’on attend et qu’on redoute, la réalisatrice égrène quelques scènes du quotidien de trois petites filles bien différentes mais d’une rare complicité et soudées comme il arrive parfois dans les fratries. Elles ont chacune leur particularité que manifestement elles garderont adultes, la sérieuse raisonnable, la « garçon manqué » qui fait des conneries et la petite plus effacée en admiration devant les deux grandes. Dans des décors kitsch et vintages (les nostalgiques vont se régaler), on retrouve ce qui fait que quels que soient les gros chagrins et les petites joies les enfants se dirigent inévitablement vers la vie d’adulte.

    Après avoir différé « la » rencontre, la réalisatrice conclut sur une scène d’une cruauté sans nom à des années lumière de celle de « Tout est pardonné » puisqu’on ne voit ici que jugement et déception…

    Assez juste dans la description du quotidien des gamines et de la mère seule… les apparitions fantomatiques de Sylvie-Sybille-Testud fumant clope sur clope n’apportent rien et alourdissent cette chronique. Par contre, ce film vaut pour le plaisir qu’on a à découvrir trois nouvelles petites actrices absolument étonnantes mais aussi un acteur renversant dans le rôle du parrain, Jean-Pierre Martins.

  • Max et les Maximonstres de Spike Jonze °°°

    Max et les maximonstresMax et les maximonstres

    Je crois que j’ai trouvé mon navet de l’année.

    Je pensais pourtant que ça se jouerait entre « LOL » et « Ma vie pour la tienne »… et non, ce Max et ses monstres les coiffent au poteau, haut la patte !

    Je crois même qu’on tient là, après le premier film du troisième millénaire, le premier film maniaco-dépressif. Est-il destiné aux enfants suicidaires ? Aux adultes dépressifs (donc, d'ex enfants suicidaires qui ne seraient pas passés à l'acte) ? Je ne sais à qui réellement le conseiller !

    Je vous l’avoue tout de suite, je n’ai pas tenu jusqu’à la fin… oui je sais, c’est LE mal mais c’était tellement colossalement insupportable que j’ai failli arracher mon siège pour le balancer dans l’écran. J’ai préféré sortir : et -15°, ça calme, je dirai même, ça détend. De toute façon, savoir si les aventures de Max se terminent de façon absolument bouleversante ou angoissante ou par une jolie fin sirupeuse (la famille c’est drôlement bien) pleine d’embrassades et de grande réconciliation sous le gui à se dire qu’on s’aime, ne m’intéresse pas le moins du monde.

    Max est donc un petit garçon… quoique, petit… c’est sûr c’est un enfant, mais il a au moins 10 ans quand même qui joue avec des peluches dans sa chambre. La scène d’ouverture fait très peur. Hurlant et cavalant à la poursuite d’un chien dans un hideux costume de chat (paraît-il) à travers la maison, Max est bien seul car personne ne le comprend. Sa grande sœur ne veut pas voir le merveilleux igloo qu’il a confectionné. Pire, ses affreux copains le détruisent. Et la mère de Max, pas mieux. Elle est tout sourire mielleux et « chéri chéri » mais davantage préoccupée par son boulot qu’elle ne doit pas perdre et son petit ami, aussi !

    Alors Max ne va pas bien. Il crie, il hurle, il détruit la chambre de sa sœur, « Oh Max, qu’est-ce que tu as fait là ? » dit la mère en réparant les dégâts, il monte sur la table de cuisine avec ses chaussures comme on fait d'habitude (en hurlant), « oh Max, descends de là ! » dit la mère contrariée… Il descend, hurle et… mord sa mère qui dit « aïe, Max, ça fait mal ??? ». Max se vexe et se sauve ("comment ???? je mords ma mère et elle n'apprécie pas ??"). La mère court en criant « Max, Max, tu es vraiment ingérable !!! »… puis s’arrête de courir. Normal toujours.

    Jusque là, je patiente sagement malgré la consternation qui s’est abattue sur moi comme un tsunami à contempler ce mini-monstre, sa mère, sa soeur, le ptit copain etc, convaincue que l’arrivée des nounours va améliorer le bouzin…

    Rien à faire, lorsque Max arrive dans l’île magique peuplée de bestioles toutes plus laides, hideuses, horribles, mal foutues… les unes que les autres, c’est encore pire. Et à partir de là les scènes d’euphorie succèdent aux scènes d’abattement et de désespoir dans un sinistre fatras sans queue ni tête.

    Mais cette teigne de Max trouve vraiment chez les maxi l’univers grisouille et verdâtre fait pour lui car ce qu’il cherche avant tout n’est pas d’être aimé, de se faire aimer, reconnaître ou apprécier… non ce que veut Max c’est être le chef. Ça tombe bien, les peluches manquent un peu de cohésion et le proclament roi, ce qui lui convient donc tout à fait. Max va pouvoir enfin dire « fais ci, fais ça » et être écouté.

    Je suppose que tout ne se déroulera pas aussi facilement jusqu’à la fin car il y a des rebelles, de fortes têtes parmi les monsters qui vont bien découvrir que Max est un imposteur incompétent. Mais je m’en fiche.

    Bref, Max tête à claques par excellence est parmi les siens, des têtes à claques encore plus exaspérantes qui passent leur temps à casser, à se battre, à abattre des arbres, à se faire des blagues pas drôles, à balancer des pierres sur des oiseaux en affirmant « ils aiment bien », et j’en passe !

    J’en passe parce que comme je vous le disais, je ne suis pas allée au bout. J’aurais pu, j’aurais dû, je n’avais plus qu’une demi-heure à tenir. Mais c’était au-delà de mes forces, j’avais déjà l’impression d’être restée 15 jours dans la salle avec obligation de regarder comme ça :

    Car je l’avoue aussi, l’univers des Maxi et du Mini est laid, affreux, tout est d’une mochitude absolue, la forêt, les arbres, le désert…

    Voilà, parents, si vous souhaitez montrer à vos enfants comment devenir un parfait abruti en une heure et demi, allez voir cette chose venue d’un autre monde, sans âme, sans émotion, sans magie, sans poésie mais parfaitement bien dans l’air du temps : l’enfance, les adultes, le monde, la vie, les êtres, tout va mal, tout fout le camp, pas de passé, no future, on va tous crever, le soleil s’éteint…

  • LE PÈRE DE MES ENFANTS de Mia Hansen-Love ****

    Le Père de mes enfantsLe Père de mes enfants

     

    Grégoire Canvel passe une grande partie de sa vie au téléphone, à répondre à tous partout où il se trouve, quand il marche, quand il mange, quand il conduit. Il est producteur de cinéma. Il a un sixième sens mais aussi une qualité inappréciable : il aime le cinéma passionnément et s’en fait une très haute opinion. Il reçoit les scénaristes, lit ce qu’ils ont écrit, se bat seul contre tous pour financer le film d’un réalisateur aux exigences astronomiques et caprices démesurés. Il console éventuellement un acteur qui se sent mal sur un tournage. Bref, en plus d’être un passionné, hyperactif et charismatique, c’est un type bien.

     

     

    Chez lui, c’est la famille Ricorée, en mieux : une femme aimante, trois filles merveilleuses, une grande maison à la campagne, un superbe appartement à Paris. Il est un père attentif amoureux fou de ses filles, d’une complicité admirable avec sa femme qui l’écoute et le comprend.

     

     

    Hélas, pour parvenir à faire aboutir des projets exigeants, différents, du « cinéma d’auteur » non formaté, Grégoire prend de gros risques financiers jusqu’à hypotéquer sa société, son « catalogue » de films, ses biens propres.

     

     

    Lorsque les ennuis deviennent insurmontables, que les banquiers ne suivent plus, que l’Urssaf et les huissiers sont à ses portes, Grégoire perd totalement pied. Le mot « échec » résonne dans sa tête comme la pire honte. Le désespoir s’abat sur lui comme un cataclysme. Il se suicide.

     

     

    Stupeur de l’entourage professionnel et familial qui n’a rien vu venir et qui va devoir assumer les dettes, tenter de sauver ce qu’il y a à sauver et se reconstruire.

     

     

    Rarement on a l’occasion de voir à l’écran un acteur instantanément charismatique s’emparer aussi littéralement et de façon si convaincante d’un rôle et d’un film tout entier (car son absence ne cessera de hanter et de nous manquer). Louis Do de Lencquesaing est cet acteur magnétique au pouvoir de séduction XXL qui disparaît en plein milieu de l’histoire mais qui aura marqué à jamais les autres personnages et les spectateurs. Loin de l’image cliché du producteur à lunettes noires ou gros cigare derrière un bureau tape à l’œil, Grégoire est un passionné qui se bat pour le cinéma, à l’écart du glamour. Pour ce personnage, Mia Hansen-Love ne cache pas s’être largement inspiré d’Humbert Balsan, producteur français précieux qui s’est donné la mort en 2005 et qui est à l’origine de découvertes indispensables telles que « Y’aura-t-il de la neige à Noël ? » de Sandrine Veysset, « le Destin » de Youssef Chahine ou encore « Quand la mer monte » de Yolande Moreau. Raviver la mémoire de cet homme irremplaçable n’est pas le seul atout du doux, tendre et merveilleux film de la réalisatrice. Il permet de mettre en lumière un métier méconnu qui semble vraiment acrobatique et passionnant. Mais pas seulement.

     

     

    Comme dans son premier film, l’admirable et délicat « Tout est pardonné », Mia Hansen-Love parle de la famille, de l’enfance, de ce qui construit, détruit ou aide à avancer. Elle pose des questions sans y répondre, sans pathos, sans agitation. Que sait-on des gens qu’on aime et qui partagent notre vie ? Comment peut-on passer à côté d’un tel désespoir sans le voir, alors qu'ici Grégoire sème de petits indices… ? Comment continuer à vivre sans ou avec la culpabilité ? Comment l’éviter ou la surmonter ?

     

     

    Elle élude intelligemment les scènes à fort pouvoir lacrymal comme l’annonce de la mort ou l’enterrement. Elle se concentre sur le chagrin que chacun combat avec ses moyens, sur la vie qui continue malgré tout, les filles qui continuent à grandir pour se diriger vers leur vie d'adultes, malgré cette perte douloureuse, ce manque profond que rien ni personne ne comblera jamais.

     

     

    Louis Do de Lencquesaing est Grégoire, convaincant, bouleversant, déchirant mais le reste du casting dans son ensemble, jusqu’aux trois petites filles, est idéal et formidable et prouve que Mia Hansen-Love, en plus de savoir raconter des histoires avec intelligence et profondeur est une exceptionnelle directrice d’acteurs.

  • Arthur et la vengeance de Maltazard de Luc Besson *

    Arthur et la vengeance de MaltazardArthur et la vengeance de MaltazardArthur et la vengeance de Maltazard

    Arthur vit toujours parmi les humains, disons plutôt parmi des adultes inadaptés, mais peut parfois retourner au pays des Minimoys retrouver sa princesse Sélénia qui l'attend en languissant. A la date prévue et avec la complicité de son grand-père, de sa mère et de sa grand-mère il va traverser le passage secret pour retrouver ses amis. C'est précisément ce jour que choisit son père (le plus humain des humains...) pour rentrer en ville et Arthur est bien obligé de se plier à sa volonté. Mais il reçoit un appel au secours : les minimoys sont en danger. Il va donc braver les interdits et affronter de multiples dangers pour les secourir.

    Il y a du bon et du (beaucoup) moins bon dans cette deuxième aventure. J'avais beaucoup aimé la première car il y avait la surprise de découvrir un nouvel univers et de nouveaux personnages, Luc Besson prenait son temps pour installer son histoire et c'était vraiment bon. Cette fois évidemment l'effet de surprise ne peut plus jouer. Mais là où Luc  exagère c'est qu'il n'a fait de ce film qu'un épisode de transition, qu'il nous congédie brusquement par un "à suivre" alors qu'il n'a même pas fini de nous raconter cet épisode. Bien sûr, on ne doute pas que les Minimoys laissés sur place vont s'en sortir et que le vilain Maltazard ne va pas être à la fête sur terre... mais franchement, il ne se passe pas grand chose ici. On attend un semblant de scénario qui n'arrive jamais. Les séquences s'enchaînent. Il faut attendre un temps infini avant de retrouver Sélénia, une vraie bombe absolument craquante, et j'ai toujours envie de fiche des claques à Mia Farrow.

    Par contre, c'est très beau, enfin, moi j'adore, la symphonie et l'explosion de couleurs, la lune la nuit, les bestioles qui font pas peur (je déteste les insectes IRL), et surtout Sélénia. Donc j'irai sans doute voir la suite mais franchement comme disait ma grand-mère "quand y'a d'l'abus, y'a d'l'excès".

    Quant à l'incontournable Freddie Highmore on se demande comment il va pouvoir poursuivre l'aventure car il grandit le bougre et pas en grâce je trouve. Il a squatté tous les films où un moutard à l'air ahuri, aux cheveux hirsutes et aux oreilles décolées était nécessaire... mais là, il a 17 ans au moment où je vous parle. Il va finir par avoir atteint l'âge limite pour courir dans les pâturages. Cela dit, sa Sélénia a mille ans, donc, je dis n'imp' en fait.

  • Qu’un seul tienne et les autres suivront de Léa Fehner ****

    Qu'un seul tienne et les autres suivrontQu'un seul tienne et les autres suivrontQu'un seul tienne et les autres suivront

    Que peuvent bien avoir en commun Stéphane qui va accepter un marché bien tordu pour essayer de se sortir de la mouise, Zohra algérienne qui vient en France pour comprendre comment et pourquoi son fils est mort et Laure jeune fille de 16 ans incomprise qui va s’amouracher d’un jeune rebelle un peu révolutionnaire ?

    Simplement et accidentellement, ils vont tous se retrouver à faire la queue pour entrer au parloir d’une prison du sud de la France. Et ce film, le premier d’une jeune réalisatrice de 28 ans nous y conduit de façon magistrale après nous avoir fait partager un peu la vie de chacun des personnages pendant deux heures exceptionnelles. Et ses personnages, elle les aime, elle ne les stigmatise pas, ne les juge pas et du coup on entre avec une facilité déconcertante en empathie avec eux.

    Réussir un film choral est un exercice de haute voltige et Léa Fehner le maîtrise admirablement. Les trois personnages principaux n’ont rien à voir les uns avec les autres, ne se rencontrent pas, leurs histoires n’ont rien en commun, sauf peut-être la tragédie, l’événement ou la décision qui va les mener au parloir, mais elles nous sont racontées avec une fluidité, une cohérence et une progression dramatique tellement maîtrisées qu’elles forcent l’admiration.

    De prison il est question et pourtant on n’y passe relativement peu de temps. Tout se joue également à l’extérieur, car la prison ne détruit pas uniquement ceux qui y sont entre les murs. Mais la réalisatrice tourne autour du bâtiment imposant et monstrueux, nous laissant découvrir le no man’s land où il est construit mais aussi percevoir les bruits tellement caractéristiques tels que les clés qui tournent dans les serrures, les portes qui claquent et les cris qui fusent constamment.

    Par touches successives, la réalisatrice décrit les moments où la vie de chacun va basculer pour parvenir à son épilogue et on aimerait pouvoir prolonger encore cet accompagnement et savoir ce qu’ils vont devenir.

    La maîtrise de son sujet et de sa réalisation n’est pas le seul atout de Léa Fehner et elle peut y ajouter une direction d’acteurs hors pair. Elle a tiré le meilleur des quelques joyaux qui composent son extraordinaire casting. La petite Pauline Etienne en ado/adulte « pas si jeune que ça » est toujours d’une justesse impressionnante, Farida Rahouadj incarne à elle seule toutes les femmes maternelles/« maternisantes » du cinéma, Julien Lucas le jeune médecin mufle, macho se transforme imperceptiblement et succombe presque à son insu, Marc Barbé est un élégant manipulateur tout en finasseries, Vincent Rottiers voyou charmeur souvent au bord de l’implosion, et bien sûr surtout Reda Kateb, déjà particulièrement remarquable dans « Un prophète », il prouve ici ce qu’est un Acteur tout en douceur...

    Mais au fond il n’est pas étonnant qu’avec un titre aussi magnifique Léa Fehner ait réussi un film qui y ressemble, humain, intense, fiévreux et chaleureux.

  • MA SEMAINE AU CINEMA ET MES COUPS DE COEURS

     Yuki et Nina de Hippolyte Girardot et Nobuhiro Suwa ***

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    MENSCH de Steve Suissa **

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    PERSÉCUTION de Patrice Chéreau *

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    LA FOLLE HISTOIRE D'AMOUR DE SIMON ASKENAZY de Jean-Jacques Zilbermann°

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    MES COUPS DE COEUR

    Sami Frey Yuki & Nina

  • Yuki et Nina de Hippolyte Girardot et Nobuhiro Suwa ***

    Yuki & NinaYuki & Nina

    Il est français, elle est japonaise. Ils ne s’entendent plus, ne se comprennent plus, ne s’aiment plus et vont se séparer. Ils ont une petite fille, Yuki 9 ans parfaitement bilingue et la mère décide de retourner vivre au Japon en l'emmenant. Mais Yuki ne veut pas être éloignée de son père ni de sa meilleure amie Nina avec qui elle partage tout, les jeux et les confidences. Nina non plus ne veut pas perdre son amie.

    Ce film étrange, dans le sens exotique et rare du terme, avec deux enfants dans les rôles principaux ne s’adresse bizarremment pas prioritairement aux enfants mais aux parents. Car ce sont bien eux qui posent les fondations de ce que sera l’avenir. Les décisions, erreurs, délicatesses et maladresses des adultes vues par le regard de Yuki et Nina peuvent non seulement faire réagir les adultes que nous sommes mais aussi les faire s’interroger sur les douleurs et bouleversements qu’ils ont vécus. Ce ne sont pas forcément des épreuves mais pas non plus des parties de plaisir, et c’est de toute façon ce qui fait que les adultes sont ce qu’ils sont.

    Dans un premier temps, les deux amies confiantes (elles ne peuvent pas être séparées) essaient par la manière douce de convaincre les parents de Yuki de rester ensemble. Elles « confectionnent » une lettre presque anonyme qu’elles signent « la fée de l’amour ». C’est ainsi que les deux réalisateurs donnent à leur film une direction Le courrier bouleversera les parents de Yuki mais n’aura finalement aucun effet sur la décision. Alors que Yuki s’affirme de façon directe mais simple et douce « je n’irai pas au Japon », Nina pousse une vraie colère face à l’incompréhension et à l’obstination des adultes. C’est d’ailleurs Nina plus active que son amie qui incitera celle-ci à passer au plan B.

    Les deux petites filles vont donc fuguer et sac au dos avec le matériel de survie (des doudous) elles vont, après avoir pris le train, errer un temps dans une forêt. A ce moment on entre véritablement dans l’aspect le plus irréel et en même temps le plus réaliste du film. Evidemment on tremble avec et pour les fillettes dans cette forêt magnifique mais qui pourrait être hostile, où les fougères sont presque aussi grandes que les enfants, où chaque bruit dans le silence prend des proportions terrifiantes, mais on pense aussi inévitablement au Petit Chaperon Rouge au Petit Poucet et plus encore lorsque Yuki passera de l’autre côte du miroir de la forêt à Alice au Pays des Merveilles.

    Le visage de la petite Yuki (Noé Sampi) douce et rêveuse et la volonté de l'énergique Nina (Arielle Moutel), leurs conversations de chipies, leurs fourires, leur présence prouvent que les enfants au cinéma peuvent parfois accomplir des miracles.

    Que de trouvailles dans ce film franco-japonais à plus d'un titre, à l’épilogue suffocant de beauté, au final de conte de fées où la caméra s’éloigne des personnages et qui nous laisse mélancoliques et songeusr en nous rappelant avec beaucoup d’élégance que l’enfance et les paradis perdus ne sont jamais bien loin…

  • Mensch de Steve Suissa **

    MenschMensch

    Sam est un expert dans sa branche : casseur de coffre-forts. Il a un ami et complice qui est aussi son chauffeur sur ses cambriolages, Tonio. Très proche de sa famille juive très unie et parfaitement au courant de ses activités, Sam a la garde de son petit garçon. Il n'a jamais connu son père dont on lui a dit qu'il était mort trois mois avant sa naissance. Il semble surtout très lié à sa mère et à son grand-père qui aimerait qu'il le rejoigne dans son entreprise familiale. Enfin, il débute une relation amoureuse avec une jeune femme rencontrée quelques mois auparavant mais qui s'étonne de ses mystères et de ses absences.

    A ce tournant précis de son existence et suite à une série d'événements et de révélations en cascade, Sam va devoir faire des choix, prendre des décisions et tenter de devenir, comme lui a toujours demandé son grand-père, un mensch, autrement dit en langage yiddish : un homme bien !

    L'avantage avec les films dont on a strictement rien lu est qu'il recèle beaucoup de surprises, on ne s'attend à rien et on se laisse porter. Je dois dire que je suis allée le voir sans rien en savoir attirée par son très séduisant casting : Nicolas Cazalé, Sami Frey et... oui, Anthony Delon. Et je n'ai pas été déçue car l'interprétation en est l'un des évidents atouts. Quant au film lui-même, il n'est pas aussi fiévreux que son trio d'interprètes principaux, mais il est largement aussi ténébreux. Il se dégage du Paris hivernal la nuit, loin des habituels ou fréquents et trop faciles clichés touristiques, une atmosphère mystérieuse et on a des les premières images la certitude que rien ne se passera comme prévu. La menace suinte à chaque scène, le danger guette. On sait à peu près rapidement d'où ou plutôt de qui il va surgir mais on doute, on redoute de découvrir sur qui il va s'abattre.

    Sans action spectaculaire, relativement nonchalant même et malgré quelques facilités scénaristiques les quelques jours dans la vie de ces "mensch" est un film plus que recommandable  bien que trop sage. Cela dit je le répète, retrouver Sami Frey, sa voix douce et caverneuse, sa mélancolie, sa colère, sa tristesse face à Nicolas Cazalé chien fou désorienté, et les surprendre en larmes tous les deux, vaut bien le détour.

    Quant au voyage je l'aurais de toute façon fait pour Anthony Delon dont je souhaite toujours que les réalisateurs se l'arrachent. Mais j'imagine qu'au lieu de le servir, sa voix, son regard, son visage, sa démarche, ses expressions... sont plus un handicap pour lui. Dommage car il a tout d'un grand.